Masayoshi Son en fait les frais pour la troisième fois de sa carrière. S'il lui reste un slip de bain, c'est en premier chef grâce à ses deux investissements historiques dans Alibaba et Arm Holdings — et grâce à sa "chutzpah" (une forme d'audace insolente) décidément extraordinaire. 

La valeur de l'investissement dans Alibaba, rappelons-le, a été multipliée par x1300 en l'espace de vingt-trois ans, tandis que Arm sera coté sur le marché américain dans le courant des prochaines mois. Avec les investissements dans les opérateurs SBKK et T-Mobile, ces quatre participations cotées représentent presque la moitié de la valeur nette d'actifs. 

L'autre moitié, c'est le fameux Vision Fund. De $66 milliards de plus-value latente au pic de la pandémie, le fonds est passé à une moins-value latente de $8.5 milliards en 2023. Il est fort probable que la première ait été surgonflée, et la seconde minimisée — cela va sans dire.

"Concentré sur la défense", explique-t-il, Masayoshi Son investissait $15.6 milliards au premier trimestre 2021, en plein pic spéculatif. Sur l'année 2022, les montants investis chutent à $3.2 milliards malgré le dégonflement de la bulle et les valorisations en chute libre. Drôle de sens du timing.

Le président de Softbank délivrait hier à ses actionnaires le genre de présentation épique dont il a le secret. Ce matin, la presse se délecte des meilleures perles, de l'ère des "super-humains" à la determination de Son à "diriger le monde".  Le tout, bien sûr, enrobé d'intelligence artificielle et de quantum computing. 

En attendant, la valeur nette d'actifs de Softbank — théorique et répétons-le très vraisemblablement surgonflée — revient là où elle était il y a dix ans. Son aurait sans doute été bien inspiré de tout liquider pendant la pandémie, puis de partir en vacances. 

C'est aussi ce que pense le marché : la capitalisation boursière de $69 milliards représente une décote de 35% sur la valeur nette d'actifs — théorique — de $105 milliards. Les gargantuesques rachats d'actions — entre $35 et $40 milliards cumulés ces cinq dernières années — n'y ont pour l'instant rien changé.