Se décrivant comme un "pion" dans la crise déclenchée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le plus grand importateur de gaz russe en Allemagne a reçu le mois dernier un renflouement du gouvernement de 15 milliards d'euros pour pouvoir se permettre d'acheter ailleurs.

La Russie a invoqué des problèmes de turbine pour justifier la coupure de l'approvisionnement en gaz via la ligne principale vers l'Allemagne, Nord Stream 1, tandis que d'autres canaux d'exportation sont également inutilisés, ou à capacité réduite.

Mercredi, Uniper a annoncé une perte de 12,3 milliards d'euros (12,5 milliards de dollars) qui, selon elle, est due aux réductions des exportations russes.

Voici comment Uniper s'est retrouvée dans une situation aussi désastreuse.

AOUT

L'Allemagne fixe une taxe sur le gaz qui permet à Uniper et à ses rivaux de répercuter 90 % des coûts liés aux achats de gaz pour compenser la baisse des approvisionnements en gaz russe aux clients à partir du 1er octobre, dans le but de sauver ses importateurs de la faillite.

JUILLET

Le gouvernement allemand accepte un plan de sauvetage d'Uniper de 15 milliards d'euros. Il prendra une participation de 30 % et fera plus que quadrupler une ligne de crédit auprès du créancier public KfW pour la porter à 9 milliards d'euros.

L'Allemagne s'était auparavant engagée à lever des fonds via une taxe sur le gaz pour financer le sauvetage des importateurs et maintenir sa distribution de gaz.

Gazprom réduit les flux de gaz sur le gazoduc Nord Stream 1 (NS1) à un cinquième de sa capacité.

JUIN

La Russie réduit ses exportations de gaz après l'imposition de sanctions par l'Occident en réponse à l'invasion de l'Ukraine, en invoquant le retard du retour des équipements entretenus sur le principal tracé du NS 1. Les flux du NS 1 tombent à 40 % de leur capacité.

Uniper retire ses perspectives pour 2022 et demande un renflouement.

MAI

Uniper met en œuvre la demande de Moscou de payer le gaz en roubles, ce qui, selon la Commission européenne, pourrait enfreindre les sanctions.

AVRIL

Uniper est frappé par une perte nette de 3 milliards d'euros au premier trimestre, des dépréciations liées à l'unité de production russe.

MARS

Uniper tente d'apaiser les inquiétudes des investisseurs en annonçant son retrait de Russie et la vente de sa participation de 83,7 % dans Unipro.

FÉVRIER

Uniper annonce qu'elle proposera une réduction de 95 % de son dividende pour 2021.

La liaison par gazoduc Nord Stream 2, dans laquelle elle était co-financière, est abandonnée dans le contexte de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, laissant une dépréciation de 1 milliard d'euros. Il aurait doublé la capacité du NS 1, soit 55 milliards de mètres cubes par an.

Le 24 février, la Russie envahit l'Ukraine, qualifiant cette invasion d'"opération militaire spéciale" pour désarmer son voisin.

JANVIER

Uniper obtient des facilités de crédit d'une valeur de 10 milliards d'euros auprès de son principal actionnaire Fortum et de la banque d'État allemande KfW, ainsi que 1,8 milliard d'euros de prêts bancaires, dans un geste de précaution pour faire face aux prix élevés et à la volatilité.

2021

Les marchés mondiaux du gaz se resserrent dans le cadre d'une reprise post-COVID et la Russie commence à envoyer moins de gaz vers l'ouest, soulignant le démarrage imminent de Nord Stream 2, qui, selon elle, augmentera l'offre.

Uniper, qui ressentait le stress d'un passage à la décarbonisation qui a forcé la fermeture de centrales à charbon, a maintenu tout au long que la Russie était un expéditeur fiable.

LEGACY

Uniper représente l'activité héritée de Ruhrgas qu'E.ON a rachetée en 2003 et entièrement absorbée en 2013.

L'achat, qui a cimenté les liens commerciaux et de prospection d'hydrocarbures entre l'Allemagne et la Russie, a suscité l'opposition de l'office des cartels et de certains qui y voyaient une complaisance envers les intérêts commerciaux pro-Moscou.

E.ON s'est séparé de la majorité d'Uniper en 2016 et a ensuite accepté de vendre sa participation restante à Fortum, qui en détient désormais 78 %.