(Reuters) - Le directeur général de Renault, Luca de Meo, a prévenu jeudi que l'année 2021 s'annonçait encore difficile, notamment dans sa première partie avec l'épidémie de coronavirus et la pénurie de puces, après une année 2020 qui s'est soldée par la plus lourde perte nette du constructeur automobile français.

"On est en pleine bataille pour essayer de gérer une année difficile en terme d'approvisionnement, sur les composants électroniques, ce sont tous les effets collatéraux de la pandémie du Covid (...) nous allons vivre une année assez volatile", a déclaré Luca de Meo, qui a pris les rênes du groupe au losange en juillet dernier.

Renault estime que le plus dur de la crise des composants devrait être passé après l'été, mais que l'impact total sur sa production de l'année pourrait atteindre environ 100.000 véhicules.

Ce ton prudent au seuil d'une année riche en espoirs, et l'annonce d'une perte nette, part du groupe, plus lourde que prévu au titre de 2020, ont éclipsé les progrès réalisés par le constructeur pour redresser ses marges.

Vers 12h40, l'action Renault reculait de 4,8% à 37,87 euros, accusant la plus forte baisse du CAC 40, en hausse de 0,51% au même moment.

Le groupe a accusé l'an dernier une perte nette historique de 8,008 milliards d'euros imputable à la baisse de ses ventes sur fond d'épidémie de coronavirus et aux propres difficultés de son partenaire Nissan. C'est la deuxième année qu'il est dans le rouge, après un trou de 141 millions en 2019.

Le consensus des analystes interrogés par Refinitiv donnait une perte de 7,4 milliards d'euros pour 2020.

LE LEVIER DES PRIX EST ACTIONNÉ

Luca de Meo a donné un grand coup de volant stratégique, tournant le dos à l'ambitieuse croissance géographique engagée sous la houlette de son prédécesseur Carlos Ghosn pour donner la priorité aux modèles et aux pays les plus rémunérateurs.

Cette stratégie, conjuguée à une vaste restructuration pour réduire les coûts, a commencé à porter ses fruits au second semestre. Si Renault n'a pas donné de prévisions pour l'année en cours, il a indiqué qu'il pourrait atteindre son objectif d'économies de deux milliards d'euros dès la fin 2021, soit bien en avance sur l'objectif initial.

La contribution des entreprises associées, longtemps une des recettes du succès passé de Renault, a pesé pour 5,14 milliards d'euros, reflet pour l'essentiel des pertes du partenaire japonais Nissan.

En revanche, au second semestre, cet impact a été de seulement -253 millions d'euros.

Levier central dans la stratégie de redressement du groupe, Renault est également parvenu à améliorer de cinq points son mix prix et produit, l'une des meilleures performances en la matière affichée par le constructeur.

En concentrant ses efforts sur les silhouettes dérivées des SUV à la mode et sur le segment compact - celui de la VW Golf - et moins sur les petites voitures, le constructeur entend redresser sa marge opérationnelle en la portant à plus de 3% d'ici 2023, après une marge négative de 0,8% en 2020 mais positive de 3,5% sur le seul second semestre de l'année passée.

Il vise aussi aussi un free cash flow opérationnel de l'automobile de l'ordre de trois milliards d'euros en cumul sur la période 2021-2023.

L'an dernier, le free cash flow a été négatif de 4,5 milliards d'euros, mais positif de 1,8 milliard sur le seul second semestre.

La directrice financière Clotilde Delbos a déclaré espérer un free cash flow positif cette année, à condition que la Banque centrale européenne relève les plafonds instaurés pour le dividende des banques, et donc pour celui que la filière bancaire de Renault, RCI, pourra lui reverser.

(Gilles Guillaume et Sarah White, avec Nick Carey à Londres, édité par Blandine Hénault)

par Gilles Guillaume et Sarah White