POURQUOI L'EQUATEUR EST-IL ENTRE DANS L'AMBASSADE DU MEXIQUE ?

Des policiers lourdement armés et cagoulés ont fait irruption dans l'ambassade du Mexique tard dans la nuit de vendredi à samedi pour arrêter Jorge Glas, l'ancien vice-président de gauche de l'Équateur, qui est recherché pour corruption.

Jorge Glas vit dans l'ambassade depuis décembre, après avoir demandé l'asile au pays nord-américain, ce que le Mexique ne lui a accordé que vendredi.

L'Équateur, qui a demandé au Mexique l'autorisation d'entrer dans l'ambassade au début du mois de mars pour détenir M. Glas, soutient que l'offre d'asile était illégale car, en vertu du droit international, les personnes faisant l'objet d'accusations ne devraient pas se voir accorder l'asile.

Le Mexique, dont le président Andres Manuel Lopez Obrador a immédiatement suspendu ses relations avec l'Équateur après la descente de police, a déclaré avoir étudié de près le cas de M. Glas.

L'arrestation est venue couronner une semaine de tensions croissantes entre les deux pays d'Amérique latine, après que Quito a déclaré l'ambassadeur mexicain persona non grata, citant des commentaires "malheureux" de M. Lopez Obrador, un homme de gauche.

Le président mexicain avait comparé la violence liée aux élections dans les deux pays, alléguant que le meurtre du candidat présidentiel équatorien Fernando Villavicencio l'année dernière était injustement lié au candidat de gauche dans la course, qui a ensuite perdu. M. Lopez Obrador a également accusé les médias, qu'il a qualifiés de corrompus, d'être à l'origine de ce qu'il a décrit comme une manipulation des élections.

Les médias ont souvent été la cible de l'ire de M. Lopez Obrador au cours de ses presque six années au pouvoir.

QUI EST JORGE GLAS ET QUELLES SONT LES CHARGES RETENUES CONTRE LUI ?

Jorge Glas, qui a été vice-président sous le gouvernement de Rafael Correa entre 2013 et 2017, a été condamné à deux reprises dans des affaires de corruption et fait aujourd'hui l'objet de nouvelles accusations d'utilisation abusive de ressources publiques.

Il a d'abord été condamné à six ans de prison fin 2017 après qu'un tribunal l'a reconnu coupable d'avoir accepté des pots-de-vin de la part de l'entreprise de construction brésilienne Odebrecht en échange de l'attribution de contrats publics à cette société ébranlée par le scandale.

M. Glas, 54 ans, a de nouveau été reconnu coupable en 2020 d'avoir utilisé l'argent des entrepreneurs pour financer les campagnes du mouvement politique de M. Correa et a été condamné à une peine de huit ans.

M. Correa, qui vit en Belgique depuis qu'il a quitté ses fonctions, a été condamné dans la même affaire.

Les deux hommes affirment depuis longtemps que les accusations sont motivées par des considérations politiques, ce que les procureurs ont démenti.

M. Glas a passé plus de quatre ans en prison avant d'être libéré en 2022, pour être à nouveau incarcéré la même année, après qu'un tribunal a jugé qu'il devait purger le reste de ses peines, alors que ses avocats avaient demandé qu'il les purge simultanément et qu'il bénéficie d'une libération conditionnelle.

Il a été libéré pour la dernière fois en novembre 2022, mais Glas fait face à de nouvelles accusations de détournement de fonds collectés pour aider à la reconstruction de la province côtière de Manabi après un tremblement de terre dévastateur en 2016.

En décembre, ses avocats ont fait appel de la décision d'un juge de le renvoyer en prison, arguant que sa vie pouvait être en danger, mais l'appel a été rejeté.

QUELLE A ÉTÉ LA RÉACTION DE LA RÉGION ?

Samedi, tous les gouvernements d'Amérique latine, y compris le Brésil et la Colombie (gauche), et l'Argentine et l'Uruguay (droite), ont vivement critiqué l'arrestation de M. Glas.

Le gouvernement brésilien a condamné l'action de l'Équateur comme une "violation claire" des normes internationales interdisant une telle descente dans une ambassade étrangère, tandis que l'Argentine a appelé au respect de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.

QU'EST-CE QUE LA SUITE ?

Le ministère mexicain des affaires étrangères a indiqué qu'il déposerait une plainte auprès de la Cour internationale de justice des Nations unies, tandis que le gouvernement du président colombien de gauche Gustavo Petro a déclaré qu'il demanderait à la Commission interaméricaine des droits de l'homme de protéger les droits de M. Glas, affirmant que son droit d'asile avait été "barbarement violé".

L'Organisation des États américains, basée à Washington, a déclaré qu'une session du conseil permanent de l'organisation serait convoquée pour discuter de la nécessité d'un respect strict des traités internationaux.