Pour la première fois depuis trente ans, la conférence de presse post-législative du Premier ministre a été annulée, e qui constitue un signe clair de cette évolution. La loi organique du Conseil des affaires de l'État, amendée pour la première fois depuis 1982, a été adoptée par un vote écrasant de 2 883 voix pour, 8 contre et 9 abstentions, lors de la clôture de la session annuelle du parlement à Pékin. Ces modifications législatives consacrent un transfert de pouvoir accru du gouvernement vers le Parti, conférant à ce dernier une autorité incontestée sur la mise en œuvre des directives étatiques.

Le PCC renforce son emprise

Les articles nouvellement intégrés à la loi soulignent l'impératif pour le Conseil des affaires de l'État de "soutenir résolument l'autorité du Comité central du Parti et sa direction centralisée et unifiée", tout en adhérant à la pensée de Xi Jinping, idéologie officielle du président, qui couvre des domaines aussi variés que la diplomatie et la culture.

Ryan Mitchell, professeur de droit à l'Université de Hong Kong, analyse cette réorganisation de l'autorité exécutive comme un changement significatif. "Bien qu'il ait toujours été clair que le chef du Parti est la figure la plus influente dans la hiérarchie, la répartition exacte des rôles dans l'élaboration et le contrôle de l'exécution des politiques reste souvent nébuleuse", précise-t-il. Li Hongzhong, vice-président du Comité permanent de l'Assemblée nationale populaire, a déclaré la semaine dernière que cette révision vise à "approfondir la réforme des institutions du Parti et de l'État" et à "mettre pleinement en œuvre la Constitution", modifiée en 2018 pour réaffirmer la suprématie du Parti.

Thomas Kellogg, professeur de droit asiatique à l'Université de Georgetown à Washington DC, y voit "un signe supplémentaire que le Parti renforce son contrôle manifeste sur les organes de l'État et souhaite afficher sans équivoque sa pleine autorité".

Un premier ministre amoindri

Depuis son accession au pouvoir en 2012, Xi Jinping a mis en place plusieurs comités centraux du Parti supervisant de multiples ministères et rapportant directement à lui, empiétant parfois sur les politiques économiques et financières, traditionnellement du ressort du Premier ministre. L'année dernière, la Chine a dévoilé une vaste réorganisation gouvernementale, créant une nouvelle entité du Parti pour superviser certains ministères. Peu après, le Conseil des affaires de l'État a également modifié ses règles de fonctionnement pour préciser que le pouvoir décisionnel exécutif réside au sein du Parti.

Depuis l'adoption des nouvelles règles de fonctionnement, le Conseil des affaires de l'État ne tient plus de réunions hebdomadaires, mais se réunit deux ou trois fois par mois. Kellogg interprète également l'annulation de la conférence de presse du Premier ministre comme "un autre exemple de l'érosion des institutions de gouvernance de l'État" au profit du Parti. "Nous sommes toujours en plein cœur de cette transformation pluriannuelle de la structure Parti-État, et il est probable que d'autres changements de ce type sont à prévoir", conclut-il.