On se rapproche assez de la valeur de fond de portefeuille, de celles qui ne présentent pas grand risque sur le long terme. Qui ne font pas forcément vibrer non plus les amateurs de sensations fortes, il faut bien l'avouer. Mais à moins de 15 fois les bénéfices attendus l'année prochaine, le dossier n'a jamais été aussi abordable depuis 2016.

L'activité est en croissance modeste mais constante (3 à 4% de hausse annuelle en vue sur les années à venir), grâce principalement à la pente douce qu'affiche le marché des vins et spiritueux. Le bouchage permet par ricochet de bénéficier de la tendance de fond de la montée en gamme des alcools, expression à laquelle les publicitaires préfèrent substituer l'affreux "premiumisation". Côté résultats, les marges sont solides, avec une tendance à l'amélioration au fil du temps. Le bénéfice net devrait passer de 75 M€ en 2021 à 104 M€ en 2024, selon la projection des analystes, soit une progression annuelle moyenne de 8,5%. Le bilan est sain : malgré une dette en hausse après l'acquisition de l'italien SACI au début de l'année, les ratios de couverture sont tout à fait confortables.

La récolte
La récolte du liège (© Corticeira Amorim)

Un matériau multifacettes

Corticeira Amorim est implanté sur cinq continents, avec un ancrage marqué en Europe, où il réalise 70% de son activité. Les Amériques (24%) et le Reste du Monde (6%) complètent le tableau. Petite curiosité qui n'est pas sans intérêt : l'entreprise dispose d'une base d'acheteurs si large qu'aucun de ses clients ne représente plus de 1% de ses revenus. Le Portugais réalise 70% de ses ventes dans les bouchons, mais le liège est aussi au cœur de ses autres divisions. En l'occurrence les revêtements de sols et murs (14% du chiffre d'affaires), les composites (13,6%), l'isolation (1,5%) et le matériau brut (1,2%). Si l'isolation ou les parquets liège ne suscitent guère d'interrogations, la division Composites mérite que l'on s'y attarde un peu. Il s'agit de la branche la plus singulière et la plus technique du groupe. Saviez-vous qu'on utilise du liège dans le nez du lanceur spatial Vega ou pour l'étanchéité des pièces complexes ? Amorim Cork Composites avait été créée à l'origine pour tirer parti des 70% de déchets de liège que génèrent les autres activités du groupe. "Rien ne se perd, tout se transforme", pour détourner la citation apocryphe de Lavoisier.

Les usages du liège (© Corticeira Amorim)
L'usage du liège le plus connu (© Corticeira Amorim)

Cette réutilisation et plus généralement l'exploitation d'une ressource renouvelable, valent aujourd'hui à la société de figurer dans notre thématique Climat & Transition. Corticeira Amorim appuie d'ailleurs largement dans ses présentations sur cet atout. C'est dans l'air du temps, mais c'est aussi et surtout parce que l'entreprise se doit d'être particulièrement vigilante avec la base de son activité, le chêne. Il faut en moyenne 25 ans pour qu'un chêne-liège devienne commercialement exploitable. La récolte ne peut avoir lieu que tous les 9 ans. Et c'est après la troisième récolte, donc 43 ans après la plantation en moyenne, que l'écorce atteint la maturité nécessaire à son utilisation en bouchage. Au cours de sa vie, l'écorce de l'arbre sera récoltée 15 à 18 fois. Le Portugal abrite à lui seul un tiers de la superficie mondiale de chêne-liège. L'entreprise a mené un gros travail foncier pour sécuriser et exploiter plusieurs milliers d'hectares sur la base de standards de qualité, de suivi et de pérennité élevés. Il ne s'agit pas de pure philanthropie bien sûr, mais les nécessités écologiques et économiques sont ici convergentes et l'on ne s'en plaindra pas.