Si la tendance de croissance reste positive — le chiffre d'affaires triple en dix ans, de $11 à $30 milliards — la profitabilité traverse elle un sérieux trou d'air, puisque le résultat net revient à ses niveaux de 2013-2014.

En cause : une baisse des ventes à surface comparable, liée entre autres à l'émergence de nouveaux acteurs comme Carvana ; la remontée des taux d'intérêt qui restreint les activités de crédit et entraîne une première série de défauts de paiements ; et le coût des investissements dans la transition digitale, entre autres.

La faiblesse la plus criante du modèle d'affaires de CarMax demeure l'absence de levier opérationnel. On le réalise en observant la compression des marges qui accompagne la croissance pourtant spectaculaire des ventes.

Dans un registre plus positif, le marché américain des véhicules d'occasion est gigantesque, avec près de 40 millions d'unités vendues par an. Il est aussi toujours très fragmenté, et largement dominé par CarMax, qui écoule trois fois plus de véhicules que son premier concurrent. 

A horizon 2026, le groupe entend vendre 2 millions de véhicules par an et réaliser $33 milliards de chiffres d'affaires : les opportunités de consolidation, on le voit, ne devraient pas manquer, même si par le passé CarMax s'est essentiellement développé de manière organique.

Le management, cela mérite d'être signalé, a bien réussi sa percée dans le wholesale. Ce segment représente désormais un quart du chiffre d'affaires, et permet d'assurer un coût d'approvisionnement compétitif sur le segment retail.

En réalité, le sujet d'inquiétude du moment concerne bien sûr le segment crédit. CarMax prête en propre à sa clientèle tier 1, dite prime, et sous-traite la quasi intégralité des crédits à la clientèle tier 2 ou 3, dite subprime ; mais l'ensemble reste une boîte noire, et la solvabilité des emprunteurs sujette à caution.

L'historique de profitabilité des activités de crédit est bon mais l'on ignore si cette tendance sera soutenable dans le nouvel environnement de taux. Ce contexte pèse sur l'ensemble des acteurs du secteur — par exemple Ally Financial, devenu entre temps une nouvelle position de Berkshire Hathaway.

Au passage, CarMax poursuit une stratégie d'allocation du capital chère à Berkshire, puisque le groupe a redirigé les quatre-cinquième de ses profits de la dernière décennie vers les rachats d'actions. 

Si le groupe parvient à revenir à ses niveaux de profitabilité historiques, il devrait être en mesure de générer entre $1.2 et $1.5 milliards de profit par an. Difficile, si l'on souscrit à ce scénario, de résister à la valorisation du moment. 

Il faudra cependant composer avec la grande opacité du modèle d'affaires.