TRIPOLI, 28 janvier (Reuters) - La Première ministre italienne Giorgia Meloni s'est rendue samedi en Libye pour conclure un accord gazier de 8 milliards de dollars (7,4 milliards d'euros environ) visant à accroître l'approvisionnement énergétique de l'Europe, malgré l'insécurité et le chaos politique qui règnent dans le pays d'Afrique du Nord.

Giorgia Meloni a rencontré à Tripoli le Premier ministre Abdulhamid al-Dbeibah, chef du gouvernement d'unité nationale (GUN) reconnu par la communauté internationale, avant la signature d'un accord sur l'énergie pour des pourparlers qui portent également sur la migration à travers la Méditerranée.

Au cours de la signature de l'accord, le chef de la National Oil Corp (NOC) libyenne, Farhat Bengdara, et le dirigeant de l'italien Eni, Claudio Descalzi, ont déclaré qu'ils investiraient 8 milliards de dollars dans le développement du gaz, ainsi que dans l'énergie solaire et la capture du carbone.

Depuis un an, les pays européens cherchent à remplacer le gaz russe par des approvisionnements énergétiques en provenance d'Afrique du Nord et d'ailleurs en raison de la guerre en Ukraine.

L'Italie a déjà pris l'initiative de s'approvisionner en gaz en Algérie en établissant un nouveau partenariat stratégique qui prévoit des investissements pour aider la société publique d'énergie Sonatrach à inverser des années de baisse de production.

Farhat Bengdara a déclaré que l'accord gazier de 25 ans conduirait à une production pouvant atteindre 800 millions de pieds cubes (22,7 millions de m3) par jour, le qualifiant de nouvel investissement le plus important dans le secteur énergétique libyen depuis un quart de siècle.

L'accord conclu à Tripoli risque toutefois d'être compromis par le conflit interne à la Libye, qui divise le pays entre des factions rivales se disputant le contrôle du gouvernement.

Soulignant ces divisions, le ministre du pétrole d'Abdulhamid al-Dbeibah lui-même, Mohamed Oun, a rejeté tout accord que la NOC pourrait conclure avec l'Italie, déclarant dans une vidéo sur le site Web du ministère que de tels accords devraient être conclus par le ministère.

LA MIGRATION ILLÉGALE AUSSI EN DISCUSSION

Le dirigeant de la NOC, Farhat Bengdara, a été nommé l'année dernière par Abdulhamid al-Dbeibah, dont le gouvernement provisoire a été mis en place en 2021 dans le cadre d'un processus soutenu par les Nations unies.

Le Parlement basé à l'est et les factions qui le soutiennent ont déclaré début 2022 que le gouvernement n'était plus légitime, rejetant à la fois la nomination de Farhat Bengdara et les accords que Tripoli a conclus avec des États étrangers.

Le chaos qui règne en Libye depuis le soulèvement de 2011 soutenu par l'Otan qui a chassé Mouammar Kadhafi a laissé une grande partie du pays aux mains de factions armées. Une petite mission militaire italienne est déployée en Libye depuis plusieurs années.

Giorgia Meloni et Abdulhamid al-Dbeibah ont déclaré avoir également discuté de la question de la migration illégale de la Libye vers l'Italie. Rome soutiendra Tripoli en fournissant de nouveaux navires de recherche et de sauvetage, a déclaré le Premier ministre libyen.

L'insécurité et l'anarchie ont fait de la Libye une route majeure, mais dangereuse, pour les migrants cherchant à rejoindre l'Europe, souvent via l'île italienne de Lampedusa. Des centaines de migrants meurent chaque année en tentant de faire le voyage. (Reportage Ayman al-Warfali en Libye et Gavin Jones à Rome, reportage supplémentaire d'Ahmed Tolba et Enas Alashray au Caire, version française Benjamin Mallet)