Pourquoi cet engouement alors que les résultats des entreprises devraient reculer sous le poids du ralentissement économique ? Parce que deux statistiques publiées cette semaine montrent que la modération de l'inflation aux Etats-Unis est allée au-delà de ce qui était prévu. Les prix à la consommation et les prix à la production de juin sont ressortis inférieurs aux projections. Comme le moteur numéro un de la performance boursière est la trajectoire de la politique monétaire, le marché estime disposer désormais des preuves suffisantes en faveur d'une fin du cycle de relèvement des taux de la banque centrale américaine. Ce qui lui permet de décréter que la hausse des actions peut continuer. Et accessoirement d'entériner qu'il a eu raison contre la Fed sur la modération des prix. Une Fed qui avait tardé à réagir aux premiers signaux de surchauffe (on se rappelle la série de déclarations sur une "inflation transitoire") et qui semble peiner à siffler la fin de la période de tensions.

Ça c'est l'image un peu simpliste du moment. La réalité est sûrement plus complexe et on en reparlera si l'inflation reste durablement supérieure aux objectifs économiques, ou si elle réaccélère. N'empêche que la vision des investisseurs depuis quelques semaines est : l'inflation n'est plus un problème. Conséquences ? Les ours, les baissiers, sont forcés d'entrer en hibernation et les taureaux, les haussiers, paradent. Comme un symbole, James Bullard va quitter le paysage. Le vieux faucon de la Fed de Saint-Louis, sans doute le plus orthodoxe des banquiers centraux américains actuels, a démissionné avec effet immédiat pour entrer dans le monde universitaire. Il n'aura plus le droit de faire de discours officiels en faveur d'une hausse de taux. Je ne dis pas qu'il a jeté l'éponge devant le refus du marché de souscrire à ses théories, juste que son départ intervient au moment dramatiquement approprié.

Dans ces périodes de douce euphorie, le niveau de complaisance a tendance à monter en flèche sur les marchés actions. Et force est de constater que les éléments susceptibles de faire dérailler l'histoire que le tout le monde se raconte ne sont pas légion. Les investisseurs sont prêts à encaisser une économie chinoise qui va clopin-clopant, une guerre est-ouest larvée ou un rapport nord-sud bouleversé. Ils sont même d'accord pour subir une hausse de taux de plus en provenance de la Fed en juillet. Après tout, la banque centrale doit rester droite dans ses bottes et devrait continuer à déclarer que, non, l'inflation n'est pas encore sous contrôle tant que les braises sont là.

A très court terme, s'il fallait trouver un motif pour gâcher la fin de semaine des investisseurs, il faudrait sans doute mettre une petite pièce sur les résultats qui sont attendus à la mi-journée aux Etats-Unis. Ceux de UnitedHealth d'abord, le pilier du Dow Jones, mais surtout ceux des banques qui suivront (JPMorgan Chase, Citigroup et State Street), parce que le secteur financier est au cœur des tiraillements des taux élevés : il gagne d'un côté (hausse des marchés, marges sur taux…) mais peut perdre gros de l'autre (portefeuilles obligataires, créances douteuses…). Les anticipations ne laissent toutefois pas entrevoir d'accident industriel, mais c'est un facteur de vigilance. En Europe, le luxe trouvera un indicateur avancé avec les résultats et les prévisions relevées de Brunello Cucinelli, pendant que Nokia et Ericsson soufflent le chaud et le froid.

Pour le reste, les dynamiques à l'œuvre récemment se poursuivent : le dollar est sous pression partout. Le billet vert souffre d'autant plus qu'il a longtemps résisté aux prophéties sur sa baisse au cours des derniers mois. Cette fois, quelques digues ont lâché. Le rendement des obligations d'Etat américaines poursuit son reflux. En Chine, le marché attend à nouveau des mesures de soutien en faveur de l'économie. J'ai l'impression d'avoir écrit ça 30 fois en deux ans. Je vous colle là un commentaire chipé sur Bloomberg ce matin. C'est un stratégiste Asie d'Invesco qui parle au sujet de la Chine. Il dit "Nous allons avoir davantage d'incitations fiscales, davantage de soutien fiscal de la part du gouvernement et je pense que cela pourrait potentiellement enflammer les esprits animaux en Chine. Une grande partie du pessimisme concernant les actions chinoises semble être exagéré à ces niveaux." Je vous cite ce commentaire parce qu'il est très pratique. Il aurait pu servir il y a deux mois, il y a six mois ou il y a deux ans. D'ailleurs je le garde sous le coude, je m'en resservirai peut-être à l'automne.

Dans le reste de l'actualité, deux gros titres se détachent dans la presse du jour. D'abord l'enquête ouverte par les autorités de régulation américaines sur OpenAI et plus généralement les risques liés à l'IA. La FTC veut examiner si OpenAI s'est livrée à des pratiques déloyales ou trompeuses sur les données et la vie privée, et si ChatGPT n'a pas lésé des individus en apportant des réponses erronées. Le débat ne fait que commencer. Autre sujet omniprésent ce matin, le classement de l'aspartame dans la liste des cancérigènes potentiels par l'OMS. Il figure en gros titres dans les médias anglo-saxons et européens.

La fin de semaine est plutôt favorable en Asie-Pacifique. En dépit de sept jours de hausse pour le yen, le marché japonais gagne encore du terrain ce matin : +0,16% pour le Nikkei 225, qui apprécie d'habitude la faiblesse de la devise domestique. Les places chinoises sont en progression modérée, tandis que la Corée du Sud et Taiwan suivent le mouvement des technologiques américaines en s'adjugeant plus de 1%. Sydney termine fort elle aussi, avec un ASX 200 à +0,9%. Les indicateurs avancés européens sont indécis. Le CAC40 glanait 0,1% à 7378 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

La principale statistique du jour, l'indice de confiance des consommateurs de l'Université du Michigan, sera publiée à 16h00. Tout l'agenda ici.

L'euro monte encore à 1,1241 USD. L'once d'or se négocie 1962 USD. Le pétrole reste ferme, avec un Brent de Mer du Nord à 81,42 USD le baril et un brut léger américain WTI à 76,86 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans baisse à 3,76%. Le bitcoin se négocie autour de 31 400 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Aker BP : SEB passe de conserver à acheter en visant 290 NOK.
  • Anglo American : J.P. Morgan reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 3150 à 2800 GBp.
  • Antofagasta : J.P. Morgan reste à souspondérer avec un objectif de cours réduit de 1230 à 1140 GBp.
  • Barry Callebaut : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 2400 à 2250 CHF.
  • BASF : LBBW reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 54 à 52 EUR.
  • Banco Santander : KBW reste la performance de marché avec un objectif de cours relevé de 4,26 à 4,44 EUR.
  • BBVA : KBW reste la performance de marché avec un objectif de cours relevé de 8,63 à 8,96 EUR.
  • Beijer : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 175 SEK.
  • Boliden : J.P. Morgan reste à souspondérer avec un objectif de cours réduit de 335 à 300 SEK.
  • Brenntag : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 66 EUR.
  • Crédit Agricole : Goldman Sachs reste neutre avec un objectif de cours réduit de 12 à 11,90 EUR
  • Daimler Truck : Morgan Stanley reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 32 à 41 EUR.
  • Eiffage : Stifel reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 112 à 111,50 EUR.
  • Genmab : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 3320 DKK.
  • GSK : HSBC démarre le suivi à alléger en visant 1190 GBp.
  • Heineken : Goldman Sachs passe de neutre à acheter en visant 118 EUR.
  • Knorr-Bremse : Berenberg passe de conserver à acheter en visant 77 EUR.
  • Kone : Morningstar passe d'acheter à conserver en visant 48 EUR.
  • Lonza : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 742 CHF.
  • MTU Aero Engines : Goldman Sachs reste neutre avec un objectif de cours relevé de 237 à 238 EUR.
  • Nordic Semiconductor : Jefferies démarre le suivi à l'achat en visant 180 NOK.
  • Norsk Hydro : J.P. Morgan reste à souspondérer avec un objectif de cours réduit de 68 à 60 NOK.
  • Novartis : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 100 CHF.
  • Novo Nordisk : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 1250 DKK.
  • Novozymes : Barclays reste à pondération en ligne avec un objectif de cours réduit de 390 à 370 DKK.
  • Rio Tinto : J.P. Morgan reste à souspondérer avec un objectif de cours relevé de 5250 à 5350 GBp.
  • Roche : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 320 CHF.
  • RWE : J.P. Morgan reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 52,50 à 53 EUR.
  • Safran : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 167 à 165 EUR.
  • Sanofi : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 120 EUR.
  • Swatch : J.P. Morgan reste neutre avec un objectif de cours relevé de 305 à 315 CHF.
  • Thales : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 161 à 163 EUR.
  • UCB : HSBC démarre le suivi à l'achat en visant 101 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • François-Henri Pinault, le patron de Kering, serait proche d'une prise de contrôle de l'agence de gestion des droits artistiques CAA pour 7 Mds$, selon Bloomberg.
  • Air France-KLM a signé un accord définitif avec le fonds d'investissement Apollo Global Management qui permettra à la filiale dédiée à l'activité ingénierie et de maintenance (MRO) d'Air France de recevoir un financement en quasi-fonds propres de 500 M€.
  • Nissan va investir 725 M$ dans Ampère, la nouvelle entité électrique de Renault, selon Yomiuri, ce qui pourrait représenter environ 10% de la société.
  • Havas (Vivendi) rachète Uncommon Creative Studio au Royaume-Uni.
  • L'Inde veut acheter 26 Rafale additionnels à Dassault Aviation.
  • Vallourec relève ses prévisions d'Ebitda pour le T2 à 370 M€ et vise désormais 950 M€ à 1,1 Md€ sur l'année (le marché visait 1,02 Md€).
  • Les Bains de Mer de Monaco rachètent le Palace des Neiges à Courchevel 1850.
  • Olympique Lyonnais vend Romain Faivre à Bournemouth pour 15 M€.
  • Predilife obtient 1,6 M€ via l'émission d'une OC.
  • Inertam (Europlasma) signe un contrat avec une société ivoirienne pour du désamiantage.
  • Vinpai réussit son entrée en bourse à Paris.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Bleecker, Corep, Société Marseillaise du Tunnel Prado-Carénage

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Brunello Cucinelli relève ses prévisions de ventes pour 2023 après un solide semestre.
  • Burberry affiche une hausse de 17% de ses revenus au cours des 13 semaines se terminant le 1er juillet. Les objectifs moyen terme sont confirmés.
  • Ericsson a enregistré une baisse de son bénéfice d'exploitation pour le deuxième trimestre 2023.
  • Nokia revoit à la baisse ses prévisions de résultats pour l'ensemble de l'année.
  • Partners Group enregistre une amélioration de ses actifs sous gestion au S1 et confirme ses objectifs.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • La Commission d'Enquête Parlementaire suisse lance une enquête sur la fusion Crédit Suisse-UBS.
  • Un tribunal américain rejette la demande de la FTC de suspendre le rachat d'Activision par Microsoft. En parallèle, les deux groupes songent à vendre une partie de leurs droits sur les jeux en ligne au Royaume-Uni pour emporter la décision de l'antitrust britannique.
  • Les ventes en ligne aux États-Unis lors de l'événement commercial Prime Day d'Amazon ont augmenté de 6,1% à 12,7 Mds$.
  • Barry Callebaut dans le viseur du régulateur boursier suisse pour sa communication financière.
  • Les principales publications du jour : UnitedHealth, JPMorgan Chase, BlackRock, Citigroup, EQT, EMS-Chemie, Ericsson, BurberryTout l'agenda ici.

Lectures