J'ai vu ce matin sur la Une de Libération que "la pièce est tombée du mauvais côté pour le PSG" hier soir lors d'un match contre Barcelone. Je ne suis pas un grand fan de foot, mais l'image m'a tout de suite fait penser à ce qui s'est passé hier sur les marchés financiers : aux Etats-Unis, la pièce est aussi tombée du mauvais côté pour la politique monétaire de la Fed. Du mauvais côté de l'inflation en l'occurrence, puisque l'évolution des prix américains en mars a pris la tangente (tiens, une chanson sur la tangente) en quittant le scénario planplan de la décrue progressive. La différence avec ce qui était attendu peut paraître minime, mais c'est la troisième fois d'affilée que l'inflation est un peu plus vigoureuse que prévu outre-Atlantique. Ça complique donc la donne pour la banque centrale américaine, qui a de moins en moins d'arguments pour commencer à assouplir sa politique monétaire.

Les marchés l'ont bien compris. Le rendement de la dette à 10 ans aux Etats-Unis a bondi de 4,39 à 4,54%, soit au plus haut depuis la fin du mois de novembre dernier. L'outil FedWatch du CME, qui donne une probabilité d'évolution des taux en fonction des contrats à terme, est passé d'un niveau légèrement supérieur à 50% en faveur d'une baisse de taux en juin à 18% entre hier et aujourd'hui. Le décalage entre l'histoire que se racontait le marché et la réalité est tel que les financiers ne croient même plus à une baisse de taux en juillet (54,5% de probabilité de statu quo). Je vais quand même rappeler que, comme souvent, l'effet de balancier fait que les marchés passent d'un optimisme béat à une profonde dépression sans expérimenter les phases intermédiaires et que les jours qui viennent devraient amener une lecture plus pragmatique des choses. Mais à court terme, la narration dominante redevient "les taux américains resteront élevés plus longtemps que prévu". Les investisseurs n'attendent plus que deux baisses de taux cette année, dont la première en septembre. On est très loin de ce qui prévalait en début d'année, qui ressemblait davantage à "sept baisses de taux dont la première en mars".

Du coup, les oracles qui clamaient depuis quelques temps qu'ils entrevoyaient seulement deux baisses de taux, une seule voire pas du tout boivent du petit lait. Bloomberg est même allé chercher Lawrence Summers, le Secrétaire du Trésor de Bill Clinton, pour lui faire dire qu'il faut "prendre au sérieux la possibilité que le prochain mouvement de taux soit à la hausse plutôt qu'à la baisse." Et Toc. Summers a quand même précisé que cette éventualité n'est pas la plus probable. Il y a quatre mois, une telle déclaration aurait déclenché quelques ricanements. Mais pas aujourd'hui. D'ailleurs, le Wall Street Journal titre assez explicitement ce matin "Les baisses de taux de la Fed sont désormais une question de 'si', et non plus de 'quand'."

L'évaporation d'une baisse de taux de la Fed en juin a fait grimper le dollar à 1,074 USD pour 1 EUR, alors que la Banque centrale européenne rendra cet après-midi son verdict sur ses propres taux directeurs. Il ne se passera rien aujourd'hui, c'est quasiment acquis, mais le marché pense que la BCE réduira ses taux en juin. Parce que l'inflation de la zone euro en mars est ressortie plus faible que prévu et que les conditions économiques de la région sont plus dégradées qu'aux Etats-Unis. Il n'y a pas si longtemps, les financiers pensaient que la BCE serait à la remorque de la Fed. C'est peut-être le contraire qui va se produire. Le point important de la réunion du jour sera le ton adopté par Christine Lagarde en conférence de présentation. Les investisseurs s'attendent à une sémantique assez neutre, qui laisserait la voie ouverte pour un assouplissement de la politique monétaire à court terme. Il ne faudrait pas que les faucons de l'institution soient parvenus à reprendre la main, sans quoi le doute pourrait s'installer, ce qui pèserait sur les marchés européens.

D'autres statistiques d'inflation attirent l'attention ce matin. Celles de la Chine, où les prix à la consommation ont progressé de 0,1% en mars, en-deçà des attentes (+0,4%). Les prix à la production ont reculé de -2,8%, comme attendu. Des chiffres qui ne cadrent toujours pas avec une forte reprise économique et qui ne manquent pas de susciter quelques déceptions. En parallèle, la banque centrale chinoise a renforcé son soutien au yuan en fixant le taux de change de référence quotidien à un niveau qui a dépassé les estimations. Il faut dire qu'avec le renforcement du dollar, toutes les devises trinquent. Le marché chinois fait en revanche peu de cas de deux mauvaises nouvelles sur le front immobilier. S&P a abaissé la note de crédit émetteur à long terme du gros promoteur China Vanke en catégorie spéculative, pendant qu'une filiale de Ping An Insurance a retardé le remboursement d'une échéance à cause des difficultés du promoteur Zhenro Properties, dans lequel elle avait investi et qu'elle a assigné en justice.

Pour rester dans la région, le renforcement du billet vert pèse aussi sur le yen, qui a enfoncé le seuil psychologique de 152 JPY pour 1 USD, qui fait craindre une intervention de soutien de la BOJ. Les marchés actions japonais n'aiment pas trop les mesures prises pour faire remonter le yen.

Pour en finir avec l'actualité globale, les Etats-Unis ont averti Israël d'un risque d'attaque par missile de l'Iran ou de ses alliés. Pendant ce temps à Washington, Joe Biden reçoit en visite d'Etat le premier ministre japonais Fumio Kishida, pour cimenter les relations entre les Etats-Unis et l'Archipel et créer un bloc uni face à la Chine.

Sur les marchés actions, il faut noter quelques publications d'entreprises en Europe ce matin, notamment Publicis et Givaudan.

En Asie Pacifique ce matin, le Nikkei 225 perd -0,36%, Hong Kong -0,5% et Sydney -0,4%. La Corée du Sud, l'Inde et la Chine continentale sont en hausse modeste. Les indicateurs avancés européens sont proches de l'équilibre : la perspective de voir la BCE baisser ses taux avant la Fed surpasserait-elle la déception sur l'évolution de la politique monétaire américaine ?

Le CAC40 gagne 0,07% à 8053 points à l'ouverture. Le Bel20 et le SMI sont en léger repli dans les premiers échanges.

Les temps forts économiques du jour

La BCE rendra son verdict sur les taux à 14h15, puis tiendra la conférence de présentation de la décision à partir de 14h45. Aux Etats-Unis, les inscriptions hebdomadaires au chômage et les prix à la production tomberont à 14h30. Tout l'agenda ici.

L'euro chute à 1,074 USD. L'once d'or recule à 2343 USD. Le pétrole remonte, avec un Brent de Mer du Nord à 90,28 USD le baril et un brut léger américain WTI à 85,92 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans bondit à 4,54%. Le bitcoin se négocie 70 600 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Compagnie Financière Richemont : Bernstein maintient sa recommandation de surperformance et réduit l'objectif de cours de 166 à 165 CHF.
  • Crédit Agricole : Goldman Sachs maintient sa recommandation de vente avec un objectif de cours relevé de 12 EUR à 12.10 EUR.
  • Hermès International : Bernstein maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours réduit de 2436 à 2413 EUR. Goldman Sachs maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours relevé de 2245 à 2303 EUR.
  • Jupiter Fund Management Plc : Barclays passe de pondération de marché à souspondérer avec un objectif de cours réduit de 0,88 GBP à 0,85 GBP.
  • K+S Ag : Stifel passe de conserver à vendre avec un objectif de cours réduit de 14 EUR à 12,50 EUR.
  • Kering : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 460 à 400 EUR.
  • Kingfisher Plc : HSBC passe d'une recommandation de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 2,35 GBP à 3,05 GBP.
  • Liontrust Asset Management Plc : Barclays passe de surpondérer à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 10 GBP à 7,60 GBP.
  • LVMH : Bernstein maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 944 à 938 EUR.
  • Marks & Spencer Group Plc : JP Morgan passe de neutre à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 2,60 GBP à 3,30 GBP.
  • Renault : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours relevé de 44 à 59 EUR.
  • Safran : Bernstein maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours relevé de 210 à 218 EUR.
  • Smiths Group Plc : HSBC passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 18,75 GBP à 20 GBP.
  • Sparebank 1 Sr-Bank : SEB Bank passe d'achat à conserver avec un objectif de cours de 141 NOK.
  • Stellantis : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer et relève l'objectif de cours de 24 à 28 EUR.
  • Subsea 7 : JP Morgan passe de neutre à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 180 NOK à 220 NOK.
  • Technip Energies : JP Morgan passe de surpondérer à neutre avec un objectif de cours réduit de 27 EUR à 26 EUR.
  • TotalEnergies : TD Cowen maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 64 à 65 EUR.
  • UCB : Berenberg maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 120 à 130 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Publicis enregistre une croissance de 5,3% de son chiffre d'affaires au premier trimestre et dépasse les attentes.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Airbus encourt des coûts initiaux important pour se préparer à augmenter sa cadence de production d'avions civils, a déclaré mercredi son directeur financier.
  • Société Générale signe un protocole d’accord avec le groupe BPCE en vue de la cession pour 1,1 Md€ des activités de Société Générale Equipment Finance.
  • Deutsche Telekom, Orange, Airbus et 15 autres entreprises européennes ont critiqué une proposition qui permettrait à Amazon, Alphabet et Microsoft de soumissionner pour des contrats européens hautement sensibles dans le domaine de l'informatique en nuage.
  • STMicroelectronics et Centrica Energy signent un accord de long terme portant sur la fourniture d’électricité issue de sources renouvelables en Italie.
  • Veolia réalise une campagne inédite de détection des PFAS dans l’eau potable en France et déploie son plan d’action.
  • Air Liquide accroît ses capacités de production de biométhane aux Etats-Unis avec deux nouvelles unités de production.
  • Eramet obtient un accord pour la poursuite des activités de la SLN en Nouvelle-Calédonie.
  • Eiffage Immobilier et Seqens signent une VEFA de 41 logements locatifs intermédiaires.
  • Atos ouvert à une prise de participation minoritaire de l'Etat français dans la filiale stratégique BDS.
  • Rubis finalise la cession de 55% de Rubis Terminal à I Squared Capital.
  • Le conseil d'administration de Believe devrait se prononcer sur l'offre restante d'ici le 19 avril.
  • Audacia boucle un premier tour de table de 70 M€ pour Quantonation II, second fonds de Quantonation Ventures, dédié aux technologies quantique.
  • McPhy projette de passer du marché réglementé sur Euronext Growth.
  • Drone Volt signe un accord de distribution en Turquie.
  • Afyren Neoxy réalise ses premières livraisons commerciales d’engrais.
  • OSE Immunotherapeutics reçoit un financement public de 8,4 M€ pour l’essai clinique de phase III avec Tedopi contre le cancer du poumon.
  • Cellectis mène de la R&D sur une nouvelle approche d'édition intronique pour le traitement des maladies métaboliques congénitales par des cellules souches hématopoïétiques modifiées.
  • Les principales publications du jour : Catana, Eurobio, Vogo, Mon Courtier Energie, Carbios, Kumulus Vape, Stif

Dans le vaste monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres, sauf pour les échanges post-séance aux Etats-Unis, qui reflètent normalement bien la tendance)

  • Darktrace relève ses prévisions annuelles pour la troisième fois cette année.
  • Givaudan publie des revenus en légère hausse au T1, un peu au-dessus des attentes.
  • VAT Group enregistre un rebond des commandes au premier trimestre.

Annonces importantes (et moins importantes)                                                                                                                                                                                

En Europe

  • UBS a souffert en bourse parce que la banque va être confrontée à des règles plus strictes dans le cadre de la réponse suisse au sauvetage de Credit Suisse.
  • Lufthansa suspend ses vols vers l'Iran dans un contexte de tensions régionales.
  • Universal Music Group a conclu un partenariat de distribution numérique mondial avec la société de divertissement chinoise TF Entertainment.
  • Le fabricant finlandais d'acier inoxydable Outokumpu a annoncé mercredi le départ de sa directrice financière.

Aux Etats-Unis / Canada

  • Vertex Pharmaceuticals acquiert Alpine Immune Sciences pour 4,9 Mds$.
  • Google investit 1 Md$ pour améliorer la connectivité avec le Japon grâce à deux câbles sous-marins.
  • Les États-Unis accusent Regeneron de fraude sur les prix d'un médicament pour les yeux.
  • KKR envisage de vendre ou d'introduire en bourse BMC Software, qui pourrait valoir 15 Mds$.
  • Crown Castle nomme Steven Moskowitz au poste de CEO.
  • Meta Platforms va lancer des versions simplifiées de Llama 3 la semaine prochaine, selon The Information.

En Asie Pacifique

  • Tesla explore une coentreprise avec Reliance Industries pour construire une usine de fabrication de véhicules électriques en Inde.
  • S&P a abaissé la note de crédit émetteur à long terme de China Vanke de BBB+ à BB+ en raison de la situation du marché immobilier chinois.
  • Une filiale Ping An Insurance a retardé le remboursement d'un produit d'environ 107 M$, invoquant la crise du marché immobilier et ajoutant qu'elle poursuivait le promoteur Zhenro Properties auprès duquel elle avait investi la somme.

Les principales publications du jour : Constellation Brands, Fastenal, Porsche AG, Givaudan, Publicis, VAT GroupTout l’agenda ici.

Lectures