PARIS, 2 février(Reuters) - Les investisseurs pourront reprendre leur souffle ces prochains jours, après une succession d'indicateurs et d'événements de politique monétaire ayant rythmé les marchés.

L'activité en zone euro, les impacts de la crise en mer Rouge sur les matières premières, les réunions de politique monétaire des banques centrales indienne et australienne seront les éléments que surveilleront les investisseurs la semaine prochaine.

1/ La croissance en zone euro en question

Une salve d'indicateurs viendra préciser les projections des investisseurs sur la santé de la zone euro.

Les indicateurs PMI finaux des services et composites pour janvier seront publiés lundi, avec les prix à la production en zone euro pour décembre. Les commandes industrielles allemandes pour décembre seront annoncées mardi, ainsi que les ventes au détail en zone euro. La production industrielle en Allemagne pour décembre sera publiée mercredi, et vendredi sera dévoilée l'inflation définitive en Allemagne pour janvier.

Ces indicateurs seront d'autant plus importants que la zone euro a échappé de peu à la récession au quatrième trimestre 2023, grâce notamment à la performance surprenante des économies espagnole et italienne.

"Pour la zone euro, le pire semble derrière nous", relève Hélène Baudchon, responsable de l'équipe économique OCDE chez BNP Paribas.

"Le ralentissement de l'inflation, couplé à la baisse des taux de la Banque centrale européenne et au dynamisme des salaires dans le bloc, devrait contribuer à un rebond de la consommation, qui soutiendra la croissance en 2024".

La banque table sur une croissance de 0,6% en 2024 pour la zone euro, qui devra s'appuyer notamment sur le moteur de la demande intérieure, le relais de la demande extérieure apparaissant limité par les difficultés de la Chine, affectée par une double crise de confiance des consommateurs et investisseurs, et qui n'aura plus la même capacité d'entraînement de la croissance mondiale.

Pour la croissance européenne en 2024, "l'une des grandes inconnues sera la profondeur des difficultés conjoncturelles et structurelles auxquelles est confrontée l'économie allemande -le marché unique est le premier débouché pour les pays européens", rappelle Hélène Baudchon.

La baisse des taux de la BCE pourrait aussi reporter l'attention des investisseurs des questions monétaires aux questions de soutenabilité de la dette.

"Selon les données de la Commission européenne, la réduction du déficit structurel primaire atteint 0,7 point en moyenne par an de 2022 à 2024 contre 0,9 point de 2011 à 2014. Toutefois, l’environnement de croissance plus positif devrait limiter l’impact de ces efforts sur l’activité", explique Hélène Baudchon.

2/ La géopolitique en embuscade

L'escalade des tensions en mer Rouge a franchi un cap symbolique le 26 janvier, après qu'un pétrolier du courtier en matières premières Trafigura a été touché par un missile tiré par les rebelles Houthis. Si les tensions se sont pour le moment répercutées essentiellement sur les cours du fret, l'énergie pourrait être le prochain secteur affecté.

"Les produits raffinés sont le talon d'Achille de l'inflation européenne, le bloc étant historiquement importateur de distillats", relève l'équipe de recherche matières premières chez Société Générale, qui rappelle que le prix des carburants pèse davantage que celui du brut dans le panier de consommation européen.

La fin des importations de produits russes a rendu la zone euro dépendante des flux transitant par le canal de Suez, alors que les inventaires demeurent proches de leurs plus bas en cinq ans et que la marge de raffinage sur le gasoil est plus de deux fois supérieure à sa moyenne sur les dix dernières années, à 30 dollars par baril, selon des données retraitées par Société Générale - un indicateur que les capacités demeurent contraintes.

En décembre, les pétroliers n'avaient pas annoncé de modifications pour leurs voyages vers l'Europe, mais les groupes du secteur de l'énergie sont de plus en plus nombreux à annoncer transiter par le cap de Bonne Espérance début 2024, ajoute ING.

A court terme, les raffineurs devront s'adapter à des flux de pétrole en baisse à court terme, mais le risque principal tient plutôt à une escalade des tensions dans le détroit d'Ormuz, nuance la banque.

Dans ses dernières prévisions, le FMI table sur une poursuite de combats "intenses" à Gaza sur l'ensemble du premier trimestre.

3/ L'Inde dans le viseur

La prochaine réunion de la banque centrale indienne est attendue jeudi sans surprises: l'institution devrait maintenir ses taux à leurs niveaux actuels. L'événement devrait pourtant attirer l'attention des investisseurs sur le sous-continent, dont les actifs ont été parmi les plus performants des marchés émergents ces dernières années. [urn:newsml:newsroom.refinitiv.com:20190807:nL8N2531OI:0]

Depuis ses niveaux atteints durant le Covid, l'indice Nifty a affiché une surperformance de plus de 50% par rapport aux autres indices émergents, les valorisations retrouvant leurs sommets de 2007, selon des données Datastream.

Le pays a profité du ralentissement de l'économie chinoise, qui a poussé les investisseurs internationaux vers l'Inde: le pays a enregistré 20 milliards de dollars de flux entrants en 2023, contre seulement 8 milliards de dollars pour la Chine.

Les souverains pourraient désormais surperformer à leur tour, alors que le fournisseur d'indice Bloomberg réfléchit à inclure la dette indienne dans ses indices de souverains émergents, JPMorgan ayant décidé en septembre d'inclure les titres indiens à ses indices.

"Nous nous attendons à ce que la demande de souverains progresse, soutenue par des perspectives monétaires plus accommodantes, des liquidités bancaires importantes, et des achats étrangers massifs, à travers les fonds passifs et dans une optique de portage", résument les stratégistes de Bank of America.

4/L'inflation australienne enfin sous contrôle

La prochaine réunion de la Banque centrale d'Australie, mardi, devrait confirmer que l'inflation est enfin revenue sous contrôle, alors que le pays s'est longuement débattu avec une dynamique des prix hors de contrôle qui a érodé la confiance dans la banque centrale.

Le 30 janvier, un indicateur d'inflation plus faible qu'attendu a propulsé les indices australiens à un record, la perspective d'une politique monétaire durablement restrictive ayant écrasé les actifs risqués australiens ces derniers mois.

L'évolution de ces indices dépendra désormais des perspectives économiques chinoises et des projections d'assouplissement des taux aux Etats-Unis, alors que les fondamentaux économiques australiens ne sont pas porteurs. (Rédigé par Corentin Chappron, édité par Sophie Louet)