Du coup, le programme va être un peu dense ce matin, pour expliquer les forces qui sont en jeu actuellement et qui pourraient modifier la donne pour les mois à venir. Il va même falloir remonter un peu dans le temps, mais pas trop loin, je vous rassure. Prêt ? C'est parti. En grossissant un peu le trait, on peut diviser l'histoire boursière des quatre dernières années en cinq grande phases.

  • D'abord, il y a eu la grande peur du covid, qui a fait plonger les actions ultra-brutalement en mars 2020.
  • Elle a été suivie d'une incroyable phase de hausse des marchés actions jusqu'en fin d'année 2021, alimentée par les sociétés du numérique et la désorganisation des chaînes d'approvisionnement globalisées, qui a permis aux entreprises de gonfler leurs prix de façon spectaculaire sans en subir les conséquences.
  • La troisième phase a couru sur 2022, qui a servi à éliminer une partie des excès, du moins jusqu'en novembre, lorsque les investisseurs ont estimé que le cycle de hausse de taux allait prendre fin.
  • La quatrième phase a démarré avec le rebond qui a suivi et qui a permis de gommer les pertes 2022, en s'accrochant à l'espoir d'une baisse de taux rapide et vigoureuse en 2024.
  • Dernière phase, et phase actuelle, le scénario dominant a pris du plomb dans l'aile début 2024, ce qui n'a pas empêché les indices de signer des records. Pourquoi ? Parce que les investisseurs ont accepté que l'assouplissement monétaire prenne du retard sous deux conditions. Primo, que l'horizon de baisse de taux ne s'éloigne pas trop. Secundo que l'économie (américaine) tienne le choc.

La question qui se pose depuis hier est de savoir si nous allons continuer cette courte phase cinq ou si nous sommes entrés en phase six.

Que s'est-il passé ? L'inflation américaine de janvier n'a pas suivi une trajectoire aussi favorable que prévu. La hausse des prix à la consommation sur un an a certes décéléré de 3,4% à 3,1% entre décembre et janvier, mais les économistes attendaient un coup de frein plus net. Quant à l'inflation de base, elle est restée perchée à 3,9%, alors que les spécialistes la voyaient baisser. Même les économistes plutôt optimistes sur l'évolution des prix reconnaissent que le rapport de janvier est mauvais. Pas au point de tirer des conclusions définitives, mais suffisamment pour que la politique monétaire ne change pas tout de suite. La Fed a d'ailleurs remporté cette manche contre le marché : elle avait mis en garde contre un excès d'optimisme sur le front de la lutte contre l'inflation. On notera quand même que la banque centrale a probablement commis une erreur de communication en décembre, lorsqu'elle a donné un peu trop d'espoirs aux investisseurs. Mais je laisse aux bons connaisseurs de l'institution le soin de faire passer Jerome Powell sous les fourches caudines.

Voilà pour la théorie prospective. Concrètement et à très court terme, la situation a entraîné les mouvements d'engrenages habituels. Qui dit inflation plus élevée que prévu dit politique monétaire moins souple. Donc les rendements obligataires ont bondi, jusqu'à 4,3% par exemple pour le 10 ans US. Le dollar est remonté face aux principales devises, pendant que l'or reculait sous la barre de 2000 USD l'once pour la première fois depuis décembre. L'engrenage a aussi fait tourner les petites roues crantées de l'ampleur et du calendrier de la baisse des taux. Les swaps ne pronostiquent plus que trois ou quatre baisses de taux américains de 25 points de base cette année, dont la première en juin, voire en juillet. Il y a à peine quelques semaines, le marché envisageait sept baisses de taux à partir du mois de mars.

Je reviens à ma question précédente : va-t-on rester en phase cinq, c’est-à-dire avec un marché boursier suffisamment costaud pour se dire "bon OK, les conditions sont moins favorables que prévu, mais le plus important, c'est que les taux baissent d'ici quelques mois". Ou va-t-on entrer en phase six, nettement plus aléatoire, dans laquelle l'angoisse des investisseurs va s'accroître en spéculant sur l'inimaginable : la hausse des prix à la consommation peut-elle repartir vers le haut et foutre par terre l'espoir d'une baisse de taux ? Le marché, qui n'a pas encore la réponse à cette question, s'est un peu crispé, comme en témoigne le bond de l'indice de la peur, le VIX, qui a touché hier soir son plus haut niveau depuis le début du mois de novembre dernier. Les prochaines statistiques liées aux prix vont prendre plus d'importance, à commencer par les prix à la production américains de janvier, annoncés vendredi.

Pendant que les investisseurs doutent, les entreprises continuent à publier leurs résultats. Airbnb aux Etats-Unis hier soir, Sony en Asie ce matin. En Europe, Capgemini, Heineken, EssilorLuxottica, Ahold Delhaize et beaucoup d'autres sont au programme.

En Asie Pacifique, la plupart des marchés qui étaient fermés pour le nouvel an lunaire ont repris du service, à l'exception de la Chine continentale qui ne rouvrira que lundi prochain. A Hong Kong, pour la première séance hebdomadaire, le Hang Seng a connu des hauts et des bas mais semble in fine avoir choisi la hausse (+0,35% en séance). Le Japon, qui était tout feu, tout flamme hier, reperd 0,5% après la résistance du yen face au dollar américain. La devise nipponne ne suit pas le mouvement général parce Masato Kanda, le plus haut responsable de la monnaie japonaise, a prévenu que la glissade récente du yen pourrait forcer les autorités à intervenir. Machine arrière aussi en Corée du Sud (-1%) et en Inde (-0,5%). L'Australie enquille une troisième séance de baisse consécutive en cédant 0,7%. Les indicateurs avancés européens sont baissiers.

Le CAC40 démarre la séance en baisse de 0,2% à 7611 points. Le SMI est stable à 11 140 points. Le Bel20 chute de 0,8% à 3647 points.

Les temps forts économiques du jour

La journée débutera avec l'indice des prix à la consommation au Royaume-Uni (8h00), suivi par la production industrielle de la zone euro (11h00). Aux Etats-Unis, les stocks de brut du Département de l'Energie (DOE) seront connus à 16h30. Tout l'agenda ici.

L'euro recule à 1,071 USD. L'once d'or recule à 1992 USD. Le pétrole est un peu remonté, avec un Brent de Mer du Nord à 82,30 USD le baril et un brut léger américain WTI à 77,55 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans est ferme est passé de 4,18% à 4,31%. Le bitcoin s'échange à 49 540 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adyen N.v. : Goldman Sachs maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 1600 à 2000 EUR.
  • Ald : JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 8,20 à 7,60 EUR.
  • Arcelormittal : Landesbank Baden-Wuerttemberg maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 23 à 27 EUR.
  • Basf Se : Societe Generale passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 45 à 54 EUR.
  • Bytes Technology Group Plc : Jefferies passe d'achat à conserver avec un objectif de cours de 670 GBX.
  • Compugroup Medical : BNP Paribas Exane passe de surperformance à neutre avec un objectif de cours réduit de 49 à 36 EUR.
  • Crest Nicholson Holdings Plc : Panmure Gordon & Co. Limited démarre le suivi à l'achat avec un objectif de cours de 1260 GBX.
  • Crédit Agricole S.a. : Goldman Sachs maintient sa recommandation de vente avec un objectif de cours réduit de 12,20 à 12 EUR.
  • Discoverie Group Plc : RBC Capital démarre le suivi avec une recommandation de performance de secteur et un objectif de cours de 760 GBX.
  • Ipsos : Société Générale maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 60 à 80 EUR.
  • Kering : Citigroup maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 555 à 525 EUR. HSBC maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 420 à 440 EUR. RBC Capital maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 500 à 480 EUR.
  • Michelin (Cgde) : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer et relève l'objectif de cours de 36 à 37 EUR.
  • Oriola Oyj : Carnegie Group passe de acheter à conserver avec un objectif de cours réduit de 1,30 EUR à 1,15 EUR.
  • Raisio Plc : Inderes passe d'accumuler à acheter avec un objectif de cours de 2,30 EUR.
  • Redcare Pharmacy Nv : Morgan Stanley démarre le suivi avec une recommandation de pondération de marché et un objectif de cours de 133 EUR.
  • Rémy Cointreau : Goldman Sachs maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 133 à 128 EUR.
  • Safran : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 165 à 160 EUR.
  • Technogym S.p.a. : William O'Neil reprend le suivi à l'achat.
  • Tikehau Capital : Goldman Sachs démarre le suivi à neutre avec un objectif de cours de 22,80 EUR.
  • Withsecure Oyj : Inderes passe d'accumuler à alléger avec un objectif de cours relevé de 1,10 EUR à 1,30 EUR.
  • Wizz Air Holdings Plc : Deutsche Bank passe de vendre à conserver avec un objectif de cours relevé de 1800 GBX à 2300 GBX.
  • Worldline : Goldman Sachs maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 17 à 14,60 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Capgemini améliore sa marge 2023 à 13,3% et veut faire aussi bien, voire mieux, cette année, dans un contexte de croissance ralentie.
  • Carmila publie une hausse de ses revenus locatifs annuels et prévoit une année de croissance en 2024.
  • M6 Métropole Télévision a publié des résultats en demi-teinte et annonce le départ de Nicolas de Tavernost.
  • Vicat vise un EBITDA 2024 en hausse.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Les syndicats d'Alstom craignent 293 suppressions de postes en France.
  • Ipsen reçoit l’approbation de la FDA pour le schéma thérapeutique incluant Onivyde, un potentiel nouveau traitement de référence en première ligne dans l'adénocarcinome du pancréas métastatique.
  • Gaztransport & Technigaz signe un contrat pour la conception de huit cuves de méthaniers.
  • BOA Concept et Katoen Natie collaborent sur un nouveau projet.
  • Roctool boucle l'augmentation de capital réservée à ENRX à 1,80 EUR l'action.
  • JCDecaux lance la première offre programmatique DOOH internationale dans les aéroports.
  • Don't Nod et Focus Entertainment lancent le jeu "Banishers: Ghosts of New Eden".
  • Marie Brizard réduit la taille de son conseil d'administration.
  • Les principales publications du jour : Haulotte, Poujoulat, SII, Linedata...

Dans le vaste monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres, sauf pour les échanges post-séance aux Etats-Unis, qui reflètent normalement bien la tendance)

  • ABN Amro affiche un revenu net d'intérêt légèrement supérieur au quatrième trimestre.
  • Ahold Delhaize prévoit une performance 2024 proche de celle de 2023.
  • Airbnb perd 4% hors séance après ses trimestriels.
  • Akamai perd 3,5% hors séance après ses trimestriels.
  • Coca-Cola Hellenic annonce un bénéfice record.
  • Delivery Hero estime que sa génération de flux de trésorerie sera suffisante pour régler les échéances des obligations et de la dette.
  • Finnair affiche un bénéfice annuel conforme aux attentes.
  • Heineken publie une croissance organique annuelle de 5,5%, légèrement inférieure aux attentes.
  • Lyft flambe de 16% hors séance après ses trimestriels. Le titre s'était envolé un temps de 70% après une erreur grossière dans les perspectives, corrigée par la société dans la foulée.
  • Mapfre publie un bénéfice net 2023 en hausse de 20%.
  • MGM perd 4% hors séance après ses trimestriels.
  • Norsk Hydro publie sous les attentes.
  • Robinhood gagne 10% hors séance après ses trimestriels.
  • Schindler affiche un bénéfice et un chiffre d'affaires en hausse pour l'exercice 2023.
  • Severn Trent maintient ses prévisions annuelles.
  • Sony publie en ligne avec les attentes et prévoir de faire coter sa division financière en bourse en 2025.
  • ThyssenKrupp revoit à la baisse ses prévisions de chiffre d'affaires et de bénéfice net en raison de l'affaiblissement de la demande.

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures