Tokyo (awp/afp) - Toshiba a confirmé mercredi étudier une offre de rachat de la part de la société britannique de capital-investissement CVC Capital Partners. Les discussions interviennent moins de trois semaines après un cuisant revers du conglomérat industriel japonais face à des actionnaires activistes.

"Toshiba a reçu une proposition initiale hier (mardi, NDLR)" de la part de CVC et va demander "plus de détails" en vue d'examiner "minutieusement" cette offre, a déclaré le groupe dans un bref communiqué. Un conseil d'administration est prévu mercredi pour discuter de cette offre, a précisé de son côté le directeur général du groupe, Nobuaki Kurumatani, cité par le quotidien économique japonais Nikkei.

Selon ce journal, qui avait annoncé en premier la proposition de CVC dans la nuit de mardi à mercredi, la société de capital-investissement proposerait une prime de 30% par rapport au prix de l'action Toshiba mardi à la clôture de la Bourse de Tokyo. L'offre valoriserait le groupe à hauteur de 20,8 milliards de dollars (17,5 milliards d'euros).

Le titre Toshiba, voué à grimper en flèche après ces informations, était suspendu aux échanges mercredi à la Bourse de Tokyo en raison d'un trop grand nombre d'ordres d'achat par rapport à son plafond autorisé pour la séance. Interrogé mercredi par l'AFP, CVC a décliné tout commentaire.

"Du pain sur la planche"

Selon le Nikkei, le but de ce rachat serait de rendre le conglomérat japonais plus agile dans sa prise de décision, alors qu'il se débat depuis plusieurs années avec des actionnaires activistes. Le 18 mars, la direction de Toshiba a notamment subi une humiliante défaite face à ses actionnaires activistes lors d'une assemblée générale extraordinaire, qui a forcé le groupe à accepter le principe d'une enquête indépendante pour faire toute la lumière sur sa précédente AG ordinaire en 2020.

Celle-ci s'était déroulée dans des circonstances douteuses, avec des votes d'actionnaires omis bien que recevables. CVC Capital Partners et Toshiba se connaissent bien: M. Kurumatani a été président de CVC au Japon entre 2017 et 2018, juste avant de prendre la tête du conglomérat industriel. Un haut conseiller de CVC, Yoshiaki Fujimori, siège par ailleurs au conseil d'administration du groupe.

"Etant donné les turbulences chez Toshiba, le contexte de taux d'intérêt favorables et le soutien d'investisseurs, la situation est idéale pour CVC et son expertise dans les restructurations et le redressement" d'entreprises, juge Justin Tang, chef analyste de United First Partners pour l'Asie-Pacifique interrogé par l'AFP.

Mais même en cas d'un avis favorable de la direction de Toshiba, CVC devrait avoir "du pain sur la planche" pour obtenir des autorisations réglementaires et convaincre des actionnaires activistes du groupe japonais, prévient M. Tang. Du fait notamment de ses activités dans le nucléaire, Toshiba est un groupe stratégique pour le Japon, qui a par ailleurs durci depuis l'an dernier son contrôle des investissements étrangers dans des entreprises nippones, implicitement pour se protéger de l'appétit chinois.

Soif d'acquisitions

Ancienne perle de l'industrie japonaise, Toshiba a beaucoup perdu de sa superbe depuis un énorme scandale de maquillage de ses comptes révélé en 2015, et des pertes massives surtout liées à la déroute de sa filiale américaine d'équipements nucléaires Westinghouse, aujourd'hui revendue. Jouant sa propre survie, le groupe avait alors dû se séparer de nombreux actifs et se renflouer dans l'urgence, ouvrant ainsi sa porte à des fonds activistes, toujours très critiques sur sa gouvernance.

Mais il a depuis assaini ses finances, ce qui lui a permis de revenir fin janvier sur le prestigieux premier tableau de la Bourse de Tokyo. Toshiba vise pour son exercice annuel écoulé 2020/21 (clos au 31 mars) un bénéfice net de 70 milliards de yens (537 millions d'euros au cours actuel), pour un chiffre d'affaires de 3.070 milliards de yens (23,6 milliards d'euros).

Encore présent dans une kyrielle de secteurs (énergie, électronique et stockage informatique, impression, construction, équipements industriels et ingénierie...), Toshiba compte surtout mettre l'accent pour sa croissance future dans les services pour infrastructures, les technologies numériques et les énergies renouvelables, y compris en renouant avec de grandes acquisitions.

Par ailleurs, Toshiba possède encore environ 40% de Kioxia (anciennement Toshiba Memory), l'un des géants mondiaux des puces mémoires Flash NAND attisant les convoitises après avoir reporté l'an dernier son introduction en Bourse à Tokyo.

afp/vj