PARIS (awp/afp) - Après une nouvelle semaine où les tractations commerciales sino-américaines et les négociations autour du Brexit ont dominé l'actualité boursière européenne, un sursaut des indices n'est pas exclu dans les jours qui viennent, même si la traditionnelle hausse massive de fin d'année paraît définitivement compromise.

"Il n'y a pas que des mauvaises nouvelles mais on est quand même dans un marché qui reste très volatil, qui a besoin de voir un peu de concret et qui commence à s'inquiéter pour la croissance en 2019", a déclaré à l'AFP Florence Barjou, responsable de la gestion diversifiée chez Lyxor AM.

"La dose de pessimisme chez les investisseurs est absolument colossale, à la fois sur les effets de la guerre commerciale et à moyen terme sur la récession à venir aux Etats-Unis", a estimé pour sa part Régis Bégué, associé-gérant de Lazard Frères Gestion, dans un entretien avec l'AFP.

Sans surprise, les discussions douanières entre Pékin et Washington vont continuer à être scrutées de près par les Bourses européennes après des signes de détente jugés encourageants qui n'ont toutefois pas suffi à prolonger leur rebond de milieu de semaine.

"Nous avons quand même l'impression qu'il y a quelques signes d'amélioration, notamment l'évocation d'un calendrier, le fait que les Chinois visiblement planifient à nouveau d'acheter du soja américain à partir de janvier", a détaillé Mme Barjou.

La libération sous caution de la directrice financière de Huawei au Canada, ou encore l'annonce par la Chine de la suspension pour trois mois de ses taxes punitives frappant le secteur automobile américain allaient également dans le sens d'un apaisement.

"Le problème, c'est que le marché ne se contente plus de signes positifs, il a envie de voir du concret car comme on sait très bien que les revirements du président américain peuvent être un peu brutaux et parfois imprévisibles", a rappelé Mme Barjou.

Statistiques européennes en berne

Mais la déception des investisseurs, qui s'est traduite en fin de semaine par une nouvelle baisse des indices, n'est pas venue du seul front commercial.

"A la guerre commerciale et au Brexit s'ajoutent des inquiétudes sur la croissance" après des statistiques chinoises décevantes mais surtout des indicateurs PMI mal orientés en zone euro, notamment en France, a noté Mme Barjou.

L'activité du secteur privé en France est en effet tombée en décembre à son plus bas niveau en deux ans et demi, se rétractant sous l'effet des manifestations et blocages des "gilets jaunes", selon un indice provisoire publié vendredi par le cabinet IHS Markit.

"Les troubles sociaux en France ont quand même des répercussions sur les perspectives de stabilité en Europe (...) donc indirectement sur toute l'économie" de la zone euro, a expliqué M. Bégué.

Or ces indicateurs décevants interviennent "au lendemain de la réunion de la BCE et de la conférence de presse de Mario Draghi qui s'est montré justement un peu moins optimiste sur les perspectives de croissance européenne", a relevé Mme Barjou.

Le président de l'institution de Francfort, s'il s'est montré confiant dans les perspectives d'inflation, a en revanche évoqué des "risques orientés à la baisse" en matière de conjoncture.

Si les propos de Mario Draghi n'ont eu quasiment aucun effet sur le marché de la dette, "sur le front des actions, ce discours quand même assez pessimiste et anxiogène a plutôt eu tendance à amplifier la baisse des valeurs cycliques un peu sensibles à la conjoncture", confortant "le marché dans le pessimisme ambiant", a indiqué M. Bégué.

La semaine prochaine, ce sera au tour de la Réserve fédérale américaine (Fed) de s'exprimer. Le marché anticipe un quatrième relèvement de taux pour 2018, avant une probable réduction de la voilure en 2019.

Si les indicateurs macroéconomiques se font plus ténus, de son côté, "l'agenda politique (reste) imprévisible", avance Mme Barjou.

L'incertitude autour du Brexit, en particulier, restait entière, même si "le maintien de Theresa May au pouvoir est une vraie bonne nouvelle parce que cela éloigne la perspective d'un Brexit dur", a fait valoir M. Bégué.

Mais "pour l'instant les Européens ont plutôt eu tendance à afficher un positionnement assez dur, assez ferme donc il n'y a pas vraiment d'amélioration de ce côté-là", a tempéré Mme Barjou.

Dans ce contexte, "l'amélioration des relations entre l'Italie et la Commission européenne avec une proposition de déficit qui a été revue à la baisse", est passée quasiment inaperçue, remarque Mme Barjou.

Reste qu'étant donné les points bas actuels du marché, "le potentiel de bonnes nouvelles est quand même supérieur au potentiel de mauvaises nouvelles", relativise M. Bégué.

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