Car Chargeurs serait sans doute plus à l'aise éloigné des regards. Le groupe connaît une évolution en demi-teinte depuis sa prise de contrôle par son actuel dirigeant. Certes le chiffre d'affaires est en croissance, mais la profitabilité et la rentabilité reculent, si bien qu'on peine à mesurer la création de valeur des diverses acquisitions. 

Le profit d'exploitation, pour sa part, a diminué de plus d'un tiers sur les trois dernières années, alors que l'endettement net augmentait d'autant. En conséquence, les ratios se solvabilité se dégradent. Voici qui explique la sanction — peut-être trop sévère — du marché.

Cette dernière handicape forcément Chargeurs, qui fait de la croissance externe une priorité et pâtit lorsqu'il n'est pas en mesure d'utiliser son titre comme monnaie d'échange. Il était donc urgent d'envoyer un signal. 

Réputé très soucieux de son image publique, Michaël Fribourg avait toutes les raisons de s'agacer de la piteuse considération du marché pour son groupe. Celle-ci n'était pas entièrement injustifiée, nous l'avons vu, mais il est aussi vrai que les marchés financiers et les industriels se trouvent souvent engagés sur des horizons de temps irréconciliables.  

Si l'objectif de Chargeurs d'atteindre le milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2025 est maintenu, et qu'effectivement le groupe parvient à augmenter son profil de marge — un voeu pour l'instant resté pieu — une OPA à ces niveaux de cours devrait se révéler une très bonne affaire pour M. Fribourg et ses co-actionnaires au sein des holdings Columbus.

Dans une configuration vue et revue mille fois dans le paysage du capitalisme français, l'ancien énarque et inspecteur des finances s'est assuré le concours d'un collège d'investisseurs institutionnels, parmi lesquels de nombreux assureurs. D'aucuns diront qu'on a connu meilleur présage.