"Après le boom des valeurs vertes de l’après Fukushima, le soufflet semble retomber sur le secteur... Comment l’expliquer ?

Les marchés financiers continuent à afficher une volatilité impressionnante. Après avoir progressé de 10% en mars, l’indice solaire (Solex) baisse de 7% sur le mois d’avril. Curieusement la correction est plus forte sur les valeurs asiatiques alors que ce sont les européennes qui avaient le plus monté. Plus inattendue, la chute des grands acteurs de l’éolien du haut de chaîne comme Vestas qui ont perdu en un mois l’équivalent de ce qu’ils avaient gagné le mois précédent. C’est pourquoi nous continuons à privilégier le bas de chaîne (utilities vertes) pour le moment. Je crois que pour apprécier correctement ces évolutions contrastées, il est indispensable de dissocier ce qui ressort du court terme et du long terme.
Jusqu’à la fin avril, il existait un vrai problème de visibilité sur le secteur solaire lié à l’annonce tardive des nouveaux tarifs en Italie (2è marché solaire en Europe), très attendus par les investisseurs. Ce climat d’attentisme a conduit à un gel temporaire des investissements qui devrait encore peser sur les mois à venir. Mais depuis la publication des nouveaux tarifs italiens début mai, les conditions sont de nouveau réunies pour un redémarrage à court terme des investissements. Toute la question est d’avoir le bon timing pour se renforcer sur le secteur juste avant son rebond effectif que nous envisageons au S2 2011. Même configuration du coté de l’éolien où nous approchons du bas de cycle. Un indicateur très important pour nous est l’évolution des capacités installées aux US, à l’origine des surcapacités en 2010. Or depuis le début de l’année, les US ont d’ores et déjà assuré 6GW de nouvelles installations soit plus que sur la totalité de l’année dernière (5 GW) !

Quel a été l’impact des récentes opérations de rachat sur la valorisation boursière du secteur ?

Si le cadre réglementaire reste une source d’incertitude pour les énergies renouvelables à court terme, le secteur peut aujourd’hui s’appuyer sur 2 facteurs de soutien : la poursuite de la hausse du prix du pétrole d’une part, et la dimension spéculative liée à la concentration en cours dans le secteur d’autre part.
Ce que démontrent les récentes opérations d’absorption de EDF EN et Iberdrola Renovables par leur maison mère c’est que, pour ces groupes, les marchés ne pricent pas ces sociétés à leur juste valeur. Ces opérations ont d’ailleurs eu un impact non négligeable sur les autres acteurs cotés, comme EDP Renovables et Enel en « redonnant un prix au secteur ». Même constat pour le rachat par Total de l’un des leaders technologiques américains, Sunpower, qui traduit la confiance du groupe dans le développement du marché solaire aux US mais également la fragilisation de certains acteurs dans la guerre de tranchées sur les prix avec les chinois. D’autres opérations de ce type sont donc envisageables dans les prochains mois à la faveur de multiples de valorisation redevenus très attractifs (en moyenne un PER de 10 fois 2011 pour le solaire).
La volonté politique réaffirmée de l’Allemagne de sortir totalement du nucléaire à l’horizon 2022 constitue également un facteur de soutien important pour les énergies alternatives.
Selon une étude publiée par l’Ademe en mai, 88% des acteurs de la finance pensent que les risques liés au changement climatique et au carbone devraient être mieux pris en compte dans l’analyse financière mais seulement 24% les intègrent dans leurs portefeuilles. Ce qui laisse une belle de manœuvre pour la valorisation des énergies renouvelables...

Selon le dernier rapport du GIEC, les énergies renouvelables pourraient représenter jusqu’à 80% de l’approvisionnement énergétique mondial d'ici 2050. Qu'en pensez-vous?

Cette étude souligne la marge de manœuvre très importante pour les énergies renouvelables qui ne représentaient que 12,9% de la production d’énergie primaire en 2008 et une sous exploitation criante du potentiel technique de la ressource qui permettrait largement de subvenir à la demande énergétique mondiale actuelle avec un coût social très acceptable. Le problème n’est pas tant le potentiel de croissance des énergies renouvelables que l’endettement des états...
Toutefois, comme le souligne le rapport du GIEC: « La part des énergies renouvelables devrait augmenter même en l’absence de nouvelles mesures propices...» sous l’effet mécanique des baisses des coûts de production et de la hausse du prix des énergies fossiles. Le principal frein reste le stockage et distribution de cette énergie ce qui va stimuler la construction d’infrastructures électriques pour leur raccordement au réseau.




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