Après avoir multiplié par 2,5 ses ventes sur 2016-20, le N°2 européen de la plaisance, présent sur le segment du catamaran à travers Fountaine Pajot et sur le monocoque à travers Dufour Yacht, a dévoilé son plan Odysséa 2024. Nicolas Gardies, directeur général de l’entreprise familiale, nous présente la stratégie du Groupe dans un environnement incertain. 

Nicolas Gardies, le dernier plan Sail & Power 2020 vous a permis de multiplier le chiffre d’affaires par 2,5 contre un multiple de 4,3 pour le nombre de bateaux produits. Est-ce uniquement lié à l’effet mix suite au rapprochement avec Dufour Yacht ?

"C’est purement lié à un effet mix. La fourchette de prix des monocoques de Dufour s’étend de 80 à 900 K€, contre 250 K€ à 2,3 M€ pour les catamarans de Fountaine Pajot ".

Source : présentation investisseurs du 12 janvier 2021

 

Les effectifs ont également été multiplié par près de 4 en 4 ans…

"Nous sommes une industrie de main d’œuvre, en particulier chez Dufour où davantage de métiers sont intégrés. Notre nouveau plan moyen terme prévoit d’intégrer davantage notre chaîne de valeur, notamment en matière de menuiserie, ainsi que les mousses et les tissus. Cela permet de mieux sécuriser les approvisionnements, de produire quasiment à la demande des lignes de montage et ainsi de réduire le niveau de stocks. Nous sommes aujourd’hui un peu plus de 600 personnes en CDI chez Fountaine Pajot, et un peu moins de 400 chez Dufour, avec une reprise du recours à l’intérim depuis le début de l’année afin d’accompagner le redémarrage d’activité. "

Source : présentation investisseurs du 12 janvier 2021

Peut-on attendre une croissance annuelle à deux chiffres sur les 4 années à venir malgré votre positionnement sur le monocoque, segment moins dynamique historiquement ?

"Odysséa 2024 est clairement un plan de croissance. Nous avons atteint ce type de croissance dans le passé et avons l’ambition de renouer avec une forte dynamique, sans pouvoir vous annoncer des objectifs précis. La crise sanitaire nous invite à la vigilance. Je peux juste vous dire que sauf aggravation de la crise sanitaire, pour l’exercice en cours, nous espérons pouvoir dépasser légèrement le taux de croissance du carnet de commandes à fin décembre de 177,3 M€, en hausse de 5% sur un an. Cette croissance est tirée d’une part, par un regain d’intérêt pour les monocoques, plus accessibles à la clientèle de particuliers et d’autre part, au travers une nouvelle clientèle, plus jeune, qui s’intéresse de plus en plus à la navigation avec la crise sanitaire. Les lancements de nouveaux modèles Dufour, plus habitables et plus spacieux qu’il y a 5 ans, y est également pour quelque chose."

La location de bateaux était en plein boom avant la crise sanitaire. A quel horizon la voyez-vous redémarrer ?

"Les compagnies de charter, que ce soit Dream Yacht Charter ou d’autres, ont été très impactées par la fermeture des frontières. Elles s’emploient actuellement à améliorer leur équilibre financier et bilantiel, ce qui affecte nos ventes sans fragiliser nos créances clients. Le potentiel de ce marché reste intact et sa reprise dépendra de la réouverture des frontières. Difficile de dire si la reprise se matérialisera au printemps ou à l’automne, voire début 2022. Heureusement, en attendant, la clientèle de particuliers qui représente aujourd’hui 80% de notre carnet de commandes, contre 70% historiquement, est dynamique et les salons virtuels que nous avons organisés ont plutôt bien fonctionné cet hiver."

Votre participation minoritaire dans Dream Yacht Charter a-t-elle vocation à évoluer ?

"Je ne pense pas, ni dans un sens ni dans l’autre. La situation actuelle nous convient : elle nous donne un poste d’observation privilégié sur la clientèle, ses usages, l’entretien des équipements, etc. Nous ne sommes pas dépendants de DYC et ils ne sont pas dépendants de nous. "

Source : présentation investisseurs du 12 janvier 2021

Combien de temps vous faudra-t-il pour retrouver voire dépasser la rentabilité d’avant crise ?

"Nous maitrisons la remontée en charge de nos usines, cela dépendra donc essentiellement de notre carnet de commandes et donc de notre niveau de production. A noter que les fortes variations des devises, je pense notamment au dollar, n’ont qu’un faible impact sur nos marges, les effets positifs sur nos achats étant compensés par l’évolution des prix de vente. Le sujet des droits de douane sera également à surveiller, bien que rien de significatif n’ai été porté à notre connaissance à ce jour. "

Principaux axes du plan Odysséa 2024 - Source : présentation investisseurs du 12 janvier 2021

L'amélioration de la performance économique "met au centre" la rémunération des équipes. Comment comptez-vous partager les fruits du succès du plan ?

"L’intéressement de nos collaborateurs à la performance économique a toujours été clé dans le Groupe. Les 3 mois d’intéressement versés participent de la fidélisation et de la sensibilisation aux résultats de l’entreprise. Cela n’a rien de contradictoire avec la rémunération actionnariale, au contraire. Un dividende de 1,31€ par action sera d’ailleurs mis au vote à l’Assemblée Générale qui se tiendra le mois prochain. "

De quelle mesure récente favorable à l’environnement le Groupe peut-il être fier ?

"Nous avons mis en place dans notre nouvelle usine numérique proche d’Aigrefeuille une chaine de vernis à base aqueuse, c’est-à-dire une solution acrylique en remplacement d’une solution glycéro. Cela contribue à la fois à la protection de l’environnement et à la santé de nos collaborateurs. Nous avons vocation à déployer ces produits petit à petit sur toutes nos lignes de production. Plus ambitieux encore, nous travaillons à la conception de bateaux à motorisation hybride avec notre partenaire Volvo Penta. Notre objectif ultime est de livrer des bateaux passifs en énergie et en carbone, ce qui devra faire appel à l’énergie solaire et éolienne à bord. "

L'Auteur de l'interview est actionnaire de la société à titre personnel.