Créé en 1864, Clasquin est un commissionnaire de transport, architecte et maître d’œuvre de la chaîne de transport à l’échelle internationale. Le groupe lyonnais accompagne ses clients dans le monde entier et plus particulièrement de et vers l’Asie Pacifique, l’Amérique du Nord, le Maghreb et l'Afrique subsaharienne. Chacun peut imaginer l’importance du service rendu dans le contexte actuel de dérèglement des chaînes de production et d’approvisionnement. Avec ses 64 bureaux son millier de collaborateurs dans le monde, Clasquin, seule ETI multinationale française du secteur, a su tirer partie de ce contexte inédit pour accroitre encore davantage qu’à l’accoutumée ses parts de marché. Philippe Lons, présent dans le Groupe depuis 1986, nous explique comment. 

Philippe Lons, la désorganisation de la chaîne de production et d’approvisionnement mondiale se prolonge …

" Jamais nous n’avions connu une telle période. Cela fait maintenant près de deux ans et demi que nous composons avec ces échanges mondiaux désorganisés. Très implantés en Chine, nous l’avons fortement ressenti dès janvier 2020 où cela s’est d’abord manifesté par une crise de la demande liée aux confinements généralisés en Europe à laquelle a succédé une crise de l’offre liée au fait que 70% du fret aérien mondial passait traditionnellement par des vols passagers, cloués au sol. Progressivement, cette crise de l’offre s’est étendue au transport maritime qui est encore loin d’être terminée puisqu’aujourd’hui 500 porte-conteneurs restent bloqués à l’entrée des ports chinois. Plus récemment, c’est la guerre russo-ukrainienne et la politique chinoise du zéro-Covid qui sont venues aggraver la situation à la fois dans le transport maritime et le transport aérien mais également dans le rail en provenance de Chine (quasi à l’arrêt depuis le début du conflit), de sorte que la désorganisation des chaines logistiques mondiales est à son comble à l’heure où je vous parle…"

2021, l’année de tous les records pour Clasquin (source : société)  

Vos résultats sont néanmoins excellents. Comment Clasquin et son positionnement original ont-ils permis de faire la différence dans ce contexte chaotique ?

" Face à la concurrence, qui provient d’une part des très grandes multinationales de la commission de transport, et d’autre part de PME locales, nous offrons les services et les prestations d’une multinationale alliés aux avantages d’une ETI : fiabilité, réactivité, personnalisation des contacts clients, créativité, innovation… Ces forces nous ont permis de croitre historiquement deux fois plus vite que le marché. L’agilité que nous avons déployé depuis deux ans nous a même permis de croitre quatre fois plus vite que le marché. Il a en effet fallu trouver des solutions au jour le jour. Nous avons par exemple organisé des vols charter pour transporter des marchandises entre l’Asie et l’Europe, allant jusqu’à louer lors du pic de la pandémie en mai 2020 le plus gros avion-cargo du monde, l’Antonov 225. Avant la guerre russo-ukrainienne, nous avions énormément développé le rail, une solution alternative à l’avion et au bateau. Pour répondre à la pénurie de conteneurs, nous avons également lancé un programme d’achat de 400 conteneurs dont 170 ont été livrés à ce jour. Enfin, nous avons accéléré le développement de notre plateforme digitale « Live by Clasquin». Cet outil maison, très différenciant, nous permet par exemple de prévoir très précisément les dates d’arrivée des bateaux, sachant que 65% d’entre eux arrivent avec un retard de plusieurs jours. 
Cette capacité d’adaptation de notre offre combinée aux besoins impérieux de nos clients nous permettent d’enregistrer d’excellents niveaux de résultats depuis quelques trimestres. Mais notre visibilité reste faible et l’inflation actuelle laisse peser des risques sur l’évolution des volumes d’échange dans les prochains mois. "

Est-ce à dire que vos résultats pourraient rapidement revenir à leurs niveaux d’avant crise, ce que vos multiples de valorisation semblent traduire ? 

" Je ne pense pas. Notre offre de services enrichie pendant cette crise sera pour l’essentiel préservée et nos parts de marché devraient continuer de progresser. Alors certes, les volumes sont incertains à court terme, mais notre niveau de marge  opérationnelle (ROC/Marge brute), dans un environnement redevenu plus normatif devrait s’établir de manière durable à un niveau sensiblement plus élevé que par le passé (12,5% en 2020). "

Quelle sera votre politique d’acquisition dans ce contexte ?

" Nous comptons poursuivre notre stratégie historique en matière de croissance externe. Chaque année, nous réalisons deux à trois acquisitions de taille modeste afin de densifier notre maillage et d’ajouter des expertises. Bien que nos moyens financiers soient aujourd’hui renforcés, nous ne ferons pas d’entorse à notre politique de valorisation des cibles sur la base de multiples des résultats des 3 dernières années réalisés par la cible, en privilégiant les sociétés dont la direction souhaite rester en place et s’appuyer sur notre Groupe pour accélérer son développement. Nous regardons en particulier du côté de l’Afrique du Nord et de l’Afrique francophone mais nous nous intéressons aussi à la France et à certains pays limitrophes. "

Répartition 2021 des échanges (carte de gauche) et des clients Clasquin (carte de droite) - source : société