Parmi ces professionnels qui modifient leurs allocations d'actifs en vue du scrutin du 6 novembre figurent les responsables des investissements de Federated Investors, OppenheimerFunds et BMO Global Asset Management.

Leur crainte principale est celle d'une "vague bleue" démocrate qui priverait le Parti républicain de majorité au Congrès, ce qui pourrait ouvrir la porte à de nouvelles enquêtes visant l'administration Trump et entraîner un regain de volatilité à Wall Street.

"Notre inquiétude s'appuie sur le fait que l'électorat démocrate est très engagé politiquement et susceptible de voter en force, alors même que les 'midterms' sont généralement défavorables au parti au pouvoir", explique Phil Orlando, stratège chez Federated Investors à New York.

Or une victoire nette le 6 novembre pourrait enhardir les futurs candidats démocrates à l'élection présidentielle de 2020 et les amener à promettre un accès universel aux soins, une hausse du salaire minimum ou l'abrogation des baisses d'impôts votées en décembre, autant d'initiatives susceptibles de freiner la croissance, ajoute-t-il.

Anticipant un tel scénario, Phil Orlando a commencé à vendre certaines lignes d'actions dès la fin juin, réduisant la part des actions américaines dans son portefeuille au profit de ses avoirs en cash même s'il continue de surpondérer les valeurs US.

Il dit s'attendre à ce que la Bourse américaine perde au moins 10% entre la fin août et septembre dans la perspective d'un succès démocrate le 6 novembre.

Les démocrates devront reprendre 23 sièges pour emporter la majorité à la Chambre des Représentants, et deux leur suffiront pour contrôler le Sénat.

Sur les 36 sièges du Sénat à pourvoir, seuls neuf sont occupés actuellement par des républicains, et 10 sortants démocrates se représentent dans des Etats remportés par le président Donald Trump en 2016.

PAS D'AFFOLEMENT

Pour l'instant, les marchés financiers n'ont pas montré de signe d'affolement à la perspective d'un changement de majorité dans moins de 100 jours.

Le S&P-500, l'indice de référence des gérants américains, a gagné 5,2% depuis le début de l'année et près de 9% depuis ses plus bas du début février.

Il a encore pris 0,46% vendredi, bouclant une cinquième semaine consécutive de hausse.

L'économie américaine a enregistré une croissance annualisée de 4,1% au deuxième trimestre, un niveau qui n'avait plus été atteint depuis 2014, selon la première estimation publiée le 27 juillet par le département du Commerce.

Jon Adams, stratège chez BMO Global Asset Management, redoute que les banques et les poids lourds technologiques fassent l'objet d'une attention accrue en cas de majorité démocrate, après avoir bénéficié d'un blanc-seing des républicains.

Une victoire démocrate aux midterms réduirait aussi la possibilité d'un accord bipartisan sur des dépenses d'infrastructure et renforcerait les tenants d'un relèvement de l'impôt sur les sociétés, ajoute-t-il.

"Le Parti démocrate est confronté au même problème que celui qu'a connu le Parti républicain, à savoir la coexistence de deux camps au sein d'un même parti", dit-il. "Nous pensons que les perspectives économiques pour les 18 prochains mois restent très positives, en grande partie grâce au coup de pouce de la réforme fiscale décidée par les républicains".

Même si le Parti républicain conserve l'une ou l'autre chambre du Congrès, voire les deux, il est peu probable que se répète le "Trump trade" qui a porté Wall Street au pinacle en 2016 et 2017, observe Brian Levitt, stratège chez OppenheimerFunds.

Cette stratégie boursière avait consisté à acheter massivement des valeurs financières et industrielles après la victoire du candidat républicain à l'élection présidentielle de novembre 2016 dans l'anticipation de mesures de dérégulation bancaire, de dépenses d'infrastructure et de baisses d'impôts.

Au lieu de cela, les valeurs de croissance vont probablement continuer de faire la tendance à Wall Street, en profitant des effets de la réforme fiscale, pense Brian Levitt.

"Typiquement, il faut attendre un changement de cycle, autrement dit le déclenchement d'une récession, pour qu'il y ait un changement de leadership sur le marché", dit-il.

En attendant, constate-t-il, "les liquidités et les obligations d'Etat à court terme ont retrouvé une attractivité certaine."

(Véronique Tison pour le service français)

par David Randall