Wall Street a opéré hier en fin de parcours un comeback à l'américaine, en clôturant en hausse une séance qui avait fort mal commencé. Les trois principaux indices locaux ont ainsi mis à fin l'hémorragie des derniers jours. Le S&P500 et le Dow Jones ont grappillé un peu moins de 0,5%, tandis que le gain du Nasdaq 100 était tout symbolique : +0,02%. En Europe, les choses s'étaient moins bien passées un peu plus tôt, puisque les indices ont passé une cinquième séance consécutive dans le rouge. Il me faut souligner que le rebond américain était assez désordonné, avec une baisse pour les valeurs pétrolières et les technologiques, alors que les deux segments étaient plutôt antagonistes dernièrement, et un retour d'affection pour la santé. J'y vois un petit saut vers la qualité. "C'était du grand n'importe quoi", aurait commenté Mamie Lucette, que j'invoque parfois dans ces colonnes pour apporter un peu de bon sens, que je ne qualifierai pas de "paysan" pour éviter de prendre un bon coup de gourdin.

Dans la série des choses qui ne se sont pas produites depuis longtemps, on peut désormais inclure le premier marché baissier des obligations "en une génération", souligne Bloomberg (Mamie Lucette approuve). Un marché baissier, c'est quand un produit financier commence à perdre plus de 20% sur ses plus hauts précédents. Cela se produit assez régulièrement sur les actions (7 fois depuis 1980 je crois, et 19 fois en 140 ans). Mais c'est beaucoup plus rare sur les obligations d'émetteurs bien notés. Or l'indice Bloomberg Global Aggregate Total Return, qui intègre à la fois des obligations d'Etat et des obligations d'entreprises de qualité, vient d'atteindre une baisse de 20% depuis son plus haut qui remonte à 2021. Cette baisse est assez facile à expliquer : elle est causée par les politiques monétaires les plus agressives déployées depuis plusieurs décennies pour contrer une inflation qui, elle aussi, sera inscrite dans les annales. Je rappelle que le prix des obligations recule quand leur rendement augmente, ce qui est actuellement le cas.

Cette situation met à mal le schéma classique selon lequel un investisseur peut aller se cacher sur le marché obligataire quand le marché action va mal. En 2022, les deux sont convalescents ensemble. Si bien que le portefeuille classique 60/40 (60% d'actions, 40% d'obligations), censé amortir les périodes comme celles que nous vivons, affiche de mauvaises performances : il perdait 19,4% à fin août, selon le modèle de Bank of America, contre -16,8% au S&P500. Voilà qui vient s'ajouter aux bizarreries de l'année et qui va réclamer quelques ajustements dans les approches sur la diversification du risque. Mamie Lucette arbore un grand sourire en me montrant fièrement le petit carnet rouge de son Livret A de la Caisse d'Epargne, celui avec le gros écureuil dessus.

En tout cas, cette situation apporte de l'eau au moulin de ceux qui dressent un parallèle avec la seconde moitié des années 60, lorsque les obligations avaient glissé. Une quinzaine d'années plus tard, Paul Volcker était contraint de faire monter les taux de la Fed à 20% pour annihiler l'inflation. "Il était bel homme mais il fumait tout le temps le cigare en public, c'était vulgaire", se souvient Mamie Lucette.

Sur les marchés, les investisseurs attendent surtout aujourd'hui la publication à 14h30 des chiffres de l'emploi d'août aux Etats-Unis. Pourquoi ? Pour affiner les pronostics sur la bellicosité de la banque centrale américaine. Ils cherchent le point de bascule qui permettra d'envisager l'arrêt des hausses de taux, voire leur reflux. Le marché des options montre que les financiers s'attendent toujours à ce que la Fed baisse ses taux de 25 points de base en 2023. Un pari audacieux. Comme dirait Mamie Lucette, "on l'a attendue longtemps la baisse des taux de la Fed dans les années 70".

Les chiffres de l'emploi seront donc le gros "game changer" du jour, même si leur interprétation à chaud est souvent un exercice complexe. Il y aura aussi un sommet du G7 qui doit évoquer le "plafonnement" du pétrole russe, même si on a un peu de mal à voir comment cela pourrait se concrétiser (enfin moi, j'ai du mal). Pendant ce temps, la Chine a toujours l'air aux prises avec la rigidité de sa stratégie zéro covid, qui entraîne de nouvelles restrictions dans d'importants centres industriels comme Shenzhen, Chengdu et Dalian.

En Asie Pacifique, le bilan hebdomadaire est négatif, alors que la dernière séance de la semaine s'achève en baisse modérée. A Tokyo, le Topix perd 0,3% tandis qu'à Sydney, l'ASX est en baisse de -0,18%. Hong Kong et la Chine continentale évoluent dans le rouge pâle. L'inde et la Corée grappillent à l'inverse quelques points. Les indicateurs avancés européens permettent de pronostiquer un rebond, car les indices du vieux continent étaient déprimés en clôture, contrairement à Wall Street. Il y aura donc un rattrapage technique. Le CAC40 gagnait 0,5% à 6066 points peu après l'ouverture. 

Les temps forts économiques du jour

Chiffres mensuels de l'emploi américain (14h30) et commandes de biens durables (16h00) donc comme temps forts de la séance. Tout l'agenda macro ici.

L'euro est repassé sous la parité à 0,9964 USD. L'once d'or a cassé le seuil symbolique des 1700 USD. Le pétrole a poursuivi sa baisse mais il esquisse un rebond ce matin, avec un Brent de Mer du Nord à 94,20 USD le baril et un brut léger américain WTI à 88,50 USD. La dette américaine à 10 ans poursuit son ascension à 3,25%, tandis que le 2 ans atteint 3,50%. Le bitcoin navigue autour de 20 200 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Air Liquide : Goldman Sachs passe d'acheter à neutre en visant 124 EUR.
  • Arkema : Goldman Sachs passe d'acheter à neutre en visant 96 EUR.
  • Assystem : Stifel démarre le suivi à l'achat en visant 50 EUR.
  • Bâloise : Berenberg reste à conserver avec un objectif réduit de 170,80 à 158,20 CHF.
  • Barratt : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 430 GBp.
  • Bellway : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 2370 GBp.
  • Berkeley : HSBC passe de conserver à alléger en visant 3220 GBp.
  • CHR. Hansen : Goldman Sachs passe de neutre à achat en visant 570 DKK.
  • Givaudan : Goldman Sachs passe de neutre à vendre en visant 3100 CHF.
  • Henkel : Goldman Sachs passe de neutre à vendre en visant 62 EUR.
  • Hermès International : Sealand démarre le suivi à l'achat.
  • Nordex : Citigroup passe de neutre achat en visant 12 EUR.
  • Pernod Ricard : Jefferies reste à l'achat avec un objectif relevé de 224 à 230 EUR.
  • Persimmon : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 1530 GBp.
  • Proximus : Morgan Stanley reprend le suivi à souspondérer en visant 14 EUR.
  • Redrow : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 600 GBp.
  • Siemens : Berenberg reste à l'achat avec un objectif réduit de 176 à 175 EUR.
  • Taylor Wimpey : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 120 GBp.
  • Thales : Berenberg reste à l'achat avec un objectif relevé de 144 à 151 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • L'Ukraine demande à TotalEnergies de renoncer au dividende 2022 que versera le russe Novatek, dont il détient 19,4% du capital.
  • La directrice d'Engie, Catherine MacGregor, s'est montrée rassurante sur la situation pour le gaz en France cet hiver.
  • Saint-Gobain entre en négociations pour céder son activité Cristaux et Détecteurs.
  • Canal + (Vivendi) et TF1 se brouillent à nouveau sur la diffusion de contenu.
  • Vinci signe un contrat de 80 M€ à Hong Kong.
  • Arkema finalise l'acquisition de Polimeros Especiales au Mexique.
  • Atos quitte le STOXX Europe 600.
  • Gaztransport & Technigaz va réaliser les cuves de quatre méthaniers pour le compte d'un armateur asiatique.
  • Wendel lance une augmentation de capital réservée à ses salariés.
  • David Dayan rachète les parts de Thierry Petit dans SRP Group à 1 EUR l'action.
  • Abivax a levé 49,2 M€ auprès d'investisseurs professionnels, à 8,36 EUR l'action. La viabilité financière est étendue à la fin du premier trimestre 2023.
  • Europlasma signe un accord avec la société algérienne SO.GE.B.ZRITA, spécialisée dans le désamiantage, pour opérer sur le marché algérien.
  • Don't Nod lance son dernier jeu narratif, "Gerda : A Flame in Winter", sur Nintendo Switch et PC.
  • Reworld se lance dans l'assurance.
  • Dekuple prend le contrôle de Brainsonic.
  • Stef et Winfarm ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Nokia et Nordea chassent Koné et Philips de l'Euro Stoxx 50.
  • Lululemon bondit de 10% hors séance après de bons trimestriels.
  • Broadcom gagne 2% post-clôture après ses résultats trimestriels.
  • Le Royaume-Uni lance une enquête approfondie sur le rachat d'Activision par Microsoft.
  • Le Credit Suisse, en difficulté, veut lancer une activité de gestion de fortune en Chine l'année prochaine, selon Reuters.
  • Laxman Narasimhan, qui a quitté la présidence de Reckitt, devrait prendre les rênes de Starbucks.
  • La CMA britannique valide l'opération de rachat d'Avast par NortonLifeLock.
  • Equinor achève son retrait de Russie.
  • Shell vend une participation de 51,8% dans Aera Energy à IKAV pour environ 2 Mds$. Par ailleurs, Reuters croit savoir que le CEO se prépare à quitter la société l'année prochaine.
  • Twitter va déployer le bouton d'édition tant attendu.
  • SGS rachète l'américaine Penumbra Security.
  • Illumina gagne son procès contre la FTC américaine sur l'achat de Grail.
  • La Bourse suisse ouvre une enquête à l'encontre d'Igea Pharma.
  • Principales publications du jour : Fast Retailing, Nordnet, Ashmore, Compagnie Financière Tradition… Tout l'agenda ici.

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