Bombay (awp/afp) - La Banque centrale indienne a laissé jeudi son principal taux directeur inchangé, mais révisé fortement à la baisse la prévision de croissance annuelle du pays, à 5%, au moment où le gouvernement est déjà sous pression pour relancer l'économie.

Défiant les anticipations d'une sixième baisse consécutive cette année, la Reserve Bank of India (RBI) a laissé inchangé son taux de refinancement, celui auquel elle prête aux banques commerciales, à 5,15%, son plus bas niveau depuis neuf ans.

En revanche, elle a fortement abaissé sa prévision de croissance annuelle (de mars à mars), de 6,1 % à 5%, arguant de la contraction de la demande intérieure et de l'activité manufacturière.

Le taux de croissance de ce pays de 1,3 milliard d'habitants a connu sa plus forte décélération en plus de six ans entre juillet et septembre, passant de 7,0% il y a un an à 4,5%, selon les données gouvernementales.

Bien qu'élevé selon les normes occidentales, ce chiffre est bien en deçà du niveau nécessaire pour que l'Inde puisse fournir les millions d'emplois nécessaires aux nouveaux arrivants sur le marché du travail chaque année, ce qui représente un casse-tête majeur pour le Premier ministre Narendra Modi.

l'OCDE plus optimiste

Le gouverneur de la RBI, Shaktikanta Das, a justifié cette décision par le fait que l'inflation risque de rester élevée jusqu'en mars 2020. "Nous devons prendre le temps de voir l'impact des mesures gouvernementales et des baisses de taux précédentes, c'est pourquoi nous avons décidé d'attendre et de faire une pause ", a-t-il expliqué à des journalistes.

La ministre des Finances, Nirmala Sitharaman, a annoncé une série de réformes, notamment l'assouplissement des restrictions à l'investissement étranger dans des secteurs clés, une baisse de l'impôt sur les sociétés et le lancement d'une campagne de privatisations visant à ressusciter des entreprises publiques moribondes.

Mais ces mesures ont échoué jusqu'à présent à restaurer la confiance, affirment les économistes. Et la demande générale, des céréales aux voitures, a chuté au moment où le chômage a atteint son plus haut niveau depuis quatre décennies.

Considéré comme un allié de Modi, le gouverneur a baissé les taux d'intérêt cinq fois de suite depuis février 2019, les réduisant de 135 points de base. Mais les banques, criblées de dette, n'ont pas répercuté cette baisse sur les consommateurs. Le manque de crédit, conjugué à l'effondrement du secteur bancaire officieux de l'Inde, a précipité la crise, selon les analystes.

"Dans un contexte de ralentissement de la croissance, la baisse des taux de la RBI n'a pas fait de grande différence", estime Garima Kapoor, économiste chez Elara Capital. "La RBI doit s'assurer que son cycle massif de réduction des taux entraîne une baisse des taux pour les consommateurs", a-t-elle déclaré à l'AFP.

Pour sa part, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s'est montrée jeudi plus optimiste, tablant sur une croissance annuelle de 6,2% en 2020. Mais l'économiste en chef de l'OCDE, Laurence Boone, a exhorté New Delhi à "continuer à lever les barrières commerciales pour générer les investissements et les emplois dont l'Inde a besoin afin de relever le niveau de vie dans tout le pays".

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