Une gestion familiale sur un marché robuste

Vétoquinol développe et vend des produits vétérinaires dédiés exclusivement à la santé animale. Trois générations de la famille Frechin se sont succédées aux commandes du groupe qui contrôle encore aujourd’hui 67% du capital et 77,8% des droits de vote. 

Le laboratoire est spécialiste des soins apportés aux animaux. Son savoir-faire porte sur six domaines thérapeutiques différents : les soins des douleurs et des inflammations, les maladies respiratoires, la dermatologie, le traitement des parasites, la santé de la mamelle et enfin la reproduction. L’entreprise est présente sur un marché estimé en croissance de 4,5% par an, à 42 milliards de dollars en 2024. 

Le marché de la santé animale, assez robuste, a affiché en 2021 un taux de croissance de 10%. Il est divisé en deux segments. Les animaux de compagnie (chiens, chats, entre autres) représentent 64% du chiffre d’affaires de l’entreprise et 46% du marché mondial. Les dépenses de plus en plus fortes des ménages pour leurs animaux et la prise en compte croissante du respect du bien être animal en font un marché à forte croissance. Le second segment, les animaux d’élevage (bovins, porcs, volailles, etc), est tiré par l’augmentation de la demande en protéines animales (œufs, lait, viande). Il s’agit d’un marché de gros volumes, en croissance plus faible que le premier. 

La santé animale est composée de deux segments :

Source : Vetoquinol

Vétoquinol est positionné à l’international pour profiter des dynamiques propres à chaque zone géographique. Ainsi, le chiffre d’affaires est réparti entre l’Europe à 50%, ou selon la FEDIAF(organisation pour les industriels de la nourriture animale en Europe), un ménage sur quatre a soit un chien, soit un chat. Les régions d’Amériques totalisent 34% du chiffre d’affaires, et sont poussé par les Etats-Unis qui représentent à eux seuls 30% des parts de marché de la santé animale et 50% du marché mondial des animaux de compagnie et par l’Amérique latine qui est dominée par les productions bovins, porcines et aviaires. Ce n'est pas un hasard si le Brésil a l’ambition d'être le premier producteur et exportateur mondial de protéines d’origine animale. Enfin, la zone Asie Pacifique, avec 16% des ventes, est très dynamique et bien aidée par le marché chinois (2ème marché mondial) qui bénéficie de l’amélioration du niveau de vie globale, favorable à l’adoption d’animaux de compagnie.

Répartition du chiffre d’affaires par activité et par zone géographique :

Source : Vetoquinol

Stratégie créatrice de valeur et bilan sain 

L’entreprise s’adresse aux éleveurs, aux propriétaires d’animaux de compagnie et aux vétérinaires via un panel de marques, fruit d’une stratégie de croissance externe rigoureuse et créatrice de fortes synergies, comme avec Zylkène, destiné aux chiens et chats et obtenu suite au rachat du laboratoire lyonnais Orsco en 2012. Les rachats de Profender et Drontal en 2020 ont quant à eux permis au groupe d’affirmer son expertise sur les antiparasitaires pour animaux de compagnie. L’entreprise lance également de nouveaux produits en interne, comme Cimalgex, un traitement contre la douleur et l’inflammation pour les chiens, qui est une réussite sur le sol européen et brésilien. Pour cela, le groupe dispose de cinq sites de R&D (Recherche et Développement) employant 214 personnes en 2021 soit 8% des effectifs. Grosso modo, l'équivalent de 6% du chiffre d’affaires est consacré à la recherche. Cette stratégie permet au groupe d’avoir une croissance supérieure à celle du marché de la santé animale. 

Portefeuille des principales marques du groupe :

Source : Vetoquinol

Quant à la production, elle s’orchestre autour de cinq sites en France, en Pologne, au Brésil et au Canada et permet au groupe d'être directement présent à l’international. Ainsi, le site de Princeville au Canada sert à alimenter principalement le marché nord américain.  

La croissance est restée modeste mais régulière, malgré les crises et perturbations traversées, signe d’une gestion qualitative de l’entreprise. Sur la période 2012-2022, le chiffre d'affaires est passé de 298 M€ à 540 M€, et n’a pas connu une seule année de repli. Quant à la marge nette, elle a progressé sur la période, passant de 7,6% en 2012, à 12,1% en 2021. Elle devrait malgré tout s'élever aux alentour de 9,6% en 2022 compte tenu de l’augmentation des prix de l’énergie, des matières premières et des charges de personnel. Enfin, l’évolution des flux de trésorerie disponible (free cash flow) est assez impressionnante puisqu’ils sont passés de 27 M€ à 75,9 M€ sur la période 2012-2021, ce qui traduit une excellente capacité de l’entreprise à dégager un excédent de trésorerie. Quant à cette dernière, elle devrait d’ailleurs s’élever à 67,3 M€ à fin 2022. L’entreprise, qui n’est pas endettée, a donc les moyens financiers pour continuer ses opérations d’acquisitions. 

Une place de choix dans un marché concurrentiel 

Par rapport à ses concurrents cotés, Vetoquinol est plus petit, mais dispose de chiffres de meilleures qualités. Le potentiel semble plus important, notamment compte tenu du bilan solide de la société. Dès que la situation macro-économique sera normalisée, les niveaux de marges de 2021 devraient être retrouvés. 

Malgré ce contexte, le plan stratégique de Vétoquinol à horizon 2026 est assez modeste et prévoit une croissance supérieure à celle du marché et une marge d’EBITDA autour de 20% (qui devrait être déjà assez proche avec les résultats à fin 2022). Le groupe mise une hausse des investissements, passant de 15 M€ par an à 25 M€, sur le développement prioritaire des marques internationales (comme au Brésil, marché à fort potentiel, dont le but est d’aligner cette région sur le niveau de performance du reste du groupe) en privilégiant les chiens, chats et bovins et quatre segments thérapeutiques (contre 6 actuellement) : les antiparasitaires, la dermatologie, les vaches laitières et la mobilité.

En bourse, la valeur a perdu plus du tiers de sa valeur en 2022. Mais le titre a plutôt résisté par rapport aux autres acteurs du marché qui ont plus souffert : -46% pour Virbac, -51% pour Dechra, -56% pour Elanco ou encore  -36% pour Animalcare, -40% pour Zoetis. La solidité du bilan de l’entreprise, ainsi que son mode de gestion familiale sont des atouts dans des périodes plus compliquées, comme le fut l’année 2022. Pour autant, sur les dix dernières années, la valeur affiche un gain de 226%, hors dividende. 

La diversité des pathologies et des produits que commercialise le groupe lui confère une certaine protection sur un éventuel retard dans le développement de nouveaux médicaments. Pour autant, Vetoquinol fait face à un marché très concurrentiel et ne représente qu’une part marginale du marché. Également, l’instabilité du marché des animaux d’élevage (grippe aviaire et porcine, entre autres) peut impacter la demande si ce type d’épidémies venaient à se généraliser. 

Malgré une phase de normalisation en 2022, après la période intense post-covid, Vétoquinol est un acteur intéressant sur un marché qui reste bien orienté à long terme. La solidité du bilan de l’entreprise est un atout qui lui permet de viser de potentielles acquisitions. On notera aussi la bonne capacité de l’entreprise à créer de la valeur en interne (17% de croissance organique selon les derniers chiffres à 2021). La vision de la famille Frechin, qui dirige le groupe depuis 1933, offre une certaine stabilité à l’entreprise.