Londres (awp/afp) - Adieu Sensodyne, Voltaren, Nicorette: le laboratoire britannique GlaxoSmithKline (GSK) se prépare à scinder son activité de soins de grande consommation, donnant naissance à Haleon, un nouveau géant qui fera ses premiers pas sur la Bourse de Londres lundi.

Projet phare d'Emma Walmsley, qui a pris en 2017 les rênes de GSK et se trouve depuis plus d'un an sous la pression d'investisseurs activistes, il est censé doper la croissance des ventes du laboratoire, qui se focalisera désormais sur les produits biopharmaceutiques.

Haleon, nouveau champion des soins grand public, pourrait de son côté signer la plus grosse introduction de la décennie à la Bourse de Londres, voire même en Europe, selon Susannah Streeter, analyste chez Hargreaves Lansdown.

Avec une valorisation estimée à 40 milliards de livres par Bloomberg, il devancerait notamment le géant minier suisse Glencore et son entrée à 38 milliards de livres sur la place britannique en 2011.

Lundi, les actionnaires de GSK, qui détient 68% de cette entité, se verront remettre une action d'Haleon pour chaque titre détenu dans le laboratoire britannique.

GSK recevra en outre au moment de la scission plus de 7 milliards de livres de dividendes de sa filiale, dont il conservera 6% dans un premier temps, avant de se désengager progressivement.

Le géant pharmaceutique américain Pfizer, qui détient les 32% restant, a fait savoir qu'il se désengagerait à terme de l'entreprise pour se focaliser sur sa propre stratégie de "médicaments et vaccins innovants".

"Libérer le potentiel"

Emma Walmsley a fait valoir à plusieurs reprises que cette opération, "la plus importante évolution de société qu'a connu GSK en 20 ans", permettra de "libérer le potentiel à la fois de GSK et de Haleon".

GSK, "a moins bien réussi que ses rivaux tels qu'AstraZeneca ces dernières années", commente Keith Bowman, analyste chez Interactive investor.

L'action GSK n'a en effet progressé que de 6% sur les 5 dernières années alors que celle de son rival Astrazeneca a plus que doublé.

Ce dernier a notamment été l'un des premiers laboratoires à lancer un vaccin contre le Covid-19 alors que GlaxoSmithKline s'est fait largement distancer.

La scission aura de quoi satisfaire, selon M. Bowman, les investisseurs activistes de Bluebell Capital Partners et Eliott Management, très critiques de la performance du laboratoire.

L'opération permettra notamment "une valorisation indépendante" des segments d'activité et "une responsabilisation accrue de la direction", explique l'analyste.

GSK cherchera notamment à s'appuyer sur les médicaments de niche, à l'appui d'une ambition de croissance des ventes de plus de 5% cette année.

Tout à sa nouvelle stratégie, le laboratoire a déjà lancé les grandes manoeuvres: en avril, acquisition pour 1,9 milliard de dollars de l'entreprise californienne Sierra Oncology, spécialisée dans les thérapies ciblées contre les formes rares de cancer. Fin mai, rachat de la société biopharmaceutique américaine Affinivax, "pionnière dans le développement d'une nouvelle classe de vaccins", notamment contre le pneumocoque, pour une somme pouvant atteindre 3,3 milliards de dollars.

Ribambelle de marques

Après des ventes en bernes au plus fort de la pandémie, le groupe a vu son chiffre d'affaires rebondir au premier trimestre, tant dans son activité biopharmaceutique que dans les soins de grande consommation.

Une bonne nouvelle pour le futur Haleon, qui avait déjà vu son bénéfice net plus que doubler sur deux ans en 2021, à 1,4 milliard de livres.

Susannah Streeter, analyste chez Hargreaves Lansdown, estime que l'ex division "GSK Consumer Healthcare", présente dans 100 pays avec une ribambelle de marques internationales, pourrait voir ses ventes et marges profiter du recentrage sur l'activité grand public.

La coentreprise de GSK et Pfizer avait d'ailleurs récemment attiré l'attention du géant de l'agroalimentaire et de l'hygiène Unilever, qui avait fait en janvier une tentative de rachat à 50 milliards de livres, rejetée par GSK qui la jugeait insuffisante.

Le nouveau groupe devra pourtant jongler avec "l'inflation de ses coûts, qui s'est propagée dans l'industrie des biens de consommation", prévient Mme Streeter, et son dividende pourraient être lesté pendant des années par les 10 milliards de livres de dette hérités de GSK.

Cela n'a pas refroidi les actionnaires de GSK. Ils ont voté, le 6 juillet, à 99,81% en faveur de la scission, validant la stratégie de Mme Walmsley, qui avait dirigé cette branche de GSK avant de prendre la tête du groupe.

afp/rp