Capter le CO2 des installations industrielles pour le stocker ou le réutiliser est l'une des armes disponibles dans l'arsenal de lutte contre le réchauffement climatique. Si l'on en croit quelques esprits aiguisés sur la question, c'est même un passage obligé pour toute stratégie globale un peu sérieuse en la matière. Bizarrement, cette technologie a longtemps constitué un angle mort de la lutte contre le réchauffement, écartelée entre des intérêts divergents, son coût et une bonne dose de dogmatisme. Les ingénieurs, eux, maîtrisent déjà bien le procédé, utilisé depuis longtemps dans l'industrie pétrolière, mais plutôt de façon incidente : pour optimiser la production plus que pour des raisons écologiques.

Le process
Les fondamentaux (Source Aker Carbon Capture)

Urgence oblige, le nombre d'installations en service est en train de croître et des dizaines de démonstrateurs sont en cours de test. C'est dans cet environnement qu'évolue Aker Carbon Capture, une société qui fait partie de l'empire de Kjell Inge Røkke, un personnage haut en couleur qui est devenu l'un des hommes les plus riches de Norvège après avoir débuté comme simple pêcheur, nous dit la petite histoire. Via son holding Aker ASA, Røkke règne sur une galaxie d'entreprises qui va des services maritimes au transport de pétrole, en passant par les ingrédients biomarins, la construction navale et même l'édition de logiciels.

Aker Carbon Capture a été scindée d'Aker Solutions et introduite en bourse à l'été 2020. La dot de la société comprenait l'équipe dédiée à la capture du CO2, un portefeuille de brevets et des projets plus ou moins avancés. Et le prestige de l'entreprise qui avait conçu et déployé la mère de toutes les installations CSC avec stockage dédié, sur la plateforme Sleipner en Mer de Norvège, dès 1996. Aker Carbon Capture utilise une solution de captage du CO2 classique à base de solvant d'amine, mais dispose d'une importante expérience, qui lui permet d'exister dans un secteur où se concurrencent grosses ingénieries, géants pétroliers et jeunes pousses innovantes. La preuve ? Deux gros dispositifs de capture sont en cours de déploiement, dans une cimenterie norvégienne et une usine de valorisation des déchets aux Pays-Bas.

Malgré ses références et son ancienneté, Aker Carbon Solutions n'est pas une société mature. D'ailleurs, le déploiement d'installations complexes et coûteuses telles que celles qui viennent d'être citées est long et immobilise des ressources considérables. Il faut plusieurs années avant d'espérer pouvoir en récolter les fruits, avec un risque non-négligeable de dérive, aussi bien sur le calendrier que sur les coûts. Qui plus est, le client a acheté un certain niveau de performance dans la capture du carbone, ce qui implique d'être à la hauteur des promesses pour le fournisseur. Aker Carbone Capture dispose d'une offre facilement lisible pour les industriels : "Just Catch", un design compact et modulaire capable de capter 40 à 100 kt par an, déployable en 15 à 24 mois. Et "Big Catch", une installation sur mesure de capacité supérieure à 400 kt par an, déployable en 30 à 36 mois.

Les solutions
Les produits du groupe (Source Aker Carbon Capture)

En ce qui concerne le volet financier, on reste dans une configuration de société en phase précoce. Aker Carbon Capture a engrangé 363 millions de couronnes norvégiennes (environ 34,5 M€) de chiffre d'affaires en 2021 pour une perte opérationnelle de 195 MNOK (environ 18,5 M€). Le déficit devrait culminer cette année à 223 MNOK pour 768 MNOK de chiffre d'affaires, avant de se réduire à mesure que les installations commenceront à fonctionner. La société a pour avantage d'être adossée à un actionnaire robuste et de disposer d'une technologie éprouvée, ce qui lui confère quelques atouts pour mener à la maturité commerciale ses principaux projets. L'enjeu est double. Non seulement atteindre l'équilibre opérationnel, peut-être en 2025. Mais surtout disposer de vitrines pour convaincre d'autres industriels de lancer leurs propres projets de capture.

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