Paris (awp/afp) - La débâcle de l'empire Adani va-t-elle faire tache d'huile ? De nombreux fonds d'investissement et groupes étrangers - actionnaires directs ou partenaires du conglomérat indien tentaculaire - sont dans l'expectative et restent discrets sur leur niveau d'exposition, deux semaines après le début de la correction boursière.

Pour l'heure, les craintes de contagion se manifestent surtout à l'échelle nationale. Dans une note publiée lundi, les analystes du gestionnaire d'actifs Bernstein ont dit s'attendre à "davantage de volatilité en Inde cette année" et une possible correction du marché.

Mais les répercussions de l'affaire Adani, accusé de fraude et de manipulations de cours par la société américaine Hindenburg Research, pourraient à terme dépasser les frontières indiennes en raison des nombreux liens du conglomérat avec des sociétés internationales.

Les partenaires financiers

L'empire Adani se décompose en plusieurs entités cotées, la principale étant Adani Enterprises Limited, son fleuron. Son premier actionnaire est la famille Adani, avec 64% des actions en circulation. Plus de 20% du capital est flottant.

Parmi les vingt premiers actionnaires d'Adani Enterprises figuraient encore récemment des grands noms de Wall Street, tels les fonds d'investissement Vanguard, Blackrock ou Goldman Sachs, directement ou via des filiales. Il est difficile de savoir s'ils ont encore leurs actions ou s'ils s'en sont délestés suite à la dégringolade boursière du conglomérat.

Contactés par l'AFP, Vanguard et Goldman Sachs n'ont pas souhaité faire de commentaire. Même réaction du côté des banques Credit Suisse et Crédit Agricole, qui détiendraient une faible participation au capital des entreprises de l'empire Adani, selon les données de Bloomberg et Factset.

Le fonds souverain norvégien, le plus gros du monde, avait pour sa part indiqué le 31 janvier qu'il détenait à fin 2022 quelque 200 millions de dollars d'actions dans l'empire Adani, précisant avoir "réduit son exposition au cours des dernières années" après une évaluation des risques "basée sur différents facteurs".

Les partenaires commerciaux

Le géant singapourien de l'agroalimentaire Wilmar International, propriété de la famille du milliardaire Robert Kuok, codétient à parts égales avec le groupe indien Adani Wilmar Limited (AWL), une entreprise cotée en Bourse et notamment spécialisée dans les denrées alimentaires et les huiles de cuisson.

"Nous allons continuer à soutenir notre associé indien", a réagi Wilmar auprès de l'AFP, soulignant que le rapport de Hindenburg Research "n'a pas soulevé de questions spécifiques à AWL".

Le groupe américain de supermarchés Walmart, contrôlé par la richissime famille Walton, a pour sa part indiqué à l'AFP n'avoir pas d'information particulière à communiquer concernant sa filiale indienne Flipkart, un géant du commerce en ligne qui a signé en 2021 un partenariat avec Adani Logistics, ce partenariat étant "de nature commerciale".

Dans le secteur des centres de données, l'opérateur mondial EdgeConneX a développé en 2021 une co-entreprise à parts égales avec Adani Entreprises, baptisée AdaniConnex.

EdgeConneX a assuré à l'AFP que les accusations du rapport Hindenburg "n'ont pas eu d'effet sur AdaniConnex" et qu'il "continuait à se concentrer sur l'investissement, la construction et l'exploitation de centres de données" en Inde.

Les partenaires industriels

Dès la semaine dernière, TotalEnergies avait communiqué sur son exposition qu'il juge "limitée": le géant pétrolier français détient 50% de la coentreprise Adani Total Private Limited, 37,4% de Adani Total Gas Limited, 19,75% de Adani Green Energy Limited et 50% de l'entité AGEL23, soit une exposition totale de 3,1 milliards de dollars au 31 décembre 2022 - équivalente à 2,4% de ses capitaux employés.

Le partenariat pour créer un géant de l'hydrogène vert, par l'acquisition de 25% d'Adani New Industries Limited par la multinationale française, est suspendu dans l'attente des conclusions d'un audit commandé par Adani: il "n'a pas été signé et ne va pas être signé", a indiqué mercredi le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné.

Toujours en France, CMA CGM a indiqué que ses activités en Inde "se poursuivent normalement". Le troisième transporteur maritime mondial a signé en 2017 avec Adani un contrat de 15 ans afin d'opérer un nouveau terminal pour conteneurs dans le port de Mundra, le plus grand d'Inde.

En Israël, en janvier dernier, un consortium mené par Adani a aussi remporté l'appel d'offres pour la privatisation du port de Haïfa, à travers une coentreprise avec l'entreprise de logistique locale Gadot Group (qui détient une part de 30%).

afp/rp