ISTANBUL (Reuters) - Les critiques à l'égard de la réponse de la Turquie au tremblement de terre se sont multipliées mercredi, l'opposition politique et les habitants de la zone sinistrée accusant le gouvernement d'avoir fourni des secours tardifs et inadéquats.

La colère s'est amplifiée alors que le président Recep Tayyip Erdogan s'est rendu à Kahramanmaras, près de l'épicentre du tremblement de terre, où il a reconnu certains dysfonctionnements dans la réponse initiale à la catastrophe.

"Nous avons eu quelques problèmes dans les aéroports et les routes, mais nous sommes mieux aujourd'hui", a-t-il déclaré tout en appelant à l'unité.

"C'est un temps pour l'unité, la solidarité. Dans une période comme celle-ci, je ne peux pas supporter que des gens mènent des campagnes négatives pour des intérêts politiques", a-t-il déclaré aux journalistes à son arrivée dans la province de Hatay.

Le tremblement de terre qui a touché lundi le sud de la Turquie et la Syrie voisine a fait plus de 11.000 morts et détruit des infrastructures et des milliers d'habitations.

"Où est l'État ? Où sont-ils depuis deux jours ?", s'est écriée Sabiha Alinak, près d'un bâtiment effondré et recouvert de neige dans la ville de Malatya.

Le chef du principal parti d'opposition, Kemal Kilicdaroglu, a accusé mercredi le gouvernement de ne pas coopérer avec les autorités locales et d'affaiblir les organisations non gouvernementales qui pourraient aider.

"Cet effondrement est exactement le résultat d'une politique de profit systématique", a-t-il déclaré.

"S'il y a quelqu'un de responsable de ce processus, c'est Erdogan. C'est ce parti au pouvoir qui n'a pas préparé le pays à un tremblement de terre pendant 20 ans."

L'armée n'a pas agi assez tôt parce que le gouvernement d'Erdogan a annulé un protocole lui permettant d'agir sans instruction, a accusé pour sa part Nasuh Mahruki, fondateur d'un groupe de recherche et de sauvetage créé en réponse au tremblement de terre de 1999 qui a fait 17.000 morts.

"Lorsque ce protocole a été annulé, (leurs) devoirs et responsabilités dans la lutte contre les catastrophes ont été supprimés", a-t-il déclaré à Reuters.

"Il semble maintenant que la responsabilité incombe à l'Afad (l'autorité turque de gestion des catastrophes et des urgences), mais elle n'est pas préparée à un problème aussi colossal", a ajouté Nasuh Mahruki.

Un fonctionnaire du gouvernement, qui a requis l'anonymat, a déclaré que les efforts ont été entravés par les routes endommagées, le mauvais temps et l'impossibilité d'utiliser les aéroports en raison des dégâts.

"Il semble que nous aurions dû être mieux préparés", a-t-il reconnu.

(Reportage Birsen Altayli, Daren Butler et Orhan Coskun ; avec la contribution d'Ali Kucukgocmen ; version française Augustin Turpin, édité par Blandine Hénault)