On ne peut pas vraiment parler de rebond, mais plutôt d'une ondulation hier aux Etats-Unis sur les marchés boursiers. Mais elle a fait du bien aux investisseurs, cette petite remontée après trois séances de rechute. Les grosses capitalisations technologiques ont bénéficié de rachats opportunistes, qui ont remis le Nasdaq et le S&P500 dans le sens de la marche. On sent bien que les financiers y vont pour ne pas rater un éventuel moment de retournement, mais ils y vont à reculons. Une partie de leur FOMO, le goût du risque alimenté par la peur de ne pas se goinfrer comme les petits camarades, s'est évaporé ces dernières semaines à mesure que tout devenait un peu plus compliqué à prédire.

De toute façon, il paraissait assez imprudent de miser gros avant la publication aujourd'hui à 14h30 des chiffres de l'inflation en avril aux Etats-Unis. Le courant dominant pense que le pic d'inflation est passé, ce qui constitue un signal positif car personne n'ignore que le chaos sur les prix est à l'origine de pas mal des désordres actuels. Pour autant, le débat risque de se reporter sur le rythme auquel les prix vont s'assagir. On aura l'air malin s'ils mettent trois ans à passer de 8% de hausse annuelle à 2%. Plus précisément dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, l'inflation devrait avoir atteint 0,2% entre mars et avril aux Etats-Unis, soit 8,1% sur un an, selon la moyenne des attentes des économistes. En mars, la variation annuelle était de 8,5%. Le cœur de l'inflation, ou "core inflation" (qui ne comprend pas l'énergie et les aliments), devrait se situer à 0,4% sur un mois et 6% sur un an. Là encore, cette variation était de 6,5% en mars, si bien que le pic serait dépassé.

Se dirige-t-on vers une séance de gros rebond en cas de ralentissement confirmé du rythme de hausse des prix ? Peut-être. Mais cela reviendra à s'appuyer sur une petite nouvelle positive dans une masse d'actualités moins enthousiasmantes. Je vous laisse imaginer le scénario inverse d'une inflation qui ne faiblit pas. Il y a quelques temps, les financiers auraient peut-être spéculé sur le fait que la Fed aurait pu ralentir ses projets de réduction du soutien monétaire en cas de statistique défavorable, mais j'ai l'impression que ce n'est plus l'ambiance : la banque centrale américaine a l'air déterminée à centrer son effort sur l'inflation. D'ailleurs, tous les conditionnels que je viens d'utiliser montrent la difficulté de l'exercice prévisionnel en l'absence d'une boule de cristal de qualité ou d'un lecteur de marc de café compétent.

Bref, pas beaucoup de certitudes en ouverture de cette journée, surtout depuis que le marché a perdu sa cape d'invincibilité. Les investisseurs donnent l'impression depuis quelques temps d'être passés de l'insouciance de la jeunesse à la prudence craintive de l'âge de la maturité. Il y a rarement un juste milieu en finance.

Faute de trouver du réconfort sur les marchés occidentaux, c'est peut-être la Chine qui va réchauffer l'ambiance ce matin. Une baisse des cas de coronavirus dans le pays a réveillé les indices, qui rebondissent assez vigoureusement à Shanghai et à Hong Kong. Juste assez pour sortir Tokyo et Sydney de leur torpeur et pour susciter quelques commentaires positifs dans les médias anglosaxons depuis cette nuit. Un sursaut de la Chine réveille à intervalle régulier la libido des financiers, qui y voient un très bon moyen d'oublier la stagflation, la guerre en Ukraine ou le retard de livraison de leur Tesla.

Dans le reste de l'actualité, le yoyo pourrait continuer sur le prix du gaz naturel en Europe, alors que l'approvisionnement via l'un des gazoducs qui traverse l'Ukraine devrait cesser aujourd'hui à cause de perturbations attribuées aux forces russes par l'opérateur du réseau ukrainien. On a beau s'entretuer, le gaz continue à circuler. Boris Johnson a prévenu les Britanniques que son gouvernement a peu de leviers pour contrer la hausse des prix. Un discours de vérité que d'autres gouvernements européens seront bientôt forcés d'adopter, même si les courbes d'inflation s'aplatissent. En Europe justement, la Bundesbank a appelé à une hausse de taux de la BCE dès le mois de juillet. La banque centrale allemande est connue pour être la gardienne de l'orthodoxie monétaire face aux approches plus souples – je suis tenté de dire latines - de certaines de ses homologues. Le débat sur les prix enfle aussi de ce côté-ci de l'Atlantique.

Côté entreprises, Philip Morris a officialisé un projet de rachat amical de Swedish Match pour près de 16 milliards d'euros. Les publications de résultats d'entreprises se poursuivent avec des déceptions pour Toyota, rattrapé par la hausse des coûts et des relèvements d'objectifs pour Pirelli (pneumatiques) et ThyssenKrupp (acier). Alstom, Alcon ou Eiffage sont aussi parmi les sociétés qui ont publié.

Les indicateurs avancés européens pointent vers une hausse à l'ouverture ce matin, ce qui permettrait de rattraper une partie des gains effacés hier en fin de parcours. Pour le reste, c'est à 14h30 que ça se passe. Le CAC40 gagnait 1,1% à 6185 points à l'ouverture. 

Les temps forts économiques du jour

Plusieurs annonces de prix à la consommation aujourd'hui, mais la plus suivie de toute sera l'inflation américaine d'avril, annoncée à 14h30. Tout l'agenda "macro" ici. Ce matin, la Chine a fait état de prix à la consommation et à la production en hausses supérieures aux attentes.

L'euro se maintient autour de 1,0535 USD. L'once d'or baisse à 1838 USD. Le pétrole reste sous pression, avec un Brent de Mer du Nord à 103,88 USD le baril et un brut léger américain WTI à 100,59 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans recule encore à 2,99%. Le bitcoin a repris un peu de poil de la bête à 31 200 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Allgeier : Baader Helvea passe d'accumuler à acheter en visant 51 EUR.
  • Bayer : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 74 à 76 EUR.
  • Crédit Suisse : Berenberg passe d'acheter à conserver en visant 8 CHF.
  • EMS-Chemie : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 1100 à 975 CHF.
  • Gecina : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 110 EUR.
  • Gerresheimer : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 109 à 97 EUR.
  • International Consolidated Airlines : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 150 à 135 GBp.
  • Kindred : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 154 à 123 SEK.
  • Link Mobility : Jefferies reste à l'achat avec un objectif réduit de 34 à 19 NOK.
  • Subsea 7 : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 77 à 102 NOK.
  • Swedbank : AlphaValue passe d'alléger à accumuler en visant 169 SEK.
  • Telia : Berenberg passe de vendre à conserver en visant 40 SEK.
  • Watches of Switzerland : Goldman Sachs passe de neutre à l'achat en visant 1330 GBp.

En France

  • Alstom : le groupe accuse 173 M€ de pertes à l'issue de l'exercice clos le 31 mars dernier, avec de la consommation de trésorerie. Les objectifs 2025 sont confirmés avec un carnet de commandes record.
  • Eiffage : les revenus du T1 ont progressé de 10% à 4,4 Mds€. Les objectifs sont confirmés.
  • Elis : le groupe affiche une croissance organique de 24% au T1 et confirme ses objectifs avec une "confiance renforcée".

Annonces importantes (et moins importantes)

Dans le monde

Résultats des sociétés

  • Alcon : les revenus du T1 sont en hausse de 18% à changes constants et les marges sont en hausse, au-dessus du consensus. Les prévisions sont revues en hausse.
  • Coinbase : le titre plonge de 15% post-séance après des revenus inférieurs aux attentes.
  • Pirelli : les prévisions 2022 sont relevés après les résultats du T1.
  • Roblox : le titre perd 4,4% post-séance après des trimestriels plutôt conformes aux prévisions.
  • Salvatore Ferragamo : la marque de luxe italienne a dépassé les attentes au T1, mais doit subir un ralentissement en Chine.
  • ThyssenKrupp : les prévisions sont relevées sur l'année pour les résultats et les revenus.
  • Toyota : le constructeur réduit significativement ses prévisions de résultats annuels.

Annonces importantes (et autres)

  • Philip Morris lance une offre de rachat amicale à 106 SEK par action sur Swedish Match.
  • Le traitement du cancer du poumon de Roche ne répond pas au critère principal d'un essai de phase avancée.
  • L'inénarrable Elon Musk a prévu de revenir sur le bannissement de Donald Trump de Twitter, qu'il juge "oralement erroné".
  • Un Elon Musk qui a indiqué que Tesla pourrait acheter une compagnie minière pour assurer ses approvisionnements.
  • Apple sonne le glas de l'iPod.
  • Electronic Arts et la FIFA mettent fin à 30 ans de partenariat dans le football. FIFA va devenir "EA Sports FC".
  • ASML lance une première émission d'obligations vertes de 527 M$.
  • Intel dévoile de nouvelles puces dans sa gamme de produits Core Mobile.
  • Partners Group a signé avec la société américaine Fortress Investment pour l'achat d'un portefeuille de plus de 2 000 maisons à louer aux Etats-Unis, pour 1 Md$, selon Bloomberg.
  • Des actionnaires d'Hasbro exhortent la société à renouveler son conseil d'administration et à discuter avec le fonds activiste Alta Fox.
  • Ford vend 214 M$ d'actions Rivian.
  • Equinor va vendre ses parts dans deux champs pétrolifères norvégiens à Sval Energi.
  • Le chien de garde britannique de la publicité interdit certaines publicités mobiles Tesco.
  • Pershing Square lance un rachat d'actions de 100 M$ à Londres et à Amsterdam.
  • Le développeur de véhicules électriques américain Canoo manque de liquidités.
  • Principales publications de résultats du jour : Toyota, Walt Disney, Softbank, Takeda, Manulife, Compass, Ahold Delhaize, Genmab, Rivian, Continental, Siemens Energy, MediobancaTout l'agenda ici.

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