Zurich (awp) - Roche et Novartis mettent jeudi un terme à deux décennies de supputations récurrentes, avec le rapatriement par le premier de l'importante participation du second dans son capital-actions au porteur, pour quelque 19 milliards de francs suisses.

Novartis avait accumulé entre 2001 et 2003 plus de 53 millions de ces titres, qui contrairement au célèbre bon de jouissance confèrent à leur propriétaire une voix au chapitre actionnarial.

La transaction doit permettre à Roche de retrouver selon ses propres termes une "pleine souplesse stratégique", que le mastodonte pharmaceutique n'a eu cesse de clamer n'avoir jamais perdu depuis l'irruption de son rival et voisin dans son capital, au début du millénaire.

Les deux groupes sont en concurrence directe dans plusieurs domaines thérapeutiques, de l'ophtalmologie à l'oncologie en passant, depuis peu, par l'amyotrophie spinale. Un analyste dépeint la fin d'une situation "bizarre".

Raviver le coeur de métier

Novartis escompte tirer de l'opération un bénéfice de l'ordre de 14 milliards de dollars, qu'il compte employer notamment pour rémunérer ses actionnaires et alimenter son coeur de métier dans les traitement originaux.

L'acquisition entre 2001 et 2003 d'une participation d'un tiers dans le capital-actions au porteur de Roche avait coûté quelque 5 milliards de dollars, rappelle Novartis dans un communiqué. Dividendes et plus-value ont depuis plus que couvert cet investissement, totalisant 6 milliards de dollars.

Les héritiers du fondateur Fritz Hoffman-La Roche, qui disposaient déjà d'une courte majorité absolue dans l'entreprise fondée par leur bisaïeul, verront leur part de droits de vote bondir dans un premier temps à 67,5%.

L'annulation envisagée des titres rapatriés doit par la suite étoffer la part de flottant à 24,9%, contre 16,6% actuellement. Les titres au porteur pourront alors intégrer le Swiss Performance Index (SPI).

Intéressés en retrait

Le laboratoire assure que les représentants de la dynastie n'ont pas pris part aux délibérations du conseil d'administration, mais ont obtenu de la Commission des offres publiques d'achat (Copa) une exemption à l'obligation de présenter une proposition d'acquisition du total.

Les bons de jouissance constituent déjà avec quelque 265 milliards de francs suisses la deuxième capitalisation du Swiss Market Index (SMI), derrière Nestlé. Au cours convenu de pratiquement 357 francs suisses par titre, les quelque 160 millions d'actions au porteur représentent 57 milliards supplémentaires. Novartis de son côté affiche une valorisation de 189 milliards.

Roche tiendra une assemblée générale extraordinaire le 26 novembre, pour statuer sur une destruction des titres rapatriés et dont l'issue constitue un prérequis à la concrétisation de la transaction.

Gagnant-gagnant

Chez Vontobel, Stefan Schneider rappelle que l'arrivée à échéance de la protection de brevets menace la croissance de Novartis et que la direction compte sur des acquisitions pour compenser ce handicap. Le produit de la transaction doit assurer le maintien à un sain niveau du bilan du géant bâlois.

Michael Leuchten, chez UBS, souligne que l'opération permet à Roche de ne pas boucler l'exercice en cours avec des liquidités excédentaires. Il reste à voir si la diminution du nombre de titres Roche en circulation coïncidera avec une augmentation du dividende.

A la Bourse, le bon de jouissance Roche a terminé en hausse de 0,5% à 370,30 francs suisses, alors que la nominative Novartis s'est érodée de près de 0,2% à 76,33 francs suisses, dans un SMI en progression de 0,16%.

jh/vj/fr