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(Easybourse.com) Quelle est la performance de votre fonds ?
Depuis le début de l'année, notre fonds est à +6,6%, tandis que notre indice marché de référence, le DJ Eurostoxx50, est à -3,0%, nous sommes donc à +9,6% de différentiel positif, sachant que la valeur de la part est à 152.6€, soit une valeur légèrement supérieure à celle d'origine, il y a 4 ans et demi quand nous avons lancé le fonds (150€ le 14/10/2005). Entre-temps, le marché a perdu près de 15%.

Pourriez-vous nous détailler les deux critères de sélection de votre fonds…
Le fonds « Valeurs féminines » investit dans une tendance de fond caractérisée par l'augmentation de l'influence de la femme dans toutes les sphères de l'activité économique. A partir de cette idée initiale, nous avons effectivement décidé d'investir sur la base de deux critères :
-le premier concerne les sociétés à management féminin, c'est-à-dire les sociétés dirigées par des femmes ou dont la présence de femmes au sein des instances de direction est significative, soit 20% au minimum.
-le second critère concerne les secteurs et sous-secteurs dont l'acte d'achat est à forte connotation féminine (luxe, cosmétiques, parfum, textile, lingerie, agroalimentaire et services). L'échantillon de valeurs est relativement large puisqu'il y a entre 400 et 500 valeurs en Europe.

Concernant le premier critère d'investissement, nous nous appuyons sur un certain nombre de fondements économiques ou de convictions fortes. Ainsi, nous estimons que la mixité est un facteur de performance. Les entreprises ont en effet besoin de plus en plus d'innovations et de créativité afin d'être performantes et compétitives, or une des sources de diversité, c'est la mixité qui constitue de ce fait un facteur de richesse et de création de valeur.

Concrètement, les femmes contribuent à l'amélioration des performances des entreprises en apportant des qualités complémentaires et différentes par rapport à un homme.

Par ailleurs, nous nous appuyons sur des études statistiques qui ont démontré l'existence d'une corrélation positive entre la présence de femmes au sein des instances de direction et la performance des entreprises. Ainsi, selon une étude publiée aux Etats-Unis par le cabinet Catalyst, qui mesure la rentabilité en fonction de plusieurs ratios, la performance des entreprises est bien supérieure pour celles qui sont dirigées par des femmes ou dont les instances de direction sont féminisées.

En Europe, le même type d'étude a été réalisé par le cabinet McKinsey, sur les entreprises du DJ EuroStoXX 600. Enfin le dernier fondement économique, sur le critère d'investissement management féminin, concerne le biais de sélection que nous estimons être un élément de motivation supplémentaire pour la femme. C'est-à-dire que pour briser le «plafond de verre» et être recrutée à un poste de direction, la femme doit généralement montrer des qualités supérieures par rapport à un homme, à compétence équivalente.

Combien d'entreprises françaises détenez-vous dans ce fonds ? Avez-vous observez une évolution de cette proportion depuis la création du fonds ?
Nous observons une évolution dans le bon sens mais qui reste très progressive. Là où il y a effectivement des évolutions notables, c'est en général parce que certains Etats imposent des quotas comme ce fut le cas en Norvège et en Espagne par exemple.

Nous croyons au fait que les hommes, chefs d'entreprise, prennent conscience que la femme apporte des qualités complémentaires et différentes, et que cela est créateur de richesse pour l'entreprise et, indirectement, pour le cours de bourse, sur le long terme bien sûr.

Dans le détail, nous détenons 38 valeurs dans notre portefeuille, et parmi elles, il y en a 19 d'origine française, ce qui équivaut à plus de 50% du portefeuille. Enfin, 11 de ces 19 entreprises ont un management féminin, dont Areva, Pernod Ricard, Pierre & Vacances, Publicis, Rémy Cointreau, Sodexo, etc.

Nous considérons donc qu'il existe, non pas un lien de causalité, mais une véritable corrélation positive entre la performance des entreprises et la présence de femmes dans les instances de direction. Cela étant, à partir du moment où nous disposons d'un échantillon de valeurs, nous les analysons d'un point de vue quantitatif et qualitatif puis nous prenons position. Ce n'est donc pas parce qu'une entreprise est dirigée par une femme que nous l'intégrons directement dans le fonds !

Pourriez-vous nous détailler  le critère d'investissement qui concerne les secteurs où l'acte d'achat est à forte connotation féminine ? Quelle part représente-t-il dans votre portefeuille ?
Historiquement, nous avons toujours construit notre portefeuille de titres avec 60 à 70% de valeurs correspondant à des sociétés à management féminin, sachant que nous en avons identifié une centaine en Europe.

Cela étant, le second critère, qui représente donc environ 1/3 de nos titres, nous permet de diversifier notre portefeuille avec des sociétés cycliques donc liées à l'acte d'achat. Nous mettons certes en avant le premier critère, mais le second rentre tout de même dans la thématique de fond, à savoir l'augmentation de la présence féminine dans toutes les sphères de l'activité économique. Autrement dit, nous mettons en avant, dans le second critère, le poids décisionnaire de la femme qui est d'ailleurs élevé puisque ces dernières sont à l'origine de 80% des dépenses des ménages.

A quoi on peut également ajouter le fait que, au niveau du pouvoir d'achat des ménages, nous constatons une augmentation liée notamment à l'évolution positive du taux d'activité des femmes, qui est passée de 50 à 65% au cours des 30 dernières années.

Avez-vous observé des changements de perception de certains secteurs qui, au départ plutôt «masculins», deviendraient «féminins», ou inversement ?
Oui, par exemple avec les cosmétiques. Néanmoins, ce n'est qu'une tendance, dans la mesure où les produits destinés aux hommes restent encore très minoritaires. Il est toutefois intéressant de discuter avec des entreprises de cosmétiques, type Clarins, qui se développent pour des produits masculins et qui misent de ce fait, sur de nouveaux relais de croissance…

Que pensez-vous de la proposition de loi visant à assurer la parité hommes/femmes dans les conseils d'administration ?
Ma position sur les quotas est très claire : je sais, et nous l'avons vu par le passé, qu'imposer par une loi l'obligation pour les entreprises de recruter un certain nombre de femmes dans leurs conseils de direction, est la seule solution pour changer les choses de manière radicale. Au demeurant toutefois, je trouve dommage de devoir imposer un tel quota parce qu'il devrait être normal qu'une femme soit choisie pour ses compétences, dès lors que celles-ci sont meilleures que celles d'un homme.

Et choisir une femme plutôt qu'un homme, à compétences égales ?
Je préfère cette solution qui est effectivement plus intermédiaire. Maintenant, si vous regardez l'évolution de la présence des femmes dans le management des sociétés au cours des dernières années, vous constaterez qu'elle est faible, mais on en parle de plus en plus !

En définitif, même s'il est effectivement dommage d'imposer des quotas pour avoir une évolution radicale de la représentativité des femmes au sein des conseils d'administration, cela nous permettra aussi d'avoir beaucoup plus d'entreprises dans notre échantillon de valeurs.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy

- 08 Mars 2010 - Copyright © 2006 www.easybourse.com

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