Ce départ s'ajoute à celui de l'Allemand Stefan Müller, directeur délégué à la Performance du constructeur, lequel laisse le champ libre à Thierry Bolloré dans la perspective de la future succession.

L'Etat français, principal actionnaire de Renault, a pressé Carlos Ghosn de désigner un numéro deux susceptible de prendre un jour la relève à la tête de l'alliance avec Nissan et Mitsubishi. Aucun commentaire n'a pu être obtenu auprès du gouvernement dans l'immédiat.

Ex-PDG de Total, Thierry Desmarest a fait savoir au constructeur automobile en début de semaine qu'il quittait ses fonctions, à l'âge de 72 ans, avant le terme théorique de son mandat en 2020, selon un connaisseur du dossier.

Il avait de toute façon prévu de se retirer après l'assemblée générale des actionnaires, qui aura lieu le 15 juin, d'après une autre source proche de l'ancien dirigeant de Total.

"Pas de motif polémique ou lié à la conjoncture Ghosn" en dépit d'"un effet d'optique trompeur du fait de l'actualité", assure-t-on de même source.

Une porte-parole de Total, où Thierry Desmarest conserve un statut de président d'honneur, n'a pas souhaité réagir auprès de Reuters.

"Nous ne commentons pas les rumeurs et les spéculations", a par ailleurs déclaré un porte-parole de Renault.

Mais selon deux sources, le groupe a fait circuler en hâte vendredi un projet de communiqué attribuant le départ brutal de Thierry Desmarest au fait qu'un conflit d'intérêt aurait été découvert.

"C'est un homme très discret et s'il en ira sans bruit", a dit l'une d'elles, ajoutant qu'il pourrait siéger au prochain conseil mais s'abstenir de participer au vote sur la nomination de Thierry Bolloré.

INTERROGATIONS

Des sources ont dit à Reuters qu'au moins deux administrateurs - autres que Thierry Desmarest - ont fait part de leurs interrogations quant au processus de recrutement et à son issue probable.

"Les candidatures externes n'ont pas été étudiées comme elles auraient dû l'être", a dit une d'entre elles, même quand les cabinets de recrutement ont proposé des profils comme celui du numéro deux de Toyota Didier Leroy.

En plaçant Thierry Bolloré en tête de sa présélection, le groupe a empêché de fait les efforts de conseillers externes visant à lancer dans la course des candidats comme l'Allemand Stefan Müller, un vétéran de BMW.

La nomination d'un nouveau directeur général délégué (COO), ou numéro deux de Renault sera au menu du conseil d'administration de jeudi prochain et devrait être officialisée vendredi à l'occasion de la publication des résultats annuels du constructeur automobile.

Il semblait acquis jusqu'ici que Carlos Ghosn, 63 ans, céderait la direction opérationnelle de Renault à un directeur général, ne conservant que la présidence non exécutive comme chez Nissan et Mitsubishi.

Mais faute d'accord avec l'Etat sur le nouveau rôle qu'il pourrait endosser à la tête de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, c'est le schéma du COO qui semble avoir été retenu.

Carlos Ghosn conservera alors les titres de président et directeur général, et Renault devrait par conséquent proposer de le renouveler comme PDG lors de la prochaine assemblée générale du constructeur, en juin prochain.

(Avec Michel Rose, Simon Carraud et Gilles Guillaume pour la version française, édité par Véronique Tison)

par Laurence Frost