PARIS (Reuters) - Le climat redevient favorable aux obligations américaines avec le ralentissement de la croissance économique mondiale et la perspective d'une Réserve fédérale (Fed) un peu moins restrictive, dit-on chez Pictet AM, qui reste prudent sur les actions en raison des risques de révisions à la baisse des profits d'entreprises.

"Si on pense que la croissance mondiale va ralentir et qu'on aura une Fed un peu moins sévère (...) on se dit que c'est le bon moment pour revenir sur les obligations américaines", a déclaré lors d'une conférence Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d'investissement chez Pictet AM.

La Fed, qui a opéré jusqu'à présent 66% de son resserrement monétaire selon Pictet, devrait ralentir le rythme de ses hausses de taux.

Les signes de craquement du système financier, notamment avec les déboires de la banque Credit Suisse ou encore la tourmente déclenchée par la présentation fin septembre du projet de budget britannique, ont amené les marchés à revoir leurs anticipations sur les taux des grandes banques centrales, qui ne sont peut-être pas prêtes à risquer un choc systémique au nom de la lutte contre l'inflation, a déclaré Frédéric Rollin.

Cette situation coïncide en plus avec le ralentissement de l'inflation américaine.

Les chiffres meilleurs qu'attendu en octobre sont le résultat d'une baisse des prix des matières premières et d'un rééquilibrage entre l'offre et la demande grâce à la reprise des chaînes de production et de logistique, a déclaré Frédéric Rollin.

Ces éléments plaident pour une augmentation moins rapide des taux de la Fed, qui restera cependant prudente devant les données solides sur l'emploi, la hausse des salaires et la lenteur du ralentissement de l'inflation, a-t-il ajouté

"La Fed n'est pas notre amie, pas encore", a souligné Frédéric Rollin. "Elle devrait opérer pour l'équivalent de 7,5% de hausses de taux sur 2022-2023, à comparer avec +6% en cinq ans (sur 2014-2019)".

DES RÉVISIONS À LA BAISSE DE BÉNÉFICES ATTENDUES

Selon l'expert, l'économie américaine devrait quasiment stagner l'an prochain sous l'effet de la remontée des taux - et de son impact notamment sur le marché immobilier et l'investissement des entreprises - de l'inflation, qui pèse sur le revenu disponible des ménages, et du resserrement des conditions du crédit bancaire.

Le produit intérieur brut sera malgré tout très légèrement positif grâce à la relative bonne tenue de la consommation, tirée par l'épargne accumulée par les Américains pendant la pandémie de COVID-19, a-t-il dit.

Le ralentissement économique devrait s'accompagner de révisions à la baisse des bénéfices des entreprises du S&P-500 dans les mois à venir, anticipe Pictet AM.

Jusqu'à présent, les profits ont bien tenu, les entreprises ayant pu augmenter leurs prix grâce au solide rebond économique post-confinement. Mais ce pouvoir sur les prix va faiblir à cause d'une baisse attendue de la demande, a déclaré Frédéric Rollin.

Lors de la dernière saison des résultats, plus de 50% des entreprises du S&P-500 ont dépassé les attentes du marché en matière de profit par action mais la tendance est à la baisse depuis le début d'année "et ça va avec l'ISM des nouvelles commandes qui ne cessent de se dégrader", a ajouté le stratège.

Pictet reste à l'achat sur les valeurs de croissance, en particulier celles de la santé, très peu cycliques, et des énergies propres.

(Laetitia Volga, édité par)