San Francisco (awp/afp) - La colère gronde depuis des années contre les monopoles des géants de la tech. Elle est montée plus vite en Europe, où elle s'est traduite par des lois et des amendes, mais en 2019 elle a gagné les Etats-Unis, du gouvernement au Congrès.

Mardi, le ministère américain de la Justice a engagé des poursuites contre Google pour atteinte au droit de la concurrence.

Revue des principales procédures en cours contre les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), qui valent, ensemble, plus de 7.000 milliards de dollars en Bourse, contre un peu plus de 2.000 milliards il y a cinq ans.

Autorité fédérale de la concurrence

L'agence en charge de la protection des consommateurs, la Federal Trade Commission (FTC), partage avec le ministère de la Justice le rôle d'autorité de la concurrence.

Début 2013, après deux ans d'enquête, elle décidait que Google n'enfreignait pas les lois sur la concurrence. Depuis, le moteur de recherche est devenu un synonyme d'internet.

La FTC mène l'enquête depuis des mois pour déterminer si les GAFAM abusent de leur position dominante pour écraser la compétition. En février, elle a sommé les cinq géants américains de fournir des informations et documents relatifs à leurs acquisitions depuis 2010, comme Instagram et WhatsApp par Facebook.

Son président, Joseph Simmons, est allé jusqu'à envisager de "dénoncer" des accords passés.

D'après le Wall Street Journal, la FTC pourrait interdire à Facebook de renforcer l'interopérabilité entre ses différentes plateformes (quatre réseaux et messageries fréquentés tous les mois par environ 3 milliards de personnes).

L'été dernier elle a infligé au groupe californien une amende record de 5 milliards de dollars pour ne pas avoir su protéger les données personnelles de ses utilisateurs, suivie d'une amende de 170 millions à YouTube (Google), pour non-respect de la vie privée des enfants.

Ministère de la Justice

Washington s'est lancé en 2019 dans une vaste enquête sur la toute-puissance des GAFA.

Le 20 octobre 2020, le ministère, allié à 11 Etats, a lancé des poursuites contre Google pour abus de position dominante, la plus importante action judiciaire depuis près de 20 ans contre l'un des piliers technologiques américains.

Ils accusent notamment Google de forcer les consommateurs et les annonceurs à utiliser son moteur de recherche sur des appareils mobiles utilisant le système d'exploitation Android, ce qui restreint considérablement la concurrence.

La loi américaine, telle qu'appliquée ces dernières années, exige, pour autoriser des mesures contre les entreprises, que leurs agissements fassent clairement du tort aux consommateurs, en conduisant à une hausse des prix par exemple.

II y a 20 ans le ministère avait failli réussir à démanteler Microsoft pour abus de position dominante.

Congrès

La commission judiciaire de la Chambre des Représentants a annoncé en 2019 une enquête bipartite sur la concurrence dans les marchés numériques.

Elle a auditionné des dirigeants d'entreprises s'estimant lésés par les GAFA, comme le patron du fabricant d'enceintes Sonos, qui poursuit Google pour violations de brevets.

Fin juillet 2020, elle a interrogé et sermonné en direct, pendant des heures, les quatre patrons, Sundar Pichai (Alphabet, maison mère de Google), Tim Cook (Apple), Mark Zuckerberg (Facebook) et Jeff Bezos (Amazon).

Les élus ont tenté de prouver que ces groupes utilisent des montagnes de données personnelles à leur disposition et des acquisitions de concurrents pour empêcher, illégalement, tout compétiteur d'émerger, au détriment des consommateurs, de l'innovation et de la démocratie.

"Ces géants qui étaient autrefois des petites start-up, remettant en question le statu quo, sont devenus le genre de monopoles que nous n'avions pas vus depuis l'ère des barons du pétrole et des magnats des chemins de fer", ont déclaré des parlementaires démocrates de cette commission dans un rapport de 450 pages publié début octobre.

Ils appellent à davantage de régulation et surtout à des reventes de filiales, comme Instagram pour Facebook ou YouTube pour Google.

Etats

Deux grandes enquêtes étatiques réunissant une multitude de procureurs généraux des deux bords politiques ont été lancées en 2019.

La première, menée par le procureur général du Texas, s'intéresse aux pratiques publicitaires de Google et regroupe 50 procureurs.

La seconde, débutée à l'initiative de la procureure générale de l'Etat de New York, porte sur la gestion des données personnelles de Facebook et ses possibles violations des lois antitrust.

Selon le site Politico, la Californie, qui ne fait pas partie de l'enquête sur Google, aurait ouvert sa propre investigation sur le numéro un des moteurs de recherche.

La Californie et l'Etat de Washington (nord-ouest), où se situent les sièges sociaux des GAFA, enquêtent également sur le traitement des vendeurs tiers par Amazon, d'après le New York Times.

Alors que les Etats-Unis n'ont toujours pas adopté de loi fédérale sur les données, la Californie garantit depuis cette année à ses habitants certains droits sur leur collecte et utilisation.

afp/rp