* Lourdes explosions entendues dans la capitale Harare

* Des véhicules blindés dans les rues

* Le vice-président mis à l'écart

* L'ambassadeur du Zimbabwe en Afrique du Sud nie les rumeurs d'un coup d'Etat contre Mugabe (Actualisé avec Zanu-PF, explosions, soldats dans le siège de la radio télévision publique ZBC)

par MacDonald Dzirutwe

HARARE, 15 novembre (Reuters) - Des soldats se sont déployés dans les rues d'Harare, la capitale du Zimbabwe, et se sont emparés mercredi du siège de la ZBC, le groupe de radio télévision public du pays, des éléments qui alimentent les rumeurs d'un coup d'Etat contre le président Robert Mugabe, au pouvoir depuis l'indépendance du pays en 1980.

Son parti, la Zanu-PF, a accusé le chef d'état-major de l'armée zimbabwéenne, le général Constantino Chiwenga, de trahison 24 heures après que ce dernier a menacé d'intervenir pour mettre un terme à la purge subie par ses alliés au sein de la Zanu-PF.

Un journaliste de Reuters a vu des véhicules blindés de transport de troupes circuler dans les principales rues entourant la capitale. Des soldats agressifs ont ordonné à des voitures de continuer à circuler.

"Ne tentez rien d'insensé, poursuivez votre chemin", a crié l'un des ces soldats à Reuters sur le Harare Drive, l'un des axes de la ville.

Des soldats ont ensuite pris le contrôle du siège de la ZBC, principal porte-voix de Robert Mugabe, donnant l'ordre aux employés, dont plusieurs ont été rudoyés, de quitter les lieux, ont dit des membres du personnel du diffuseur et des militants des droits de l'homme.

Peu après, un témoin Reuters a fait état de plusieurs explosions entendues dans le centre d'Harare, sans être en mesure d'en dire les causes.

Malgré la présence de troupes dans différents endroits de la capitale du Zimbabwe, l'armée ne mentionne pas le sort de Robert Mugabe, 93 ans, soit le plus vieux dirigeant africain.

Celui qui se qualifie lui-même "Grand monsieur" de la politique africaine est la cible de vives critiques alors que la situation économique du Zimbabwe se dégrade et que la corruption demeure répandue.

Seul représentant du gouvernement à réagir à ce stade aux événements en cours dans Harare, l'ambassadeur du Zimbabwe en Afrique du Sud a réfuté les rumeurs concernant un éventuel coup d'Etat contre le président Mugabe, affirmant que le gouvernement de ce dernier était "intact" en dépit de la présence de soldats dans les rues de la capitale.

"Vraiment, il ne se passe rien. Ce sont seulement des affirmations des réseaux sociaux", a déclaré Isaac Moyo à Reuters.

Sur son site, l'ambassade des Etats-Unis au Zimbabwe a cependant annoncé qu'elle restait fermée au public mercredi, recommandant aux citoyens de se "mettre à l'abri" et ordonnant à ses employés de rester chez eux en raison des "incertitudes politiques en cours".

La ZBC n'a pas diffusé son habituel journal télévisé de 23h00, sans donner d'explications. Lors de son dernier bulletin plus tôt dans la sourée, la chaîne avait diffusé les images d'une manifestation anti-militaire menée par la section jeunesse du parti présidentiel.

MESSAGE SANS PRÉCÉDENT DU CHEF DE L'ARMEE

Le Zimbabwe est sous tension depuis lundi, jour où Constantino Chiwenga a adressé lundi un avertissement sans précédent à la Zanu-PF, au pouvoir depuis l'indépendance en 1980, pour dénoncer l'éviction la semaine dernière du vice-président Emmerson Mnangagwa.

Il a prévenu que l'armée n'hésiterait pas à intervenir pour "protéger notre révolution".

La Zanu-PF a estimé mardi soir que la déclaration du général Chiwenga visait à perturber la paix et la stabilité, l'accusant d'adopter un "comportement de traîtrise".

La Zanu-PF a assuré en outre qu'elle ne céderait jamais aux pressions de l'armée. Robert Mugabe a présidé mardi un conseil des ministres.

Longtemps considéré comme le dauphin du président Mugabe et favori pour lui succéder, Emmerson Mnangagwa a été démis de ses fonctions pour "déloyauté" le lundi 6 novembre.

La veille, l'épouse du président, Grace Mugabe, l'avait traité de comploteur, des propos qui ont ravivé les tensions au sein de la Zanu-PF.

"La purge actuelle (...) qui vise les membres du parti ayant été engagés dans la guerre d'indépendance doit cesser sur le champ", a dit lundi le général Chiwenga.

Emmerson Mnangagwa, 75 ans, est considéré comme ayant des liens étroits avec les militaires. Ancien ministre de la Défense, il a aussi dirigé les services secrets du Zimbabwe.

Son éviction laisse la voie libre à Grace Mugabe pour occuper un des deux sièges de vice-président et succéder à son mari, qui est âgé de 93 ans, que ce soit lors de l'élection présidentielle de 2018 ou à son décès.

Grace Mugabe, 52 ans, dont le vif tempérament et les goûts de luxe ne sont pas appréciés de tous au sein du parti et du gouvernement, jouit du soutien d'une frange plus jeune de membres du parti, la "Génération 40" ou "groupe G40". (MacDonald Dzirutwe et James Macharia; Gilles Trequesser, Guy Kerivel, Eric Faye et Jean Terzian pour le service françai, édité par Benoît Van Overstraeten)