Paris (awp/afp) - Quarante-trois magasins Carrefour, dont 16 hypermarchés, dans lesquels travaillent environ 6.000 salariés, pourraient sortir du groupe et passer en location-gérance en 2022, a-t-on appris de sources syndicales, à l'issue d'annonces faites jeudi par la direction aux représentants du personnel.

Cela représente 4.706 salariés dans les hypermarchés et 1.301 dans les supermarchés du géant de la distribution, a recensé Philippe Allard, délégué syndical CGT.

Sollicitée par l'AFP, la direction de Carrefour n'avait pas réagi dans l'immédiat.

"Ça s'accélère, c'est le plus gros contingent d'hypermarchés à passer en location-gérance depuis les premières annonces en 2017", a déploré Jean-Yves Chaussin, délégué syndical central FO. "C'est une hécatombe. Maintenant ça avance quasiment aussi vite pour les hypermarchés que pour les Market".

Selon lui, Carrefour comptait 214 hypermarchés intégrés en 2017 et en aura perdu 48 fin 2022.

"En plus, de gros magasins historiques sont concernés", a relevé Sylvain Macé, délégué CFDT. "En termes de management, cette annonce pendant la pandémie est insupportable".

La location-gérance consiste à externaliser le fonctionnement d'un magasin, confié à un gérant. La direction y voit un moyen de relancer des magasins souvent en difficulté, mais les syndicats craignent que cela ne serve à "contourner le droit du licenciement économique".

Pour 2021, environ 3.500 salariés étaient concernés par un passage en location-gérance.

Tous les recours initiés localement par des salariés de magasins passés en location-gérance ont échoué.

Ces derniers mois, ce modèle a provoqué un fort mécontentement social, à l'image de plusieurs grèves et blocages au printemps.

"On n'est plus dans la dénonciation de la casse sociale qui dure depuis un moment. A ce rythme, dans dix ans il ne restera plus grand monde. J'espère que cela va provoquer un électrochoc au plus haut niveau des organisations syndicales", a poursuivi M. Chaussin.

M. Macé a rappelé que la CFDT avait deux exigences: que la rémunération des employés visés par la location-gérance soit garantie au-delà des 15 mois de la clause sociale et que la direction investisse, comme elle le fait dans ses programmes de rachat d'actions, dans les magasins en difficulté.

"Si on n'est pas entendu, on ira sur des mouvements sociaux durs", prévient-il.

"Ce qui est en train de se passer est grave car ça porte atteinte à la souveraineté alimentaire de la France", s'est insurgé jeudi sur CNews le candidat communiste à l'élection présidentielle, Fabien Roussel, dénonçant une "vente à la découpe" qui "risque de provoquer des tensions importantes".

afp/rp