Disons-le d'emblée, lesdits fondamentaux sont excellents. Sur la période 2012-2022, les ventes triplent, de $2 à $6.3 milliards ; les marges d'exploitation se maintiennent à une moyenne supérieure à 30% ; tandis que le résultat net, au demeurant parfaitement bien réconciliable avec le free cash-flow, suit une dynamique comparable, de $0.3 à $1.2 milliards.

Monster s'appuie par ailleurs sur un bilan tout à fait hors-du-commun, véritable forteresse avec un passif total couvert près de cinq fois par les seuls actifs courants, et $3 milliards de trésorerie en excès — prudemment conservés, on l'imagine, en vue de saisir une éventuelle opportunité de croissance externe. 

Conséquence d'une telle surcapitalisation : la rentabilité réelle de l'activité est masquée, alors même qu'elle atteint quasiment 100%.

L'exercice 2022 reste marqué par un déclin de la profitabilité, avec 700 points de base perdus au niveau de la marge d'exploitation, qui passe de 32% à 25%. Le coût de l'énergie et l'inflation généralisée n'ont pas épargné Monster, qui encaisse cependant bien le choc grâce à des ventes réalisées aux deux-tiers en Amérique du Nord — où les problématiques de supply chain et de coût de l'énergie ont été moins aiguës qu'en Europe.

Période Fiscale : Décembre 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026
Chiffre d'affaires 1 4 201 4 599 5 541 6 311 7 140 7 946 8 746 9 655
EBITDA 1 1 479 1 721 1 848 1 646 2 022 2 449 2 752 3 069
Résultat d'exploitation (EBIT) 1 1 414 1 660 1 797 1 585 1 953 2 356 2 657 2 950
Marge d'exploitation 33,67 % 36,1 % 32,44 % 25,11 % 27,36 % 29,65 % 30,38 % 30,56 %
Résultat Avt. Impôt (EBT) 1 1 416 1 626 1 801 1 572 2 068 2 439 2 749 3 047
Résultat net 1 1 108 1 410 1 377 1 192 1 631 1 891 2 116 2 348
Marge nette 26,37 % 30,65 % 24,86 % 18,88 % 22,84 % 23,8 % 24,19 % 24,32 %
BNA 2 1,015 1,320 1,285 1,115 1,540 1,808 2,045 2,294
Free Cash Flow 1 1 012 1 315 1 112 699 1 496 1 733 2 076 2 203
Marge FCF 24,09 % 28,61 % 20,07 % 11,08 % 20,96 % 21,81 % 23,73 % 22,81 %
FCF Conversion (EBITDA) 68,43 % 76,44 % 60,18 % 42,47 % 73,99 % 70,77 % 75,44 % 71,76 %
FCF Conversion (Résultat net) 91,36 % 93,32 % 80,72 % 58,66 % 91,74 % 91,63 % 98,11 % 93,79 %
Dividende / Action 2 - - - - - - - -
Date de publication 27/02/20 25/02/21 24/02/22 28/02/23 28/02/24 - - -
1USD en Millions2USD
Données Estimées

La génération de cash fait aussi les frais des ajustements de besoin en fonds de roulement post-pandémie. Elle reste toutefois pléthorique, avec un free cash-flow qui tourne à une moyenne de $1 milliards par an, pile poil dans la lignée des quatre derniers exercices.

C'est un peu là que le bât blesse : après une période  remarquablement faste entre 2014 et 2018, grâce, entre autres, à une marge brute supérieure à 60%, on observe une compression de la profitabilité et un résultat qui stagne — ceci malgré des ventes qui doublent. Il semble à ce titre plus raisonnable d'extrapoler la performance récente, plutôt que de miser sur un retour aux miraculeuses années 2014-2018...

Du reste, pas de changement dans les grandes orientations stratégiques. Coca-Cola reste actionnaire à hauteur d'un cinquième du capital et, on l'imagine, potentiel repreneur en tout instant. De son côté, l'allocation du capital reste bien équilibrée — grosso modo moitié-moitié — entre rachats d'actions et constitution d'un "trésor de guerre" en vue d'une possible acquisition. 

En vertu de ses excellents fondamentaux et de la "call-option" Coca-Cola, le marché n'a semble-t-il pas vraiment pris ombrage des marges — certes toujours très élevées — en stagnation, voire en érosion, puisque l'acton s'échange toujours à x50 ses profits. 

Cette valorisation ambitieuse ne supporterait sans doute pas de nouvelles déconvenues, ni d'espoir douchés dans les perspectives de croissance...