PARIS (Reuters) - Orange a annoncé jeudi le lancement très attendu d'une entreprise dédiée à ses infrastructures mobiles avec l'espoir de capitaliser sur ces actifs fortement valorisés, alors que ses résultats ont souffert en 2020 de la crise du coronavirus.

La nouvelle entreprise, baptisée TOTEM, exploitera dans un premier temps 25.500 tours situées en France et en Espagne, les deux plus grands marchés d'Orange.

Selon l'opérateur, cette "TowerCo" aurait généré en 2020 un chiffre d'affaires supérieur à 500 millions d'euros et un Ebitdaal de près de 300 millions.

Ce lancement intervient alors que plusieurs autres opérateurs télécoms européens ont mis en place des initiatives similaires afin d'éventuellement céder leurs actifs d'infrastructures, qui suscitent un vif intérêt de la part d'investisseurs comme le fonds américain KKR ou l'espagnol Cellnex.

DES PARTENARIATS ENVISAGÉS POUR TOTEM

Selon une estimation de Moody's, les récentes transactions portant sur la cession de tours ont atteint un multiple moyen de valorisation de plus de 22 fois la valeur d'entreprise sur l'Ebitda.

Lors d'une conférence de presse, le PDG d'Orange, Stéphane Richard, a dit ne pas vouloir vendre TOTEM mais s'est dit ouvert à des partenariats avec d'autres opérateurs télécoms européens, comme Vodafone et Deutsche Telekom.

"Notre projet n'est pas de vendre nos tours, TOTEM, a Cellnex ou American Tower, ça c'est clair et net", a-t-il dit en référence à deux des plus gros opérateurs de tours télécoms.

"Notre projet c'est de constituer une autre offre, créée et opérée par un opérateur, et peut-être à moyen terme de voir ceux qui partagent notre vision", a-t-il dit, citant Vodafone et Deutsche Telekom comme d'éventuels partenaires.

Stéphane Richard a précisé qu'aucune discussion officielle n'avait été lancée avec Vodafone et Deutsche Telekom pour le moment.

DÉCEPTION SUR LE T4 ET LES PRÉVISIONS 2021

La création par Orange de cette nouvelle entité intervient après une année difficile pour l'opérateur français, dont la rentabilité a souffert de la crise du coronavirus et de la forte concurrence sur le marché espagnol.

La baisse des frais d'itinérance ("roaming") provoquée par le plongeon des voyages dans le contexte de la pandémie et les coûts directement liés à la crise sanitaire ont pénalisé l'Ebitdaal du groupe, indicateur clé de sa rentabilité opérationnelle. En 2020, il ressort à 12,68 milliards d'euros, en baisse de 1% sur une base comparable.

Sur le seul quatrième trimestre, l'Ebitdaal recule de 3,2% à 3,18 milliards d'euros, alors que les analystes attendaient 3,2 milliards selon un consensus fourni par le groupe.

Pour 2021, l'Ebitdaal est attendu stable ou légèrement négatif, a indiqué Orange jeudi.

A la Bourse de Paris, l'action Orange reculait de 2,96% à 9,752 euros à 13h28, une des plus fortes baisses du CAC 40, en repli de 0,15% au même moment.

"Globalement, Orange a fait état d'une publication pour le T4 décevante", ont relevé les analystes de Credit Suisse. Ceux de JPMorgan ont aussi jugé la prévision d'Ebitdaal pour 2021 trop faible.

Le titre était aussi pénalisé par des commentaires du directeur financier, Ramon Fernandez, sur l'Espagne où le groupe ne s'attend pas à ce que le bénéfice opérationnel renoue avec des tendances positives avant 2022.

DISCUSSIONS SUR LA GOUVERNANCE

A l'occasion des annonces sur les résultats et TOTEM, le PDG Stéphane Richard a aussi ouvert la question d'une séparation des fonctions de président et de directeur général - un sujet qui anime de plus en plus de sociétés du CAC 40.

Une discussion sur ce sujet aura lieu avant 2022, a-t-il dit, alors que son troisième mandat de quatre ans prendra fin en mai 2022.

Jeudi, le PDG de Bouygues, Martin Bouygues, a annoncé quitter la direction générale du groupe dont il conservera la présidence.

Danone, qui doit publier ses résultats annuels vendredi, est pour sa part sous la pression de plusieurs actionnaires qui ont demandé a minima la séparation des fonctions de président et de directeur général occupées par Emmanuel Faber.

(Mathieu Rosemain et Blandine Hénault, édité par Jean-Michel Bélot et Jean-Stéphane Brosse)

par Mathieu Rosemain