Zurich (awp) - Le sous-traitant de l'industrie pharmaceutique Lonza a brossé des perspectives moroses pour l'exercice en cours. Privé depuis l'automne du juteux contrat avec Moderna - pour un manque à gagner devisé à un demi-milliard de francs suisses - la multinationale s'apprête à démanteler graduellement d'ici début 2025 des sites de production de substances actives biologiques en Chine et aux Etats-Unis et a d'ores et déjà comptabilisé d'importants coûts pour la restructuration sur l'exercice écoulé.

Le groupe a par ailleurs annoncé le retrait en mai de son président et directeur général par intérim Albert Baehny et la candidature de Jean-Marc Huët pour le remplacer au faîte de l'organe de surveillance.

Sur l'exercice écoulé, la croissance s'est élevée à 7,9%, ou près de 11% hors effets de change, pour un chiffre d'affaires de 6,71 milliards de francs suisses, indique le compte-rendu diffusé vendredi.

L'excédent brut d'exploitation (Ebitda) de base a stagné à pratiquement 2,0 milliards de francs suisses, bridé par une marge afférente élaguée de plus de deux points de pourcentage (pp) à 29,8%. Le bénéfice net a chuté de plus de 45% à 655 millions, grevé par un amortissement de 183 millions et des frais de restructuration de 50 millions pour la fermeture annoncée des sites de Guangzhou et de Hayward.

Le directeur financier Philippe Deecke s'est employé en téléconférence à expliquer l'évaporation de près de moitié de la rentabilité l'an dernier. La base de comparaison avait d'une part bénéficié du produit de désinvestissement. De l'autre, des correctifs de valeur sur les installations devenues inutiles pour la production du vaccin de Moderna sont venus alourdir la facture liée au démantèlement de sites de production en Chine et aux Etats-Unis. Le trésorier a devisé l'ensemble de ces facteurs non-récurrents à 439 millions de francs suisses.

Les actionnaires pourront néanmoins compter sur un dividende de 4,00 francs suisses par titre, agrémenté de 50 centimes par rapport à leur rémunération pour 2022.

Si les recettes et l'excédent brut ajusté comblent largement les attentes du consensus de l'agence AWP, les analystes n'avaient pas anticipé l'impact des démantèlements sur un bénéfice net devisé en moyenne à 920 millions.

Pas de croissance en 2024

Le biochimiste prévoit de faire l'impasse sur toute croissance pour l'exercice en cours et laisse entrevoir une stagnation de sa rentabilité brute ajustée sous les 30% également. La feuille de route à l'horizon 2028 demeure toutefois d'actualité, comprenant une croissance organique annualisée de 11 à 13%, ainsi qu'une marge Ebitda ajustée de 32 à 34%. Le retour sur investissement doit dépasser 10% et l'endettement net s'inscrire dans une fourchette de 1,5 à 2,0 fois l'Ebitda de base.

Les analystes se montrent partagés à la lecture des résultats et des perspectives. Philip Gamper, pour la Banque cantonale de Zurich (ZKB), applaudit des résultats ajustés 2023 sensiblement meilleurs qu'escompté.

Chez Vontobel, Sibylle Bischofberger espère que le prochain président parviendra à ramener l'entreprise vers des eaux moins agitées. L'experte de la banque de gestion zurichoise salue la reconduction des ambitions à moyenne échéance et considère toujours Lonza comme un gagnant à long terme de la tendance à l'externalisation de la production dans l'industrie pharmaceutique, mais estime qu'il faudra du temps pour reconquérir la confiance des investisseurs.

Ceux-ci ont semblé lui donner tort, catapultant à la clôture la nominative Lonza de 14,4% à 423,50 francs suisses, au firmament d'un SMI en hausse de 1,62%.

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