Arm a enregistré auprès de la Securities and Exchange Commission les documents préliminaires à une introduction à la Bourse de New York. Le prospectus vise pour le moment simplement à donner une information précise sur la situation financière du groupe avant de préciser le prix par action et la part du capital qui sera ouverte aux investisseurs. Il s'agit de la plus importante introduction en Bourse de l'année, et l'une des plus importantes dans le secteur de la tech depuis celle du chinois Alibaba en 2014. Plusieurs médias ont rapporté que SoftBank Group espère obtenir une valorisation d'au moins 60 milliards de dollars pour Arm.

Une IPO à Wall Street

Fondée au Royaume-Uni en 1990, Arm était initialement une simple coentreprise entre plusieurs sociétés (dont Apple). Elle avait pour objet la création d’un processeur à faible consommation d'énergie pour les appareils alimentés par batterie. Fort de son succès, la joint-venture entre à la bourse de Londres en 1998. Devenue entretemps une référence mondiale dans l'architecture des semi-conducteurs, Arm a été rachetée par SoftBank en 2016 pour environ 30 milliards de dollars.

Début mars 2023, le groupe d’investissement japonais a annoncé son intention de réintroduire Arm en Bourse après l'échec, début 2022, de sa vente à l'américain Nvidia. Au grand dam de la place financière de Londres, où elle était cotée jusqu'en 2016, Arm effectura son IPO à New York. Le groupe conservera toutefois son siège à Cambridge et pourrait envisager dans un deuxième temps une seconde cotation à la Bourse de Londres, en manque cruel d'attractivité depuis le Brexit.

Des chiffres moroses

Derrière le business aguicheur d’Arm, à savoir la conception d’une technologie d’infrastructure pour divers types de puces, et des clients prestigieux, tels que Amazon, Alphabet, AMD, Intel, Nvidia, Qualcomm, Samsung et Apple, les perspectives du groupe sont moins brillantes. Lors de l’exercice 2023, Arm a déclaré un bénéfice net de 524 millions de dollars pour un chiffre d'affaires de 2,68 milliards de dollars. Malgré de très belles marges, la croissance du groupe est moribonde. Le chiffre d'affaires d'Arm pour l'exercice 2023 était légèrement inférieur à celui de 2022, qui s'élevait à 2,7 milliards de dollars. Une information que la société tente de mettre au second rang au profit d’une communication charmeuse. 

Le groupe a, effectivement, quelques atouts non comptables à faire valoir. Outre une technologie incluse dans plus de 30 milliards de puces expédiées au cours de l'exercice 2023, Arm conçoit l'architecture de microprocesseurs que l'on trouve dans 99% des smartphones Pour autant, Arm est confrontée à des vents contraires dus au ralentissement de la demande de smartphones, qui a touché l'ensemble des fabricants de puces. Le groupe a cependant fait valoir que sa technologie serait essentielle pour les applications d'IA, bien qu'elle se concentre sur les processeurs centraux, et non sur les processeurs graphiques qui sont nécessaires pour créer de grands modèles d'IA.

"Le processeur est essentiel dans tous les systèmes d'IA, qu'il gère la charge de travail de l'IA entièrement ou en combinaison avec un coprocesseur, tel qu'un GPU ou un NPU" - Arm 

Dernier point à relever, la société a déclaré que ses trois plus gros clients représentaient 44% de son chiffre d'affaires total. Une concentration importante couplée aux faits que la société, Arm China, une entité indépendante, représentait 24% des ventes et que Qualcomm, qu'elle poursuit actuellement pour violation de licence, représentait 11 % de son chiffre d'affaires.

Côté SoftBank, l’equity carve out se comprend. Les ventes nettes d’Arm chutent de 4,6% en glissement annuel au deuxième trimestre et le Vision Fund de SoftBank est dans la nécessité de se séparer de quelques participations après des milliards de dollars de pertes durant les derniers mois, en raison de paris technologiques manqués dans un environnement de hausse des taux.

Des partenaires aux aguets

Nous restons cependant attentifs à l’IPO car malgré les zones de doute précitées, la demande sera probablement au rendez-vous. De grands noms se battent pour des parts minoritaires du dossier. Le journal japonais Nikkei avait cité Apple et Samsung Electronics dès le mois de juin - article ici. Les noms d'Intel, d'Amazon et surtout de Nvidia, qui avait été empêché de racheter Arm par les autorités antitrust l'année dernière, circulent aussi. Reste à connaître la fourchette de prix précise, qui permettra d'analyser de manière plus méticuleuse le dossier. Les analystes tablaient en début d’année sur une valorisation avoisinant les 30 milliards de dollars, soit environ le prix d’acquisition de 2016. Depuis, ce montant a, peut-être, doublé. A défaut de résultats en hausse, la magie de l'IA est passée par là.