Basé à Munich, le groupe a connu une histoire riche et complexe, longtemps liée à celle de BMW. S'ils veulent remonter loin dans le temps, les amateurs du genre se souviendront que durant la seconde guerre mondiale MTU assurait la propulsion du célèbre chasseur Focke-Wulf 190. 

Dans la seconde moitié du vingtième siècle, il connut ensuite moult restructurations et changements de propriétaires. En 2003, peu après la formation d'EADS, MTU passa entre les mains du fonds de private equity KKR qui joua rapidement la culbute et l'introduisit en bourse deux ans plus tard.  

MTU participe aujourd'hui à la motorisation de nombreux aéronefs militaires : le Tornado, en fin de vie opérationnelle ; l'Eurocopter Tigre ; le transporteur A400M, dont le moteur TP400-D6 reste à date le turbopropulseur le plus puissant jamais conçu ; le  Sikorsky CH-53K ; et demain, il l'espère, le FCAS, autrement dit l'avion de combat européen nouvelle génération, pour l'instant au stade d'étude.

Les 1400 moteurs installés sur le EuroFighter forment la principale source de revenus du segment militaire de MTU. Pour viabiliser cette activité, le programme FCAS doit voir le jour et MTU doit y participer. A terme, cela pourrait représenter une base d'au moins 2000 moteurs installés... Mais ceci paraît bien loin, et en l'état tout est flou.

Dans l'aviation civile, MTU aborde avec confiance un nouveau cycle qui devrait voir sa base de moteurs installés passer de 14 400 en 2022 à plus de 23 100 d'ici 2030. Sur ce segment, c'est le V2500 — installé sur le Airbus A320 — qui représente la principale source de revenus. Celui-ci, rappelons-le, a été développé conjointement par Rolls-Royce, Pratt & Whitney, JAEC, MTU et Fiat Avio.

Ces partenariats industriels sont complexes et les cycles très longs — pour le meilleur comme pour le pire. Cependant l'activité possède des caractéristiques attractives, au moins en théorie : en sus des énormes barrières à l'entrée, la récurrence des revenus assurée par la vente de pièces détachées et les opérations de maintenance assure ainsi une certaine visibilité. 

D'ailleurs, les constructeurs vendent souvent leurs moteurs à perte, puisque c'est via les programmes de maintenance étendus sur plusieurs décennies qu'ils amortissent leurs énormes investissements de R&D et de production. 

Valorisé sur la base d'un multiple de son profit d'exploitation, le groupe s'échange sur des plus-bas à dix ans. Le savoir-faire de MTU recèle bien sûr une immense valeur stratégique, mais celle-ci demeure sans doute plus évidente à percevoir par un industriel que par un actionnaire individuel. 

Son activité demeure en effet très capitalistique. On le réalise en comptant le cash sur un cycle complet : entre 2012 et 2022, MTU a généré €6.6 milliards de cash-flows, mais ses investissements dans son besoin en fonds de roulements et ses immobilisations ont engagé €5 milliards à eux deux.

Ne restait donc que €1.6 milliard de free cash-flow, et en bout ligne un peu moins de €1 milliard distribué en dividendes aux actionnaires. En revanche, il faut saluer le retour sur investissement obtenu sur ces coûteux programmes industriels : ils sont structurellement limités mais bien réels, puisque après un début de cycle anémique MTU réalise en moyenne €300 millions de free cash-flow par an.