Le N°1 européen de la volaille (Le Gaulois, Maître Coq, Loué…), également bien placé sur le traiteur avec les marques Marie ou Traditions d’Asie, vient de publier des résultats annuels records, au-delà des attentes. De quoi redonner aux investisseurs de l’appétit pour le titre après une fin d’exercice mouvementée, quand bien même les vents contraires soufflent un peu plus fort en ce début d’année. Il faut dire que le groupe a surpris favorablement en partageant sa feuille de route et ses objectifs ambitieux à horizon 2026. Une bonne occasion de faire le point avec celui qui prend la barre après une longue expérience dans le Groupe à la direction de différentes filiales.

 

Evolution CA LDC

LDC : une ETI familiale de croissance (source : présentation des résultats 2021/2022)

 

Philippe Gélin, Denis Lambert vous transmet les rennes d’un Groupe « plus fort que jamais ». Les défis que vous rencontrez actuellement ne gâchent-ils pas la fête ?

"Nous avons une vision très longue chez LDC, au-delà de l’exercice en cours. Il est vrai que nos conditions d’activité actuelles sont particulièrement difficiles, mais la résilience que nous avons démontré sur l’exercice 2021/2022 dans un contexte de sortie de Covid et de hausse des matières premières est encourageante quant à notre capacité à faire face aux pressions inflationnistes et à la grippe aviaire. Sur ce dernier point, nos partenaires éleveurs du Sud-Ouest et du bassin vendéen ont été durement frappés, mais la sortie de crise est aujourd’hui en vue grâce aux mesures sanitaires fortes et le plan d’entraide entre bassins de production du Groupe devrait finalement limiter à -12/-15% la baisse des volumes disponibles sur le premier semestre.

Sur le terrain des hausses des matières premières et des charges, nous répercutons progressivement l’ensemble des hausses, que ce soit dans la volaille où 25% de hausses ont été obtenues sur les 16 derniers mois (dont 10% environ depuis mars 2022). D’ici à juillet 2022, des revalorisations complémentaires de l’ordre de 10% sont attendues. Dans le traiteur, les hausses de prix sont violentes depuis février et les répercutions moins habituelles. Des négociations ont été engagées avec 4% de hausses déjà obtenues mais il reste là 16% à faire passer dont 7% en juin et 9% pour la rentrée de septembre. "

Dans ces conditions, comment envisagez-vous les résultats de l’exercice 2022/2023 ?

"Sur ces deux pôles Volaille et Traiteur France, le niveau de résultat sera conditionné par l’issue de ces négociations et l’évolution des conditions de marché. Nous aurons une meilleure visibilité une fois le mois de juin passé. Sur le pôle International, les perspectives sont plus favorables avec déjà une bonne visibilité sur les performances à venir et des résultats attendus en progression. Le Groupe pourra se prononcer sur des objectifs de résultats annuels à l’occasion de la publication des prochains résultats semestriels en novembre."

 

Prix moyen au kilo viandes LDC

La volaille reste la viande la plus compétitive (source : présentation des résultats 2021/2022)

 

Le contexte inflationniste et de grippe aviaire ne risque-t-il pas de tirer la volaille premier prix ainsi que les importations, au détriment de votre chiffre d’affaires et de vos marges ?

"Aujourd’hui, nous ne percevons pas de changement profond dans l’habitude du consommateur final à l’exception des gammes Bio que nos clients distributeurs rétrécissent ou arrêtent de façon à limiter les pertes en magasin et à véhiculer une meilleure image qualité prix. Pour ce qui est de la restauration, le choix de passer en origine France de la part de notre clientèle de chaines de restauration rapide est inscrit dans la durée. La question se pose surtout pour les cantines d’entreprises qui importent encore 80% de leurs approvisionnements en volaille et qui peuvent difficilement payer plus de 5% plus cher pour s’approvisionner en France. Il est encore un peu trop tôt pour juger de l’évolution du comportement de cette clientèle sur laquelle nous nourrissons des objectifs de conquête ambitieux à moyen terme."

Faut-il voir dans la communication élargie de vos objectifs à 5 ans la marque du changement de gouvernance à la tête du Groupe ?

"Nous n’avions effectivement pas pour habitude de communiquer nos feuilles route à cinq ans. La nouvelle équipe avait à cœur de donner une vision à nos 24 000 salariés, à conserver et attirer de nouveaux talents et à donner un signal à la communauté financière à un moment où le cours de l'action n’est pas satisfaisant sachant que 10 000 salariés sont actionnaires de l’entreprise."

 

Compte de résultats LDC

Compte de résultat simplifié de LDC (source : présentation des résultats 2021/2022)

 

Quelle croissance organique intègre votre objectif de passer de 5 à 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires d’ici 5 ans ?

"Conformément à notre trajectoire des 21 dernières années où le Groupe était sous la direction de Denis Lambert, nous visons une croissance annuelle de l’ordre de 8%, avec un équilibre entre la croissance organique et externe. La croissance externe concernera essentiellement le Traiteur et l’International."

L’atteinte de vos objectifs passe par des acquisitions majeures. De quelle ampleur, dans quel domaine, dans quel pays ?

"Nous visons des entreprises de 100 à 500 M€ de CA. A l’international, nous comptons doubler le CA pour atteindre 1,3 md€ en consolidant les pays où nous sommes présents (Pologne, Hongrie, Royaume-Uni…) et où nous pouvons nous appuyer sur nos équipes sur place ou à mettre un pied dans d’autres pays comme l’Allemagne, l’Italie, la Roumanie, les Balkans.... L’objectif est de dupliquer le modèle LDC (et non de le copier) sur chacun de ces marchés particuliers en y intégrant la filière localement, de l’alimentation à la transformation. Dans le Traiteur, au-delà de la consolidation des familles de produits actuelles, LDC entend réaliser des acquisitions structurantes sur de nouvelles familles de produits frais comme les salades et les pâtes fraîches. Là aussi, le pôle devrait doubler et dépasser les 1,3 md€ de CA et devenir n°1 du rayon traiteur en France en répondant au plus près aux attentes des consommateurs."

Vous indiquez viser près de 560 M€ d’EBITDA sur l’exercice 2026-2027, en progression de 40% par rapport à 2021-2022. Pour quelle rentabilité sur capitaux employés branche par branche ?

"Cet objectif signifie l’atteinte d’un niveau de marge d’EBE de l’ordre de 8% conforme à nos niveaux historiques. Aujourd’hui, contrairement à il y a quelques années, le pôle Volaille sous-performe les autres pôles et a vu son résultat s’effriter. Deux filiales vont bénéficier maintenant d’une attention particulière en matière d’investissement : le Pôle Normandie et le Pôle Sud-Est. Fondamentalement, il n’y a pas de raison que les marges d’EBE et le retour sur investissement soient différents sur les trois pôles."

 

Directions fonctionnelles LDC

Un passage de témoin en douceur entre deux générations de managers (source : présentation des résultats 2021/2022)

 L'auteur de cette interview est actionnaire de la société.