Paris (awp/afp) - L'un arrive, l'autre part: la transition est en cours à la tête de Danone, où l'ex-PDG Emmanuel Faber se fend d'une lettre pour dire au revoir aux salariés, et le nouveau président Gilles Schnepp s'emploie à les rassurer, en même temps que les actionnaires.

Dimanche soir, le conseil d'administration du géant alimentaire français a voté pour évincer Emmanuel Faber avec effet immédiat. M. Schnepp a été nommé président, tandis que le groupe s'est mis en quête d'un nouveau directeur général, épilogue d'une crise au sommet alimentée par des fonds d'investissement hostiles à M. Faber, qu'ils tiennent pour responsable de performances commerciales et financières jugées insuffisantes.

Dans un message vidéo publié en interne, le nouveau président s'est voulu rassurant pour les salariés en s'inscrivant dans les pas de son prédécesseur, selon des informations du Figaro et du Monde.

"C'est une période de transition qui suscite beaucoup d'interrogations parmi les salariés sur l'avenir de Danone et le cap qui sera fixé", commente auprès de l'AFP Laurent Pouillen, coordonnateur Force ouvrière au sein du groupe.

Lui a besoin d'entendre le nouveau président "en direct". "Il faut qu'il nous explique clairement ce qu'il veut faire", ajoute-t-il.

Une rencontre entre M. Schnepp et les représentants du personnel est prévue lundi, selon des sources syndicales.

En parallèle, M. Schnepp a écrit aux actionnaires : "Ma priorité en tant que président est de mener la transition de l'entreprise vers un système de gouvernance renouvelé, renforcé, pour contribuer à accélérer la création de valeur pour vous, nos actionnaires, et toutes nos parties prenantes", écrit-il dans une lettre en anglais consultée jeudi par l'AFP.

Il indique que le conseil d'administration soutient toujours le projet de réorganisation Local First imaginé par Emmanuel Faber, qui prévoit un profond remaniement de l'organigramme et jusqu'à 2.000 suppressions de postes (sur les 100.000 que compte Danone dans le monde) dans l'encadrement.

Les fonds hostiles à M. Faber voulaient que ce plan soit suspendu le temps que le prochain directeur général du groupe soit trouvé.

Ce projet "rendra Danone plus fort, va nous permettre d'accélérer la croissance et la création de valeur et de mieux satisfaire les besoins des consommateurs dans tous les pays où nous opérons", estime M. Schnepp.

"Cela permettra aussi de débloquer d'importantes ressources qui seront réinvesties dans nos marques et projets commerciaux", ajoute-t-il.

Ce projet porte uniquement sur des questions d'organisation, tient-il à préciser. Le prochain directeur général aura "toute latitude pour élaborer et mettre en oeuvre sa stratégie pour l'entreprise, y compris, sans que la liste soit exhaustive, en termes d'allocation de capital, de décisions d'investissement et de changements dans le portefeuille".

"C'est triste, mais c'est comme ça"

Dans un tout autre registre, Emmanuel Faber s'est aussi adressé aux salariés. Son départ ? "C'est triste, mais c'est comme ça", dit-il dans une lettre de deux pages.

Il affirme que le conseil d'administration était soumis à une "pression inadmissible" des fonds d'investissement et qu'il ne voulait pas "sauver les apparences" en renonçant de lui-même à ses fonctions dimanche soir, préférant que chaque administrateur "prenne ses responsabilités".

La tonalité de la lettre prend ensuite une tonalité plus chaleureuse : "Pendant 24 années de ma vie, j'ai grandi et appris au milieu de vous. (...) Vous m'avez fait grandir parmi vous, comme homme et comme dirigeant."

"Cette entreprise est extraordinaire. Pour beaucoup d'entre nous elle est comme une famille. Prenez-en soin", écrit-il.

"Vous êtes des pionniers", dit-il plus loin, en référence au statut d'entreprise à mission récemment adopté par Danone, qui lui enjoint de poursuivre des objectifs extra-financiers, notamment en matière de préservation de l'environnement.

"C'est la seule route possible pour l'économie de marché car un jour la justice sociale et climatique s'imposera d'elle-même au capitalisme et à sa gouvernance du passé", estime-t-il, non sans rappeler qu'il avait renoncé en 2019 "à tous les privilèges de patron que j'estime d'un autre âge, mes indemnités de départ, ma retraite chapeau".

afp/rp