Paris (awp/afp) - Un an après l'accélération de son offre publique d'achat (OPA) sur Lagardère, le géant français des médias Vivendi est toujours en négociations avec la Commission européenne pour enfin prendre le contrôle du groupe propriétaire de Hachette Livre.

L'opération financière annoncée le 9 décembre 2021 devait initialement être conclue en un an.

Mais le groupe contrôlé par Vincent Bolloré, qui a acquis 57% de Lagardère mais ne peut utiliser les droits de vote associés, discute toujours avec Bruxelles des remèdes nécessaires pour éviter une position anticoncurrentielle sur le marché de l'édition.

Selon une source proche du dossier, Vivendi doit présenter d'ici à "fin janvier" un ou deux repreneurs pour acquérir près de 30% de sa filiale Editis, deuxième groupe d'édition français, selon un schéma de cession présenté pendant l'été.

Celui-ci consiste à coter l'entreprise en Bourse avant de vendre la part restée au groupe Bolloré.

Le milliardaire breton trouve deux avantages dans cette vente: valoriser au mieux sa part d'Editis et en capter directement le profit.

Pour convaincre Bruxelles, Vivendi a envoyé des premières propositions mi-décembre et la Commission a annoncé dans la foulée repousser de 20 jours ouvrés le délai pour se prononcer, au 23 mai 2023.

Parmi les candidats au rachat, dont les offres sont aujourd'hui examinées par les banques d'affaires en charge du dossier, figurent le groupe français de presse Reworld Media, le leader italien de la presse magazine Mondadori et les hommes d'affaires Xavier Niel (Iliad/Free), Rodolphe Saadé (CMA-CGM) et Daniel Kretinsky (Czech Media Invest).

Secteur "très mobilisé"

L'institution européenne a toutefois déjà bousculé les plans de Vincent Bolloré, qui souhaitait initialement fusionner les maisons de Hachette, leader français et troisième éditeur mondial, avec celles d'Editis, pour créer un mastodonte du secteur.

Elle est cette fois susceptible d'exiger une cession à 100% du groupe propriétaire du dictionnaire Le Robert, des éditions Perrin, Bordas ou Nathan.

Dans ce cas, Vivendi devra au plus vite relancer un appel d'offres et se retrouvera dans une position encore moins favorable face aux potentiels repreneurs.

Le ticket sera en effet plus élevé et le groupe pourrait être forcé d'accepter une forte moins-value par rapport au prix d'acquisition d'Editis, de 829 millions d'euros fin 2019. En revanche, l'opération sera plus simple et plus rapide à réaliser qu'une "distribution-cotation".

Le secteur de l'édition demeure vigilant pour qu'Editis reste un véritable concurrent de Hachette Livre.

"C'est un dossier que nous suivrons jusqu'au bout et sur lequel le secteur reste très mobilisé. Il en va de la diversité éditoriale en France", déclarait à l'AFP fin novembre l'ancienne ministre de la Culture et présidente du directoire du concurrent Actes Sud, Françoise Nyssen.

Chez Editis, les salariés attendent toujours avec appréhension de connaître l'avenir de leur groupe.

Sa direction, malgré cette incertitude sur l'identité de son futur actionnaire de référence, est restée active.

Alors que des rumeurs faisaient état d'un net ralentissement des nouveaux investissements, le groupe a multiplié les initiatives, comme en décembre avec le lancement de maisons d'édition sénégalaise, Saaraba, et canadienne, Gründ Québec.

Editis restera aussi, quoi qu'il arrive, un acteur de poids dans la distribution de livres, avec sa filiale Interforum qui a investi lourdement ces dernières années pour être en pointe.

afp/buc