Les gains spectaculaires de Facebook, Amazon, Netflix et Alphabet ont fortement contribué à la hausse du marché boursier américain au cours des dernières années, ainsi que le secteur plus large des valeurs technologiques, mais ce segment de marché est considéré comme étant suracheté, avec des valorisations qui restent élevées.

Porté par une croissance soutenue des résultats de ses composantes et par la confiance des investisseurs dans la capacité d'innovation de la Silicon Valley, l'indice S&P 500 des technologiques est en hausse de 16% depuis le début de l'année et affiche la plus forte performance de Wall Street.

Mais un récent accès de faiblesse des valeurs vedettes chinoises de haute technologie, qui vient d'être remis en lumière par l'annonce mercredi de la première baisse du bénéfice trimestriel de Tencent Holdings en près de 13 ans, a accentué les inquiétudes des investisseurs face à la dépendance de Wall Street à quelques valeurs de croissance de premier plan.

L'action Tencent, numéro un chinois des réseaux sociaux et des jeux en ligne, a perdu plus de 6% au cours des deux dernières séances et est en repli de près d'un tiers par rapport à son niveau record de clôture atteint au mois de janvier.

"Tencent est un bon relais de la croissance et du risque. Aujourd'hui, tout est tellement question de dynamique sur le marché que si un élément cède, c'est l'ensemble du secteur qui flanche", dit Joel Kulina, trader chez Wedbush Securities.

Autre facteur d'inquiétude pour les investisseurs: Netflix et Facebook qui, avec Amazon et la maison mère de Google, constituent les FANG, ont fortement baissé depuis la publication en juin de leurs résultats trimestriels et leurs prévisions.

Netflix a perdu 22% depuis son record de début juillet, après avoir annoncé une croissance nettement inférieure aux attentes du nombre de ses nouveaux abonnés, et Facebook a cédé 19% depuis le 25 juillet, dans la perspective d'un nouveau ralentissement de son chiffre d'affaires à la suite du scandale de détournement des données personnelles de ses abonnés.

SE PINCER LE NEZ

Amazon en revanche a bondi de 60% depuis le début de l'année et a terminé mardi à un plus haut historique, tandis qu'Alphabet est en hausse de 17% depuis le 31 décembre 2017.

"Les FANG continueront à jouer un rôle de tout premier plan dans les deux ou trois prochaines années", dit Jake Dollarhide de Longbow Asset Management. "Ils sont chers mais il faut se pincer le nez et les acheter."

L'indice large S&P 500 patine tout près de son record atteint en janvier et gagne 6% depuis le début de l'année.

Même après avoir repris des couleurs à la suite d'un fort courant de ventes en février, il est relativement bon marché, à 16,5 fois ses résultats attendus, contre 18,6 fois en janvier, selon les données de Thomson Reuters. Quant à l'indice S&P des technologiques, il se traite à 18,7 fois ses résultats attendus, contre un pic de 19,6% pour ce ratio atteint fin janvier.

Le segment des FANG, avec Apple et les valeurs chinoises Baidu, Alibaba et Tencent, sont les valeurs les plus activement échangées à Wall Street ce mois-ci pour le septième mois d'affilée, selon une enquête de Bank of America auprès de gérants de portefeuilles. Et sur les marchés actifs, le risque d'un brusque retournement de tendance à la baisse en cas de changement de sentiment est élevé.

Jusqu'à présent, les valeurs technologiques chinoises ont été tirées par le rally des techs américaines, mais leurs performances boursières peuvent aussi refléter les perspectives d'évolution de l'économie et de la réglementation chinoises.

Sachant que les investisseurs sont également inquiets de l'impact potentiel de la guerre commerciale entre Pékin et Washington, les poids lourds chinois d'internet Baidu et Alibaba ont perdu respectivement 11% et 7% depuis fin juin. Les titres cotés a New York ont tous deux repris quelques couleurs jeudi et vendredi, après un net courant de ventes en début de semaine.

Ayant essuyé des pertes sur les valeurs chinoises, les gérants de fonds investis dans les techs pourraient être tentés de vendre leurs titres américains pour réaliser leur plus-value.

"Avec le temps, la profondeur du marché tend à diminuer, des groupes de moindre importance tirent le marché, et une fois qu'ils ont commencé à lâcher, ce que Tencent nous annonce peut-être, les marchés plus larges peuvent suivre", souligne Peter Cecchini, chargé de la stratégie chez Cantor Fitzgerald.

Amazon se traitait récemment à 87 fois ses résultats attendus, soit son ratio cours/bénéfice au plus bas en plus d'un an. Mais de nombreux gérants focalisent leur attention sur la croissance explosive du revenu du géant du commerce en ligne. A cette aune, Amazon paraît cher, à un ratio de 3,5 fois son revenu attendu, un record, selon les données de Thomson Reuters.

(Avec Sruthi Shankar à Bangalore, Juliette Rouillon pour le service français)

par Noel Randewich